«Le covid-19 comme catalyseur de la contestation»
«Le covid-19 comme catalyseur de la contestation»
Alors que l'épidémie de covid-19 semblait sous contrôle à la sortie de l'état de crise, les 905 nouveaux cas positifs enregistrés au Luxembourg depuis le 26 juin font monter l'inquiétude. Une situation qui interroge sur les comportements adoptés par une partie de la population et qui pousse le gouvernement à durcir le ton.
Estimant que «ce phénomène de relâchement n'est pas spécifique au Luxembourg» pour l'avoir aussi observé récemment en Belgique et dans le sud de la France, le psychologue Hervé Hanon y voit en effet le contrecoup des contraintes imposées par le confinement. Dans le sillage de ce qu'il appelle «une sorte de passivité contraignante», le retour à une nouvelle normalité aurait permis à une frange de la population de se libérer «au point de s'affranchir des règles sanitaires».
Autrement dit, de pousser certains à refuser d'appliquer les mesures imposées par la loi rendant obligatoires les gestes barrières. Que ce soit le port obligatoire du masque dans les commerces et les transports publics ou le respect de la distanciation sociale. Cette soif d'un retour à la liberté s'exprimerait d'ailleurs «prioritairement au sein de la population estudiantine et des jeunes adultes actifs», à en croire François Bausch (Déi Gréng), ministre de la Sécurité intérieure.
Pour Hervé Hanon, les 18-34 ans «se sentent moins concernés, moins vulnérables», au vu de la moyenne d'âge des victimes du covid-19. En l'occurrence, 84 ans. Déjà évoqué dans une étude de l'Uni, ce sentiment de toute-puissance se mêle à celui «du défi à l'autorité», relève le thérapeute diplômé de l'université de Liège. Et en cette période inédite, le covid peut en effet agir chez certains comme «un catalyseur de cette contestation».
Pour le psychothérapeute, ces comportements transgressifs reflètent aussi des «réactions de défense». La situation de pandémie nous pousse en effet à «adopter un comportement de type paranoïaque»: chacun se méfie de l'autre, et d'un virus invisible potentiellement nocif. Et face à une «angoisse archaïque» de ce type, l'être humain «peut se montrer capable d'accomplir des choses extrêmes, juste parfois histoire de se tester».
Hervé Hanon n'omet pas non plus le fait que l'hypercommunication gouvernementale et l'énorme tapage médiatique autour du coronavirus ont pu brouiller les esprits. Au point parfois de provoquer un amalgame abusif entre la sortie de l'état de crise (le 24 juin, ndlr) et la fin supposée de la pandémie. «Nombreux sont ceux qui confondent et assimilent logique sanitaire et relance économique», affirme ainsi le psychologue, qui juge que «beaucoup de personnes ont pensé que le virus se trouvait en voie d'extinction. Dans leur tête, c'était bon».
Mais si certains ont profité des différentes phases du déconfinement progressif pour pouvoir se lâcher, d'autres au contraire le vivent beaucoup plus difficilement. C'est notamment «le cas des personnes âgées, qui éprouvent plus de mal à se déconfiner qu'à être confinées», explique le praticien. Car en général, «l'être humain déteste le changement et l'incertitude», et pour le coup, «on se trouve en plein dedans». Surtout que ce déconfinement s'accompagne d'une «certaine cacophonie au sein de la communauté scientifique», qui propose parfois des avis divergents. «Cela n'aide pas», note le psychologue.
Pour rappel, le covid-19 a causé à ce jour 111 décès au Luxembourg, tandis que 5.056 personnes ont été testées positives. Mais surtout les 757 nouveaux cas positifs enregistrés depuis le 1er juillet - soit plus de 90 pour 100.000 habitants, résidents et non-résidents compris - ont conduit l'institut allemand Robert-Koch à placer le Luxembourg dans la liste «des zones à risque».
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