Le futur de la gestion des déchets préoccupe
Le futur de la gestion des déchets préoccupe
(pj avec Michèle GANTENBEIN) Les récentes inondations ont généré d'énormes quantités de débris divers. Du coup, les syndicats en charge du traitement des déchets ont fort à faire pour réceptionner ces centaines de tonnes de déchets inattendues. Ainsi, à la décharge de Muertendall gérée par le Sigre (non loin de Grevenmacher), 610 tonnes de déchets encombrants ont été livrées et stockées temporairement avant le weekend.
Mais au-delà de ce pic d'activité temporaire, le Sigre a peur pour son avenir. La raison en est la réforme prévue sur la prévention des déchets par la ministre de l'Environnement, Carole Dieschbourg (Déi Gréng). Les changements envisagés priveraient le syndicat de sa mission d'élimination des déchets ménagers de 71.500 habitants de l'est du pays. Cela causerait des problèmes financiers et des incertitudes sur le devenir du syndicat regroupant 22 communes, affirment ses responsables.
En cause à leurs yeux : le fait que la ministre aille au-delà des exigences de la directive-cadre européenne sur les déchets. Ce texte stipule qu'à partir de 2035, un maximum de 10% des déchets ménagers du Luxembourg pourront être déposés en décharge. Mais le gouvernement veut, lui, aller au-delà; et interdire ce type de dépôt dès 2030. Pour le Sigre, qui exploite la décharge de Muertendall, la mesure n'est pas applicable aussi rapidement.
Manque d'alternative
«Si la loi entre en vigueur telle quelle et que plus aucune ordure ne peut être déversée, nous ne pourrons plus assurer l'élimination des déchets pour nos collectivités», tranche Danielle Frères, ingénieur environnement au Sigre. L'ensemble des déchets ménagers devraient être incinérés à l'usine de Sidor, à Leudelange. Mais que faire des déchets quand l'incinérateur national sera à l'arrêt ?
«Le Sidor peut stocker temporairement des déchets, mais les capacités ne sont pas infinies», souligne Jérôme Laurent (LSAP), président du Sigre et bourgmestre de Mertert. Pour Serge Less, directeur du syndicat intercommunal, difficile d'imaginer qu'il n'y ait pas une «alternative» pour assurer le stockage des déchets des foyers.
Un autre point préoccupe les dirigeants du Sigre. Le syndicat vient en effet d'investir massivement dans l'extension et la réhabilitation de la décharge de Muertendall. Si les déchets ménagers cessent d'être une source de revenus, les finances du Sigre se trouvent menacées. Cela alors que la structure vient d'assurer une lourde dépense pour assurer une meilleure étanchéité du site (8,8 hectares sur un total de 11,10 ha).
Les seuls frais de fonctionnement de la décharge s'élèvent à 1,8 million d'euros par an. Et il a également fallu investir dans une station d'épuration (9,4 millions d'investissement, et 70.000€ de coût annuel); mettre 10 millions d'euros pour assurer une quatrième expansion (avec un subventionnement d'Etat) et le renouvellement de la torche de gaz faible coûtera 200.000 euros. Avec un volume de déchets accueillis de 22.500 tonnes par an, la décharge pourrait exploitée jusqu'en 2090. De quoi assumer l'amortissement sur 66 ans.
Mais si la loi, telle que présentée par Carole Dieschbourg, est appliquée, l'amortissement se fera sur une période raccourcie. Il faudra donc solliciter les finances des communes-membres. Nouvelle qui ne fait pas la joie des élus! Actuellement, chaque collectivité assume une charge de 23 euros par tonne de réserves.
En cas de fermeture anticipée de la décharge, la somme doublerait (47,54€/tonne de réserves) a calculé Serge Less, le directeur du Sigre. Ceci, à son tour, aurait un impact sur la taxe sur les déchets facturée aux municipalités.
Le Sigre a pu échanger sur la question avec la ministre de l'Environnement, en mai dernier. Discussion portant sur la manière de compenser le manque à gagner que laisse entrevoir un arrêt anticipé de la décharge. Carole Dieschbourg a notamment proposé que le site de Muertendall puisse stocker les déchets de construction, de l'amiante ou les scories de l'incinérateur du Sidor. Des éléments qui doivent actuellement être transportés à l'étranger.
Motion envoyée
Pas de quoi enthousiasmer les responsables du Sigre. «Déjà parce qu'actuellement, nous ne sommes pas responsables de ce type de déchets», déclare Serge Less. «Ensuite parce que nous aurons besoin de revenus réguliers. Nous ne pouvons pas compter sur le fait qu'un chantier de construction se mette en place quelque part et que les matériaux d'excavation nous soient rapportés.»
Aussi, le Sigre vient-il de rédiger une motion adressée à ses 22 communes-membres. Déjà 19 ont adopté ce texte qui réclame au gouvernement de mettre en œuvre la directive avec plus de mansuétude. Un message aussitôt renvoyé au Premier ministre Xavier Bettel (DP), aux ministres de l'Intérieur et de l'Environnement ainsi qu'au président de la Chambre.
Suivez-nous sur Facebook, Twitter et abonnez-vous à notre newsletter de 17h.
