Le détachement de salariés en plein boom au Luxembourg
Le détachement de salariés en plein boom au Luxembourg
C'est mathématique: qui dit reprise économique dit besoin de bras pour la supporter. Et quand les bras "locaux" ne suffisent pas, il faut avoir recours à de la main-d'oeuvre étrangère.
En 2017, l'Inspection du travail et des mines (ITM) a enregistré 43.254 déclarations de détachement, dont 70% proviennent d'Allemagne. C'est une hausse de 62,2% par rapport à 2016 et de 82,6% par rapport à 2015. La Pologne se glisse sur la troisième place des pays d'origine des déclarations avec 2.397 demandes (5,6% du total), ce qui représente une augmentation de près de 400%. Seule la Hongrie fait mieux avec une augmentation de 2.096% mais le volume est trop faible pour avoir du sens.
Le nombre d'entreprises qui détachent au Luxembourg est aussi en augmentation, de 31,39%. Sans beaucoup de surprise, le secteur de la construction (44,53%) est le principal moteur de ce phénomène avec autant de demandes que les deux secteurs suivant, l'industrie (23,1%) et le transport (14,4%).
Toujours selon le même mouvement, le nombre de salariés détachés augmente de 47,42% par rapport à l'an dernier à 119.893. Les trois quarts proviennent des pays frontaliers (68.373 d'Allemagne, 15.457 de Belgique et 5.647 de France). Mais les Polonais représentent le troisième contingent avec 13.558 salariés détachés en 2017 au Luxembourg.
Au début de l'année 2016, l'administration des douanes et accises et l'ITM ont renforcé leurs contrôles pour les rendre plus efficaces. L'an dernier, l'ITM a donc procédé à 1.689 contrôles, qui ont débouché sur 870 injonctions de mises en conformité. Les amendes infligées dans ce cadre se sont montées à 1,7 million d'euros, montant ramené à 737.000 euros en fin de procédure. 58% de ces contrôles concernaient des sociétés allemandes et les trois quarts le secteur de la construction.
Les accidents trop chers
En 2017, 384 accidents du travail, dont 7 mortels et 97 graves, ont été déclarés auprès de l'ITM. 53 ont été transmis au ministère public. Selon l'Association d'assurance accident, citée par le rapport, le nombre d'accidents au travail s'est stabilisé entre 26.000 et 27.000 depuis 2005. Le coût direct de ces accidents, à raison de 5.000 euros par accident et par salarié, atteindrait 135 millions d'euros chaque année.
Là encore, le secteur de la construction est le plus exposé avec 163 accidents, devant l'industrie (55) et le commerce (41).
Le détachement n'est que le quatrième sujet d'appel du Help Call Center derrière des questions de licenciement (5.043 cas et 14,52%), de salaire (4.298) et de congé (3.967). L'autre service, qui effectue des contrôles en entreprises, est principalement occupé par des questions de salaires (33% des cas), de congé (21,01%) et de durée du travail (15,37%).
Pénurie d'inspecteurs
L'Inspection du travail et des mines, longtemps une vingtaine de personnes, a atteint 117 personnes en 2016 et 144 en 2017, dont 48 inspecteurs. Pour défendre les travailleurs au Luxembourg selon les standards du Bureau international du travail, il en faudrait au minimum 51, soit un inspecteur pour 8.000 salariés.
Ils sont d'un intérêt vital pour le pays. Seulement «beaucoup de candidats ayant réussi leur examen-concours n'étaient soit pas vraiment intéressés de vouloir exercer le métier d'inspecteur du travail, étaient plus attirés par des avantages pécuniaires offerts par d'autres administrations ou avaient choisi d'être embauchés par d'autres administrations nécessitant moins d'efforts personnels en formation», dit le rapport annuel. Pire, l'ITM ne peut assurer la formation que de cinq à dix inspecteurs par an, ce qui ne suffit pas à compenser les départs à la retraite.
Or l'ITM voudrait atteindre 214 agents début 2025, ce qui impliquera forcément une nouvelle stratégie.
Le rapport conclut, comme les années précédentes, que la création d'une carrière d'inspecteur du travail spécifique, comme celle qui existe pour les agents de police, ainsi qu'une grille de traitement propre pourrait rendre ce métier plus attractif. Mais le rapport ajoute l'idée de créer un "bachelor" de trois ans.
