Le blues des infirmières devient sujet d'étude
Le blues des infirmières devient sujet d'étude
Elles ont eu droit au bravo des politiciens, aux applaudissements des citoyens et une part de l'hommage national donné le 23 juin prochain leur reviendra aussi. Bien des honneurs symboliques pour une profession en première ligne : les infirmières. Mais, au fait, comment vont-elles? «Je crois que l'on peut dire que nous sommes doublement épuisées», commente Anne-Marie Hanff, présidente de l'ANIL (Association nationale des infirmières et infirmiers du Luxembourg).
En effet, la crise covid qui sévit depuis plus d'un an maintenant a usé les corps. Beaucoup d'heures effectuées, beaucoup de nouvelles contraintes fatigantes à force de répétition. Mais la profession se retrouve aussi fatiguée psychiquement. «Se retrouver 24 heures sur 24 exposée à un ennemi invisible comme ce virus; se retrouver confrontée au coma, à la mort plus que de coutume, a de quoi aussi sérieusement vous ébranler», témoigne celle qui a déjà pu recevoir le témoignage de certaines collègues atteintes au plus profond d'elles-mêmes. «Ce qui peut leur faire peur aujourd'hui, c'est la perte de l'empathie. Un défunt chasse l'autre, la situation de souffrance se banalise.»
Certes des cellules de soutien ont été mises en place dans les hôpitaux, mais le mal-être est plus profond. Au point que «beaucoup d'infirmières seraient maintenant prêtes à quitter la profession. On l'entend de plus en plus dans les couloirs de nos services.» Une impression pour le moment que viendra, peut-être, corroborer l'étude Lëtzcare. Une initiative prise par l'ANIL avec comme appui de l'Université de Luxembourg et du Pr Georges Steffgen.
Lui et son équipe spécialisée en sciences sociales vont ainsi prendre contact avec un maximum de personnels infirmiers. Hommes, femmes, résidents et frontaliers (deux tiers des effectifs) pour radiographier non seulement l'environnement de travail mais voir les causes qui pourraient pousser certains personnels à rendre leur blouse blanche pour changer de métier. «On connait déjà une pénurie forte de main-d'oeuvre, il ne faudrait pas en plus que la situation actuelle accentue encore le besoin en soignants», souffle Anne-Marie Hanff.
Le diagnostic sera posé
L'enquête, basée sur le volontariat, se déroulera en deux temps. Du 21 avril au 21 mai prochains d'abord, puis à l'automne. Deux sessions de sondage pour voir l'évolution de l'état d'esprit et des conditions d'exercice. «C'est une profession qui impose des connaissances, des gestes précis mais aussi un engagement individuel fort, et si celui-ci vient à manquer il est temps de lâcher», note la présidente dont l'association regroupe 800 infirmières.
Mais si l'examen de santé de la profession de santé s'impose, que faire de cette évaluation? «Nous avions déjà évoqué cette situation lors d'une précédente rencontre avec Xavier Bettel. Mais comme le Premier ministre et la ministre de la Santé n'ont rien fait, on a pris les devants. Mais il est évident que Lëtzcare devra les alerter sur ce métier précieux pour la santé de chacun et donc de tous».
S'il faut de nouveaux moyens, de nouvelles formations, des renforts dans les rangs : il appartiendra aux politiques de le décider. Mais au moins le diagnostic sera posé.
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