Maladie de Lyme: "On veut une vue correcte de la situation"
Maladie de Lyme: "On veut une vue correcte de la situation"
Par Christelle Raineri
Notre enquête sur la maladie de Lyme chronique publiée le 30 octobre dernier exposait les difficultés des patients atteints de borréliose de Lyme à un stade avancé et pointait du doigt la formation insuffisante des médecins sur ce sujet et les failles du système épidémiologique luxembourgeois.
La députée Sylvie Andrich-Duval (CSV) avait alors interrogé la ministre de la Santé dans une question parlementaire à propos de la situation du Luxembourg face à cette pathologie.
Si les réponses de Lydia Mutsch restent floues sur certaines problématiques, notamment l'absence de prise en charge par la CNS des soins et traitements nécessaires aux patients au stade chronique de la maladie (atteints depuis plusieurs années), la ministre fait tout de même une annonce: un avant-projet de loi sera bientôt présenté au Conseil de gouvernement.
Les laboratoires devront déclarer les tests positifs
Il prévoit d'instaurer une obligation, à la fois pour les médecins et pour les laboratoires, de déclarer les maladies infectieuses diagnostiquées, dont la borréliose.
Les médecins sont déjà censés le faire, comme le prévoit le règlement grand-ducal du 10 septembre 2004 sur les maladies infectieuses, mais dans les faits, comme le reconnaît la ministre elle-même, c'est rarement le cas.
"L'avant-projet de loi est en cours d'élaboration", informe le Dr Pierre Weicherding, médecin inspecteur, chef de division de l'inspection sanitaire au ministère de la Santé.
Il y a des patients pour lesquels l'antibiothérapie ne fonctionne pas
"Nous voulons avoir une vue correcte de la situation or, pour le moment, il semble évident que tous les cas ne sont pas déclarés. Si, en complément des indications des médecins, les laboratoires rapportent un résultat positif aux tests concernant la borréliose pour un patient, le cas sera pris en compte."
La piste d'un "post Lyme syndrom" ?
Toutefois, le Dr Weicherding ne cache pas que le diagnostic de cette forme particulière de la maladie de Lyme pose un gros problème:"Il y a des patients pour lesquels l'antibiothérapie ne fonctionne pas. Des années après une morsure de tiques, les tests peuvent être positifs parce que le patient a développé des anticorps contre les borrélias (bactéries responsables de la maladie de Lyme, ndlr) mais est-ce que ces patients ont toujours la borréliose? On ne le sait pas."
Difficile d'enseigner quelque chose alors que les scientifiques eux-mêmes ne sont pas d'accord entre eux!
"Les scientifiques ne sont pas d'accord sur le sujet. Actuellement, les connaissances en la matière ne permettent pas de savoir si les problèmes chroniques de ces patients sont dûs à la présence de borrélias ou aux lésions qu'elles auraient pu causer lors d'une borréliose guérie depuis." D'où ce nom "post Lyme syndrom" qui émerge au sein de la communauté scientifique.
Quant à la formation des médecins qui seraient défaillante en faculté de médecine sur le sujet, le Dr Weicherding est clair: "Difficile d'enseigner quelque chose alors que les scientifiques eux-mêmes ne sont pas d'accord entre eux!"
Tania: "Les réponses que j'attends sont simples"
Pour Tania Silva, patiente atteinte de borréliose de Lyme en stade chronique que nous avions rencontrée lors de notre enquête, ce n'est pas assez. La jeune femme ne cache pas sa déception:
"Les réponses que j'attends sont simples, mais la ministre reste floue. Il y a des solutions, mais si on n'a pas envie de les voir, on ne les voit pas."
Ce que je voudrais surtout, c'est qu'on arrête de nous dire que c'est dans notre tête
"Ce que je voudrais surtout, c'est qu'on arrête de nous dire que c'est dans notre tête." Car c'est bien cela que les patients entendent lorsque le traitement antibiotique de trois semaines prévu pour traiter une borréliose à un stade précoce n'a pas d'effet sur eux.
"Un monsieur m'a appelée en larmes hier parce que sa femme est maintenant en fauteuil roulant, elle ne peut plus marcher: ses tests sont positifs pour la borréliose mais on lui dit que sa paralysie est psychosomatique."
Des actions prévues ces prochains samedis
Suite à la publication de notre série d'articles, Tania a été contactée par de nombreux patients démunis qui lui demandent de l'aide. La pétition publique en ligne qu'elle a lancée atteint désormais 2.274 signatures, auxquelles il faut ajouter celles recueillies sur papier: environ 300 jusque là, précise la jeune femme.
"On doit arriver à 4.500 signatures avant le 3 décembre pour être pris au sérieux et que le sujet fasse l'objet d'une discussion en commission." Pour y parvenir, Tania et des proches qui soutiennent son combat seront mobilisés:
- les samedis 14, 21 et 28 novembre,
- à Luxembourg-ville, de 14 à 17 heures, près de la poste et place d'Armes,
- à Esch-sur-Alzette, de 14 à 17 heures, rue de l'Alzette.
"On cherche encore des volontaires pour être présents aussi à Differdange." Si vous souhaitez participer, contactez la jeune femme via son groupe Facebook.
Lisez l'intégralité de notre enquête sur la maladie de Lyme au Luxembourg publiée le 30 octobre 2015 en cliquant ici.
