Le Pacte Logement 2.0 approuvé dans la douleur
Le Pacte Logement 2.0 approuvé dans la douleur
(pj avec Michèle GANTENBEIN) Voilà un chantier qui aura duré six ans. Six années et bien des débats pour consolider les bases d'une nouvelle politique de l'habitat... Mais, mercredi, le Pacte Logement 2.0 a enfin été approuvé. Dans la douleur toutefois puisque de nombreux reproches pèsent sur le dispositif qui, par effet rétroactif, est officiellement entré en vigueur le 1er janvier 2021.
Pour son promoteur principal, le ministre Henri Kox (Déi Gréng) les objectifs sont clairs depuis le départ: accroître l'offre en appartements abordables, mobiliser les friches encore constructibles comme les logements vacants mais aussi améliorer la qualité des bâtis existants ou à venir (en matière énergétique notamment). Et tout cela en insistant pour que le plus de constructions restent dans la «main publique», à commencer par celle des communes. Des communes qui, désormais assistées d'un conseiller, devront établir un PAL (Pacte d'action local) définissant leurs ambitions en matière d'habitat sur leur territoire.
Et si la Chambre a bien adopté ce Pacte Logement 2.0 (avec les seules voix de la majorité), la première critique a été lancée contre le pacte précédent, datant de 2008. Ainsi, la présidente de la commission Logement, l'écologiste Semiray Ahmedova n'a pas manqué de pointer l'échec de cette mesure.
Ainsi, sur les 380 millions d'euros dirigés vers ce plan, seuls 2,2% auraient réellement été orientés vers la construction d'espaces de vie abordables. Et encore la plupart de ces logements ont ensuite été cédés au privé. Pour les 97% restants, les sommes sont allées à la construction d'infrastructures publiques. Un choix d'orientation qui se paye aujourd'hui, avec de plus en plus de difficultés pour la population à trouver un toit.
Dans la nouvelle version du plan, une partie des nouveaux appartements devra être cédée «à titre gratuit» aux communes. En contrepartie, celles-ci devront autoriser 10% de constructions en plus, cela afin que les promoteurs ne subissent aucune perte financière.
Une autre ''contrainte'' a désormais été posée dans le cadre de projets de construction, cette fois dans des quartiers existants. Là aussi les promoteurs devront céder une parti du bâti pour que les collectivités puissent disposer de logements abordables pour leurs concitoyens. Avec des taux variant en fonction de l'ampleur du projet immobilier. Mais ces ratios ayant été revus à la baisse par rapport à la version initiale du Pacte Logement 2.0, l'opposition s'est engouffrée dans la brèche pour dénoncer une incohérence. En témoigne le commentaire du député Marc Lies (CSV) : «D'une part, il s'agit de créer plus de surfaces habitables abordables mais d'autre part, la proportion est réduite. C'est incompréhensible!»
Les parlementaires ont aussi fait part d'une difficulté qui pourrait survenir avec la règle des 10%. En effet, certains projets de construction dans des milieux contraints (au milieu d'autres habitations par exemple), ne pourront pas offrir de volumes supplémentaires. Que faire alors? «La mise en œuvre de cette règle des dix pour cent sera un désastre», pronostique donc Marc Lies.
Parmi les reproches faits, d'aucuns ont aussi souligné l'effort administratif demandé aux communes pour établir leur PAL. Certes, le gouvernement a prévu de mettre à disposition des conseillers, mais est-ce suffisant ? Et puis certains députés voient dans ce choix l'intrusion de l'Etat au cœur même de l'action communale. Manque de confiance, contrôle : les mots ont été lâchés.
Mais pas de quoi faire vaciller le ministre du Logement dans sa volonté d'agir. Oui, admet Henri Kox, le nouveau cadre juridique est restrictif. Mais cela est nécessaire à ses yeux «car nous nous fixons des objectifs contraignants qui doivent être atteints». Un ministre dont l'ambition reste de voir se bâtir 4.000 logements abordables dans les quatre ans à venir.
Pour atteindre ce «changement de système», le député Yves Cruchten a émis plusieurs propositions. Comme la tenue d'une vaste table ronde nationale «avec toutes les parties prenantes, afin de sonder quelles vis de réglage doivent être tournées pour avancer plus rapidement et lever les obstacles».
Plus radicale, Nathalie Oberweis (déi Lénk) a revendiqué un pacte fixant à 30% la part de logements abordables dans les projets de 10 unités et plus. Seul moyen de faire redescendre la pression sur un marché de l'immobilier dont les prix continuent à flamber.
Pour les Pirates, Marc Goergen n'accepte pas, lui, le tour de passe-passe engagé avec les promoteurs. Tu me cèdes des logements, je te cède plus de capacités de construction. «Ce qu'ils doivent céder, ils le compenseront par des prix plus élevés sur les appartements restant à leur disposition.» Et d'accuser le gouvernement d'avoir, finalement, plié devant le lobby des promoteurs.
Enfin de son côté, l'ADR par la voix de Roy Reding, a fait un pas de côté. Estimant que la problématique du logement trouvait sa source dans la «croissance aveugle» du pays. «Nous faisons tourner la roue du hamster avec l'arrivée chaque année de plus de 10.000 nouveaux résidents», estime le parlementaire.
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