Les infirmières se lassent du silence de Bettel
Les infirmières se lassent du silence de Bettel
Anne-Marie Hanff a bien écouté le discours sur l'état de la Nation du Premier ministre. Et dans les 53 pages du discours de Xavier Bettel, elle n'a malheureusement rien retenu comme réforme qui puisse la réconforter elle, la présidente de l'Association nationale des infirmières et infirmiers du Luxembourg, ni les 800 adhérents de l'ANIIL. «L'aide à la presse, aux entreprises, les finances communales, le congé sportif, ça il en a parlé. Mais sur le devenir de notre profession, pas un mot.»
Et pourtant, les «blouses blanches» sont devenues le premier rideau dans la lutte contre l'épidémie covid. «Au front» depuis mars, et encore plus aujourd'hui. «Alors, on peut se féliciter comme le Premier ministre d'avoir acheté 90 millions de masques, 34 millions de gants, 2,5 millions de tenues de protection, quatre scanners mais qu'en est-il de ceux et celles qui doivent les utiliser? Là-dessus, silence radio», regrette Anne-Marie Hanff. Et cela même si à plusieurs reprises, son association professionnelle a tenté d'obtenir un rendez-vous auprès du chef de gouvernement.
Car urgence il y a d'agir pour soulager les infirmières du pays. Déjà en assurant le recrutement. «Même après la campagne express d'embauche de ces derniers jours, on peut estimer qu'il manque toujours de l'ordre de 80 postes infirmiers dans les différents établissements de santé du pays. Où va-t-on les trouver pour soulager les équipes?» Certainement plus dans l'embauche de personnels frontaliers.
En effet, la ministre de la Santé a passé des consignes en ce sens aux centres hospitaliers pour qu'ils cessent de puiser dans la réserve de professionnels de la Grande Région au risque de mettre en péril les organisations de l'autre côté des frontières. «Quand j'ai appris les tensions que cela faisait naître dans les hôpitaux des pays voisins, j'en ai été gênée», reconnaissait d'ailleurs Paulette Lenert (LSAP) après plusieurs interpellations des autorités sanitaires belges, françaises ou allemandes. «Il faut résoudre cette dépendance. Mais dans l'immédiat, le gouvernement n'apporte pas la solution pour faire face au besoin...»
Tout comme, la porte-parole des infirmières aurait aimé entendre le Premier ministre exposer des pistes dans la formation des infirmières de demain. Le système actuellement en place ne correspond plus aux attentes des hôpitaux, mais personne ne se penche sur la question pour réformer l'offre d'enseignement au pays même.
Certes, à l'occasion, Xavier Bettel a évoqué la possibilité d'ouvrir un nouvel établissement de formation d'infirmières ou des aides-soignantes. Mais depuis, là encore, plus un mot...
On sait le département de la Moselle intéressé par la question, et son président verrait bien l'organisme s'installer sur le site français de Micheville, face à Belval. «J'en ai parlé au Premier ministre luxembourgeois, assure Patrick Weiten. Il était intéressé, et nous devons nous revoir à ce sujet.» Un début de réponse sur lequel la voix du Premier pourrait apporter de l'assurance.
«Vous savez, on ne proteste pas pour le plaisir, commente Anne-Marie Hanff. Assurer ce besoin de formation, c'est assurer la qualité de la prise en charge des malades à la hauteur de ce qui peut être fait au Grand-Duché». Et d'avancer un simple exemple, en lien avec les soins nécessaires aux patients covid actuels : «C'est bien beau de dire que nous avons 152 respirateurs prêts à fonctionner dans le pays, mais combien d'infirmiers anesthésistes luxembourgeois sont en mesure de s'en servir en réanimation? Bien peu car pour cette catégorie de personnels, 46% sont originaires de l'étranger.»
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