Retour sur le crash du Fokker de Luxair
par David THINNES/ 06.11.2022
Le crash de l'avion Luxair-Fokker près de Niederanven restera l'accident le plus grave dans l'histoire de l'aviation luxembourgeoise.
6 novembre 2002, 10 heures, 5 minutes et 42 secondes: le vol Luxair LG 9642 de Berlin à Luxembourg disparaît du radar. Le Fokker s'est écrasé à environ 700 mètres de la piste d'atterrissage. Ce matin-là, près de Niederanven, 18 passagers, une hôtesse de l'air et le copilote meurent. Parmi les morts, quatre Luxembourgeois, dont l'hôtesse de l'air et le copilote - le reste des victimes étant de nationalité allemande.
Aujourd'hui, le lieu du crash est toujours un champ. La seule différence est le mémorial qui y a été érigé par la commune de Niederanven un an après le crash.
Les dernières secondes
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«Oh merde»: ce sont les derniers mots enregistrés à 10h05'29'' sur le fameux Cockpit Voice Recorder (CVR). Ces mots proviennent du pilote, qui avait déjà prononcé cette phrase quelques secondes auparavant. Lors du procès, les enregistrements de 30 minutes avaient été diffusés dans leur intégralité.
Au début, on entend les deux pilotes dans une conversation qui n'a rien à voir avec le crash. Le copilote parle de ses «exploits» sur la route.
Le pilote ne s'exprime que lorsqu'il est dit que l'avion doit effectuer un long «holding», c'est-à-dire un atterrissage avec boucle au-dessus de Diekirch, en raison d'une mauvaise visibilité. La visibilité n'est que de 250 mètres, 300 mètres sont nécessaires pour atterrir. «Mais je dois rentrer à la maison, merde», entend-on dans la cabine du pilote. Même une éventuelle déviation vers Sarrebruck n'est pas accueillie avec enthousiasme.
«Qu’est-ce que c’est?»
La tour de contrôle du Findel signale toujours une mauvaise visibilité. Le pilote interrompt l'approche. «On doit refaire le tour, on a manqué l’approche». Le contrôle aérien annonce alors 18 secondes plus tard une bonne visibilité, 300 mètres. Ensuite, on n'entend plus grand-chose dans le cockpit - seulement les machines. Le régime des moteurs augmente de manière audible.
On entend également un clic. Les experts diront plus tard qu'il s'agit de la levée des «Primary Stops», ces verrous mécaniques qui empêchent les manettes de poussée de se déplacer dans les zones prévues pour les mouvements au sol pendant le vol.
Le copilote dit alors quelque chose qui n'est pas tout à fait passé à la postérité : «... pas assez» et ensuite «C’est vrai...». Le pilote fait alors part de son étonnement. «Qu’est-ce que c’est?» et «Oui?». Le copilote se fait alors à nouveau entendre: «Mais c'est tout à fait orienté». S'ensuivent les déclarations «Oh merde», puis le CVR tombe en panne.
L'accident
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L'appareil s'écrase d'abord à droite de la RN 1 en direction de Roodt/Syr, comme le montre le rapport du ministère des Transports de janvier 2003. Des photos montrent des traces dans le champ à côté de la route. La plupart des dégâts sont dus à ce choc, comme la rupture de trois pales de rotor à droite et de deux à gauche.
L'avion s'écrase ensuite sur un petit talus dans le champ, où il s'immobilise. Un incendie se déclare immédiatement et détruit une grande partie du fuselage.
Lors du procès de l'accident, il a été établi que les hélices du Fokker 50, qui volait depuis 1991 et qui avait manqué sa dernière révision six mois plus tôt, avaient pris des positions anormales pendant la phase de vol, ce qui avait entraîné une perte de contrôle massive.
Des ajustements techniques non effectués
Le fait que les hélices aient pu prendre ces positions anormales est dû à l'interaction entre l'homme et la machine. Les erreurs du pilote et les défauts techniques du Fokker se sont enchaînés de manière malheureuse.
Fokker avait reconnu qu'il y avait un problème au niveau de la «Skid Control Unit» et en avait informé ses clients, mais uniquement à titre de recommandation et sans instruction contraignante de modification. Luxair n'avait pas procédé à cette adaptation.
L'enquête a également révélé que l'avion avait chuté d'une hauteur de 476 mètres avant de toucher le sol.
Le survivant
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Troisième avant-dernière rangée, à gauche de la fenêtre: c'est là qu'était assis l'homme qui a été, avec le pilote, le seul survivant de l'accident. Le Français, qui avait 36 ans lors du crash, a été interrogé à deux reprises, une première fois le 13 novembre 2002 par la police, puis une seconde fois le 4 juillet 2003 par le juge d'instruction.
«Quand nous avons entamé la descente, je me suis dit: ok, le pilote n'a rien dit. J'ai regardé par la fenêtre. Les roues sont sorties normalement et nous nous trouvions dans les nuages. Il y avait quelques vibrations, ce que je trouvais normal. Puis, à un moment donné, j'ai perdu connaissance. Je me suis réveillé, j'étais dehors sur le sol, toujours attaché à mon siège. Je pense que le siège se trouvait au-dessus de moi», avait-t-il déclaré à l'époque.
Je me suis réveillé, j'étais dehors, par terre, toujours attaché à mon siège.
Le passager qui a survécu
Le Français, qui a été grièvement blessé, a également rapporté au juge d'instruction avoir ressenti un «choc». Il n'a toutefois pas pu déterminer plus précisément si celui-ci était lié à la chute ou à l'impact. Il a en outre indiqué qu'il n'y avait pas eu de panique dans la cabine.
L'équipage
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Le pilote, âgé de 26 ans au moment de l'accident, possédait sa licence de vol depuis le 16 mars 1999. Il avait 4.242 heures de vol à son actif, dont 2.864 sur le type d'avion Fokker. Lors du procès, il a été condamné à trois ans et demi de prison avec sursis.
Interrogé par le Wort, le pilote, qui a perdu sa licence de vol, n'a pas souhaité s'exprimer.
Le copilote avait 32 ans au moment du crash et était en possession de sa licence depuis le 19 janvier 2001. Il avait alors 1.156 heures de vol à son actif, dont 443 sur le type d'avion Fokker.
L'hôtesse de l'air avait 32 ans lorsque l'avion s'est écrasé et était au service de Luxair depuis février 1995.
Le pilote a survécu, grièvement blessé. Le copilote et l'hôtesse de l'air sont décédés. Cette dernière a été retrouvée dans le couloir près de l'entrée.
Le processus
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Le procès a débuté en octobre 2011 et 33 jours de procès étaient prévus au total devant le tribunal d'arrondissement de Luxembourg. Le jugement a ensuite été rendu le 27 mars 2021. Le pilote a été condamné, entre autres, à trois ans et demi de prison avec sursis et 4.000 euros d'amende pour homicide involontaire et blessures involontaires.
Des peines de 18 à 24 mois avec sursis et des amendes de 2.000 à 2.500 euros ont été prononcées à l'encontre de trois techniciens Luxair. Les trois ex-directeurs généraux de Luxair ont été acquittés.
Le 21 janvier 2014, la Cour d'appel du Luxembourg accorde aux survivants un total d'environ 400.000 euros de dommages et intérêts. La Cour reste ainsi bien en deçà de la somme demandée de près de 1,5 million d'euros.
Le point final est ensuite l'arrêt de la Cour de cassation. Le jugement n'est pas «cassé». Les proches conservent donc leur droit à des dommages et intérêts.
Cet article a été publié pour la première fois sur www.wort.lu/de
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