Le rôle des anticorps face à la reprise du covid
Le rôle des anticorps face à la reprise du covid
(ASdN avec Jacques Ganser) - Voilà douze ans que la virologiste Danielle Perez Bercoff effectue des recherches au sein du service Infection et Immunité du Luxembourg Institute of Health. Dans son projet Neutracov, elle tente de mesurer l'effet des anticorps des patients infectés par le covid-19.
Dr Perez Bercoff, quel est le rôle des anticorps dans l'organisme ?
«Les anticorps, qui se trouvent dans le plasma sanguin, permettent de neutraliser un virus et de l'empêcher d'infecter les cellules de l'organisme. Autrement dit, de se propager. Pour l'heure, notre test montre que la capacité des anticorps à bloquer ce virus est particulière.
Cela signifie-t-il que tous les anticorps ne sont pas efficaces de la même manière ?
«Non, en effet, il y a des différences. Tous les anticorps ne peuvent pas empêcher le virus d'infecter une cellule hôte. Il existe également des anticorps qui marquent le virus. Ils le rendent visible aux cellules tueuses qui pourraient le détruire. Mais pour l'heure, seul le blocage du virus nous intéresse.
Comment mesurer exactement l'efficacité des anticorps ?
«Il y a plusieurs façons de faire des tests : vous pouvez simplement mesurer la quantité d'anticorps produits et vous pouvez vérifier si ces anticorps ont été produits récemment ou il y a longtemps. Mais cela ne nous dit rien sur la qualité des anticorps. Pour développer notre test nous infectons délibérément une cellule hôte avec un virus, en laboratoire, dans un environnement où divers anticorps sont déjà présents. Plus il faut d'anticorps pour prévenir l'infection de la cellule, plus la réponse immunitaire et, logiquement, les anticorps eux-mêmes sont inefficaces.
Un vaccin est conçu pour préparer le système immunitaire à réagir immédiatement.
Dr Perez Bercoff
Et en pratique, comment ces tests peuvent-ils être utilisés ?
«Nous avons un objectif dans le développement de ce test. À moyen terme, l'objectif principal est de développer des méthodes de traitement. Il n'existe actuellement aucun médicament qui puisse guérir un patient atteint de covid-19. Plusieurs médicaments sont en cours de développement, notamment la chloroquine ou de la cortisone. Cependant, ces derniers ont été développés pour d'autres maladies et une guérison, au vrai sens du terme, n'est pas encore possible. Nous nous concentrons donc de plus en plus sur les traitements au plasma.
Votre test permet-il alors de mesurer l'efficacité des anticorps ?
«Exactement. Afin de savoir si le plasma ainsi obtenu est vraiment efficace, il est testé avant d'être administré au patient. Il existe différents niveaux d'efficacité, nous recherchons alors celui qui est le plus efficace et qui peut réellement aider le patient. L'avantage est que le nombre de donneurs de plasma potentiels, c'est-à-dire de patients guéris, est en constante augmentation. En outre, le plasma peut facilement être congelé et réutilisé si nécessaire.
Le traitement au plasma est-il une innovation ?
«Pas vraiment car il a déjà été utilisé pour la grippe ou le virus Ebola. En ce qui concerne le covid-19, nous en sommes encore au début : nous sommes dans la phase d'expérimentation et de recherche.
Le deuxième domaine d'application du test concerne le développement de vaccins. Comment l'envisagez-vous ?
«Un vaccin est conçu pour préparer le système immunitaire de manière à ce qu'il puisse réagir immédiatement et intensivement en cas d'infection virale. Environ 200 laboratoires dans le monde travaillent sur différents types de vaccins. Il existe des vaccins stimulant la production d'anticorps et d'autres activant les cellules immunitaires et se concentrant sur un pathogène spécifique. Avec nos tests, nous pouvons mesurer la réponse immunitaire après la vaccination. Il est alors possible d'apporter des corrections ou d'exclure immédiatement les substances qui ne seraient pas efficaces. Toutefois, nous ne saurons si un vaccin est réellement efficace que lorsqu'un grand nombre de personnes vaccinées seront exposées au virus dans des conditions réelles.
Qu'en est-il de l'immunité permanente face au covid-19?
«Nous ne savons pas. Une chose est sûre: le nombre d'anticorps dans le sang diminue à nouveau après quelques mois. Les études sur la vague de Sars-1 qui a frappé la Chine en 2002-2003 (également causée par un coronavirus) n'ont montré qu'une courte immunité. Cela signifie pour nous que le développement d'un vaccin qui ne produit que des anticorps est plus susceptible d'être une solution à court terme. Mais cela pourrait ne pas suffire. À long terme, vous avez besoin d'un vaccin qui produit à la fois des anticorps et une réponse cellulaire.»
Suivez-nous sur Facebook, Twitter et abonnez-vous à notre newsletter de 17h.
