Toujours pas de décollage pour les agences de voyages
Toujours pas de décollage pour les agences de voyages
(DH) - Ne vous fiez pas à la bonne humeur affichée par Fernand Heinisch. Le président de l'Union luxembourgeoise des agences de voyages (ULAV) a le moral dans les chaussettes depuis le début de la pandémie de covid-19. «Le secteur va essayer de sauver ce qui peut l'être encore, et si nous parvenons à réaliser la moitié du chiffre d'affaires de l'année dernière nous pourrons alors nous estimer heureux», indique celui qui est aussi gérant associé des Voyages Emile Weber.
En raison du confinement puis de la cacophonie européenne lorsqu'il s'est agi de rouvrir les frontières au sein de l'UE, les voyagistes ont manqué le premier temps fort de l'année. En effet, selon le Statec, et d'après les chiffres de 2018, les résidents luxembourgeois accomplissent presque tous leurs voyages touristiques hors du pays de résidence au printemps (98%). Ils sont même encore plus nombreux lors de la haute saison estivale. Alors autant prendre le prochain bon wagon et mettre tous les atouts de son côté.
Surtout que quelques soubresauts de reprise se font sentir. «Après avoir traversé un tunnel pendant des semaines, nous avons le sentiment que les gens veulent à nouveau voyager. Ils en ont besoin», assure le patron des voyagistes. La preuve en est donnée par les 14 succursales des Voyages Flammang qui ont enregistré près de 300 réservations lors de la troisième semaine du mois de juin.
«Il faut toutefois accompagner nos clients», indique-t-on du côté de chez Sales-Lentz, «car les clients sont inquiets de ne pas savoir dans quelles conditions ils vont pouvoir voyager et s'héberger.» Dans ce cadre, l'ULAV a fait passer ses consignes, à commencer par «privilégier l'espace Schengen». A ce propos, la Commission européenne a confectionné une carte interactive reprenant les principaux dispositifs pris par les Etats membres cet été.
Chez Emile Weber, comme dans la majorité des grandes enseignes du pays, la société basée à Canach mise «sur les destinations traditionnelles»: le Portugal, l'Espagne, la Grèce et l'Italie. L'Allemagne, le Tyrol aussi, et la Suisse. Des destinations plus proches qui correspondent davantage à la nouvelle maxime du «monde d'après» qui ressemblerait à celle-ci: «moins loin et moins haut». Et pour ce faire, l'autocar apparaît tout indiqué. «Il garde la cote», affirme Fernand Heinisch sans toutefois proposer de chiffres de réservations. «En tout cas, le bus rassure aujourd'hui beaucoup plus que l'avion».
Mais si le rebond est attendu du côté des «généralistes», les voyagistes qui proposent des produits davantage «spécialisés» redoutent les mois à venir. C'est particulièrement le cas des croisiéristes alors que les images de paquebots errant de port en port ont coulé un secteur qui tablait pourtant sur 32 millions de passagers dans le monde. Cruisopolis, le spécialiste luxembourgeois de ce créneau navigue à vue et espère terminer l'année avec 3,5 millions d'euros de chiffres d'affaires, soit près de trois fois moins que l'année dernière, selon Paperjam.
La situation est encore plus dramatique lorsqu'il s'agit de produits de niche, ce que propose Sense of Japan. Malgré la réouverture des frontières du pays du Soleil levant, ce 1er juillet, la propriétaire Mme Hayashi a raté sa saison qui reste concentrée sur les mois de mars et avril, ceux de la floraison des cerisiers. L'entreprise apparaît en difficulté. Et si certains voyagistes se retrouvaient insolvables à la suite de remboursements massifs, leurs clients seraient également perdants comme l'a montré la faillite de Thomas Cook l'année dernière.
En attendant les aides promises par le gouvernement - qui n'ont pas encore été versées selon le président de l'ULAV -, les responsables d'agence de voyage vont devoir serrer les dents et espérer qu'une deuxième vague d'infections ne vienne saper leurs espoirs d'un second semestre plus réjouissant. Du côté de LuxairTour les perspectives sont d'ailleurs plutôt bonnes comme en témoignent les augmentations des réservations de 17% pour le mois d'octobre et jusqu'à 28% pour novembre, par rapport à 2019.
Au niveau mondial, d'après une estimation de l'ONU, les restrictions liées au covid-19 devraient se traduire ces prochains mois par un manque à gagner allant de 1.200 à 3.300 milliards de dollars pour le tourisme et les secteurs liés. Et selon une nouvelle étude de la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (Cnuced), le tourisme, qui représentait environ 300 millions d'emplois dans le monde en 2019, est l'un des secteurs les plus touchés par la crise.
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