La ruée vers l'or des métiers de l'immobilier
La ruée vers l'or des métiers de l'immobilier
(pj avec Nadia Di Pillo) Chaque année, le ministère des Classes moyennes délivre près d'un millier de licences commerciales pour des particuliers se lançant dans la carrière d'agent immobilier. Mais parmi ce contingent bien peu de postulants appréhendent la réalité de cette profession. «En plus, beaucoup de grandes sociétés de courtage font de fausses promesses aux jeunes qui ne peuvent être tenues», alerte Jean-Paul Scheuren, président de la Chambre immobilière du Grand-Duché de Luxembourg (CIGDL).
En toile de fond de cette illusion : l'idée que beaucoup d'argent peut être gagné, facilement et rapidement, dans cette branche d'activité. Les biens sont rares et chers, la demande forte, les marges confortables : l'eldorado semble à portée de main avec 7.000 transactions conclues par an. «Mais la caisse ne sonne pas sans lever le petit doigt. Surtout au début, il faut investir beaucoup de temps et d'engagement, trouver et fidéliser les clients», témoigne Natacha Ombri, agent immobilier depuis deux ans dont une année en indépendante sur Dudelange.
De l'avis de Jean-Paul Scheuren, le boom immobilier a amené de nombreux intéressés sur le marché luxembourgeois. Mais il ne s'agit pas de faire un seul coup. Ceux qui n'ont pas de plan d'affaires, n'ont pas d'idée d'affaires ou n'ont pas de réseau de clients, ne parviennent pas à joindre les deux bouts».
Le ton du président du CIGDL se fait même plus dur encore: «Certaines personnes ouvrent une agence uniquement parce qu'elles ont hérité de la maison de leur tante et espèrent faire des bénéfices. Ce n'est pas la bonne attitude. Il faut se demander si l'on veut vraiment en faire une carrière et en comprendre les modalités.»
D'autant que le marché national s'avère particulièrement féroce. Chaque année, entre 100 et 150 agences disparaissent du paysage, «et autant viennent s'y ajouter». A ce jour, le Luxembourg compte de 550 à 680 acteurs dans le business du courtage immobilier.
Deux formations spécifiques ont été mises en place depuis quelques années dans le pays. L'une auprès de la Chambre de Commerce, l'autre au lycée Josy Barthel de Mamer. Depuis 2017, l'établissement propose un cursus sur deux ans menant à un BTS (brevet de technicien supérieur) «profession immobilière». De quoi assurer un meilleur professionnalisme des personnes tentées par le métier. Autrement dit de parer à l'arrivée massive de «brebis galeuses» seulement attirées par l'appât du gain.
En effet, les agents effectuant des transactions douteuses discréditent rapidement l'ensemble de la profession. Il y a dix ans, la Chambre immobilière a donc élaboré un code d'éthique pour lutter contre toute dérive. «Le message est clair : toute personne à la recherche d'un courtier digne de confiance devrait communiquer avec les membres de la Chambre immobilière ; les adresses se trouvent sur notre site web», note Jean-Paul Scheuren.
Personne ne trouvera un pot d'or au bout d'un arc-en-ciel
La CIGDL compte environ 250 membres, dont 20 à 30 nouveaux membres chaque année. «Nous devons couvrir déjà 70 à 80% du marché de l'immobilier», estime son président. Et pour que le business de l'habitat se déroule clairement, l'organisme a fixé des règles. Règles que d'aucuns essayent de contourner pour espérer remporter des marchés. L'entorse la plus fréquente étant le renoncement à une part de la commission (généralement établie à 3% du tarif demandé) et attribuée au commercial.
Mais Jean-Paul Scheuren remet vite les pieds sur terre à ceux qui rêveraient de faire fortune en s'accommodant des principes de base du métier : «Personne ne trouvera un pot d'or au bout d'un arc-en-ciel. C'est la même chose dans l'immobilier : seuls ceux qui travaillent dur sur eux-mêmes et pour leurs clients réussissent».
