Un premier bâtiment complètement neutre en carbone
Un premier bâtiment complètement neutre en carbone
«Il faut décarboniser notre économie en accompagnant les entreprises dans différents projets permettant de réduire l'empreinte carbone», lançait Franz Fayot (LSAP), ministre de l'Economie, au moment d'annoncer les différentes mesures actées lors de la tripartite de mars dernier. Des entreprises n'ont cependant pas attendu des mesures gouvernementales pour aller de l'avant dans ce processus de décarbonisation.
C'est le cas de la compagnie Eaglestone, fondée en Belgique mais également présente au Luxembourg depuis 2015 ainsi qu'en France. C'est d'ailleurs au Luxembourg qu'Eaglestone développe actuellement un immeuble de bureaux nommé «The Bridge». Un projet loin d'être ordinaire et pour cause, il s'agira du tout premier bâtiment entièrement neutre en carbone construit au Luxembourg. «On peut même dire qu'il s'agit d'une première dans la Grande Région», se réjouissent Stéphane Bagat, directeur de projet, et Jean-Christophe Bacci, directeur technique.
Si aujourd'hui, Eaglestone planche sur 11 projets immobiliers différents pour un total de 400 millions d'euros de chiffre d'affaires, «The Bridge», qui verra le jour à Bonnevoie, fait clairement figure d'attraction au regard de l'initiative de décarboniser complètement la réalisation de cet ouvrage. «On a déjà commencé à travailler sur les enjeux environnementaux dès 2018», précise Stéphane Bagat. «On a commencé par identifier, quantifier et optimiser l'empreinte CO2 des activités intrinsèques à l'entreprise: frais de chauffage, frais de fonctionnement, trajets des collaborateurs, etc. On a rapidement complété ça par ce qui est le plus le plus lourd en termes d'empreinte carbone, à savoir les projets immobiliers que l'on développe.»
Jean-Christophe Bocci ne dit d'ailleurs pas autre chose à propos des enjeux climatiques. Il cite d'ailleurs le célèbre livre de Dennis Meadows intitulé «Les limites à la croissance». Écrit il y a plus de 50 ans, l'ouvrage dénonce déjà les dangers d'une croissance continue pour l'homme et pour l'environnement. «Déjà à cette époque, on alertait sur la problématique des émissions de gaz à effet de serre. Et malheureusement, il a fallu attendre les accords de Paris de 2015 pour que tout le monde commence à réfléchir sur l'aspect de la neutralité carbone. Malheureusement, au regard des derniers rapports du GIEC, on se rend compte qu'on a déjà perdu énormément de temps.»
Bref, au moment de concevoir «The Bridge», plusieurs solutions ont été trouvées afin de réduire l'empreinte carbone lors de la construction de l'immeuble. «On a notamment décidé d'une structure bois-béton avec des matériaux recyclés, en travaillant également sur les filières de réemploi», précise Stéphane Bagat.
Cette optimisation permet déjà une compensation carbone comprise entre 20 et 30%. On est cependant loin des 100% de compensation carbone promis. «Deux choix se sont ensuite présentés devant nous: soit une compensation via des projets dans l'hémisphère sud réalisés par des ONG, soit l'achat d'une parcelle de forêt en Moselle prête à être reboisée. Nous avons opté pour la seconde solution, car cela nous permettait d'avoir des garanties de suivi des résultats. Nous avons donc décidé de financer ce projet de reboisement de 18 hectares en France, ce qui nous a donc permis de compenser à 100% l'empreinte carbone de «The Bridge»».
Les deux hommes sont persuadés qu'une telle initiative, possible en France, pourrait voir le jour au Luxembourg. «Malheureusement, à l'heure actuelle, ce n'est pas proposé», regrette Jean-Christophe Bocci. Toutefois, on se doute qu'il serait difficile pour les développeurs immobiliers de planter des dizaines d'hectares d'arbres à chaque projet, la superficie reboisable étant limitée. «Effectivement, mais en ce qui concerne la forêt de Moyeuvre, là où nous avons financé cette parcelle dédiée au reboisement, il reste encore plusieurs centaines d'hectares disponibles pour ce même type d'initiative. Il y a donc encore de quoi faire», remarque Stéphane Bagat. «Mais il n'y a pas que les forêts pour compenser une empreinte carbone. Je pense par exemple à la renaturation des étangs par exemple», ajoute Jean-Christophe Bocci.
Plus concrètement, Eaglestone a donc financé cette parcelle qui avait été replantée l'année dernière pour un montant total de 130.000€. «Allons-nous continuer à compenser à 100% nos prochains projets? On continuera évidemment nos compensations volontaires. On travaillera sur tous les leviers d'action pour avoir le moins d'émissions de carbone possible. Je pense notamment aux façades ou aux matériaux utilisés qui seront repensés, tout en gardant l'efficience des bâtiments».
Eaglestone espère de son côté que son initiative trouvera un certain écho chez d'autres développeurs immobiliers. «L'effort doit être mondial», concluent les deux hommes.
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