Pour grandir, l'armée ciblera plus large
Pour grandir, l'armée ciblera plus large
Avec 1.100 soldats sous ses ordres, le chef d'état-major de l'armée luxembourgeoise devrait être comblé. Mais, le général Steve Thull reste loin de ce sentiment. La carrière sous l'uniforme n'attire pas tant, les femmes manquent à l'appel et les engagés ne restent pas suffisamment longtemps sous les drapeaux pour que leur formation soit mise à profit.
Et tout cela alors que les missions, elles, sont de plus en plus nombreuses, plus complexes et demandent des spécialisations pointues et des soldats aguerris. D'où ce constat amer du plus haut gradé du pays : «Notre effectif n'est pas en adéquation avec notre rôle».
Message reçu 5/5 par le ministre de la Défense. François Bausch (Déi Gréng) qui, à la rentrée, déposera donc un projet de loi visant à réorganiser l'offre de carrières. L'objectif est clair : faire de la Lëtzebuerger Arméi «un employeur attractif et moderne».
Pour la stratégie, l'officier supérieur (kaki) et le ministre (vert) marchent du même pas: «Il faut d'abord rendre les carrières plus attractives». D'où ce tir tous azimuts avec, notamment, la fin de la limite d'âge pour l'accès aux carrières militaires; l'instauration d'une prime d'astreinte accordée aux personnels civils soumis à une obligation de permanence; ou encore l'introduction d'une nouvelle grille de carrières.
En effet, l'armée se doit de compter dans ses troupes plus de personnels à spécialisation professionnelle et hautement qualifiés. C'est qu'entre la cyberdéfense, le spatial, l'aérien, les interventions pour le compte de l'Otan et autres nécessités humanitaires ou guerrières à l'étranger, «l'idée qu'on entre chez nous uniquement comme soldat de base doit être cassée», bataille Steve Thull. La contre-attaque instaurera donc des recrutements avec un accès direct au grade d'officier ou sous-officier.
«Comme dans la fonction publique, on créera des entrées, après réussite au concours, dès les niveaux A2 (officiers) et B1 (sous-officiers)», note le général. Un gradé impatient de voir se combler ce «trou béant» qu'il note parmi ses effectifs «entre le niveau 11e et bac +5». Et qu'importe si ce rééchelonnement de carrières coûte, le gouvernement est prêt à accorder une rallonge annuelle pour payer les ajustements. Soit 2,3 millions d'euros supplémentaires aux 225 millions actuels de budget de l'armée.
Autre champ de bataille : la féminisation. Pas de quota établi, mais une volonté affichée d'en finir avec une vision machiste du métier de militaire. «Actuellement, les femmes ne représentent que 10% des officiers en service, 5% des sous-officiers et on ne compte qu'une caporale. Ce n'est ni représentatif de la société, ni de la place effectivement faite aux femmes dans notre organigramme», estime le chef d'état-major. Alors, même si «pour l'instant le recrutement féminin ne mord pas», l'armée a bien l'intention de démontrer à ces dames qu'en treillis, devant un ordinateur ou penchées sur le moteur d'un blindé, elles ont bien leur place.
Engagé pour 4 ans
Enfin, la durée d'engagement des soldats volontaires va être prolongée. Quatre ans à l'avenir contre trois actuellement, et une possibilité de prolonger sous l'uniforme de cinq ans (contre un réengagement limité à trois ans aujourd'hui). Un facteur temps «capital» aux yeux du chef d'état-major. «Actuellement, le rendement durée d'instruction/disponibilité pour des opérations est insatisfaisant».
En disposant de soldats plus longtemps, l'armée sait pouvoir non seulement mener à bien une instruction de «plus en plus longue et exigeante» mais surtout pouvoir compter à tout moment sur des troupes prêtes à être engagées sur tous les terrains.
Un terrain qui peut se situer aussi bien dans d'autres contrées qu'au pays lui-même. En témoigne encore le rôle de l'armée lors des récentes inondations où les soldats luxembourgeois ont été doublement mis à contribution. Dans le combat face à la montée des eaux d'abord, puis dans l'aide apportée aux ménages sinistrés. Y compris en mobilisant cinq personnels pour se rendre en mission de secours en Allemagne, avec CGDIS et Croix-Rouge.
«Un soldat s'entraîne énormément, il faut que cet élan se déploie à un moment. En s'enrôlant, nos hommes et femmes veulent servir. D'où cette satisfaction qui gagne les rangs quand chacun se sait utile. Nous l'avons prouvé cette fois, comme nous l'avions fait dans le cadre de l'aide apportée dans la crise sanitaire, ici au pays», réagit le général Thull. Ou encore sur des points de conflit armé au Mali, en Afghanistan, en Irak, en Lituanie ou, il y a plus longtemps, au Kosovo...
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