La réforme fiscale dévoilée: Moins d'impôts pour les bas salaires et la classe moyenne
La réforme fiscale dévoilée: Moins d'impôts pour les bas salaires et la classe moyenne
Par Maurice Fick
Mesure politique phare du gouvernement Bettel, la réforme fiscale visant davantage d'équité sociale a été dévoilée ce lundi au château de Senningen. Elle favorise ceux qui gagnent moins, vivent seul avec des enfants à charge, ceux qui débutent leur vie professionnelle, la classe moyenne mais aussi la compétitivité des entreprises. Le point sur les nouvelles mesures qui représentent «entre 400 et 500 millions d'euros» de moins-value pour les caisses de l'Etat par an.
«C'est une réforme juste socialement, une réforme pour les gens, les familles, les enfants et les gens qui travaillent ici», a balayé large, le Premier ministre Xavier Bettel, avant d'en résumer «le grand principe: les gens avec moins de revenu, paieront moins» d'impôts. L'effet recherché de cette vaste réforme est de «renforcer le pouvoir d'achat des ménages et la compétitivité des entreprises» dès 2017.
Ceci dans un contexte particulièrement favorable à mi-législature, de réduction de la dette de l'Etat -«nous sommes autour de 23%, en ligne avec nos promesses», glisse Pierre Gramegna, ministre des Finances- et de reprise économique notable car «nous avons généré un taux de croissance de plus de 5%», surligne Etienne Schneider, ministre de l'Economie. Comme déjà annoncé, «l'impôt d'équilibrage temporaire de 0,5% sera supprimé en 2017 et aucun autre impôt ne s'y rajoutera», promet Pierre Gramegna.
Nouvelles mesures et crédits d'impôts
Le ministre des Finances a dévoilé le nouveau barème d'imposition 2017 dans lequel le pourcentage d'imposition des revenus annuels les plus bas (entre 11.265 euros et 20.625 euros) «ne grimpera plus que de 1% au lieu de 2% jusqu'ici». La charge d'imposition de 39% pour une personne seule sera dorénavant atteinte à partir de 45.897 euros au lieu de 41.493 euros aujourd'hui. Deux nouvelles tranches d'imposition sont créées (classe 1) pour les revenus entre 150.000 et 200.004 euros (41%) et ceux qui dépassent les 200.004 euros (42%).
Une «grande innovation» concerne le crédit d'impôt pour salariés ne sera plus unilatéralement appliqué à tous les revenus mais sera doublé pour les plus bas revenus (de 11.265 euros à 40.000 euros) et passera de 300 euros à 600 euros. Au-delà d'un salaire annuel de 40.000 euros, le crédit d'impôt diminuera progressivement. Il n'y aura plus de crédit d'impôt pour celui qui touchera plus de 80.000 euros par an (classe 1).
Le crédit d'impôt monoparental de 750 euros sera doublé et passera donc à 1.500 euros par an. Mais «à partir de 35.000 euros/an, ce crédit d'impôt redescend à 750 euros», explique Pierre Gramegna. Pour les monoparentaux bénéficiant du salaire social minimum le crédit d'impôt passera de 1.050 euros à 2.100 euros.
Les couples imposés mutuellement vont devoir s'intéresser à l'individualisation optionnelle de leur imposition. A partir du 1er janvier 2018, les résidents tout comme les frontaliers, pourront décider d'être imposés individuellement même s'ils sont mariés ou pacsés. L'intérêt de la mesure ne sera quantifiable pour chacun que «dans plusieurs semaines» au ministère des Finances, a expliqué Xavier Bettel.
Nouveaux abattements fiscaux
A compter de l'année fiscale 2017, les moins de 40 ans bénéficieront d'un abattement fiscal de 3.200 euros par an pour qui paiera dans une caisse de retraite complémentaire. «C'est un encouragement pour les jeunes pour pouvoir préparer leur retraite plus tôt», explique Pierre Gramegna.
L'abattement fiscal pour l'assurance prévoyance-vieillesse ne sera dorénavant plus progressif mais passera à 3.200 euros indépendamment de l'âge du cotisant.
A travers cette réforme fiscale, le gouvernement Bettel veut faciliter l'accès au logement -l'une des grandes problématiques au Luxembourg- par diverses mesures concernant:
- L'épargne logement: les moins de 40 ans qui mettent de côté pour acheter ou construire leur futur logement pourront dès 2017 déduire 1.344 euros (par personne) de leurs impôts, au lieu de 672 euros jusqu'ici.
- L'imposition de la plus-value immobilière: A compter de ce 1er juillet 2016 et jusqu'au 31 décembre 2017, une plus-value immobilière sera imposée au 1/4 du taux sur la vente d'un bien (et non plus au 1/2 du taux). Ainsi «nous espérons que davantage de terrains et de logements arriveront sur le marché», glisse Pierre Gramegna.
- La location sociale: les loyers perçus en louant des immeubles à des organismes immobiliers sociaux agréés seront exonérés de 50%.
- La valeur locative du domicile propre sera supprimée.
Voiture électrique, de fonction et e-velo
Autre innovation, le gouvernement Bettel veut également favoriser les transports durables. Il introduit un nouvel abattement fiscal de 5.000 euros pour les véhicules électriques ou à hydrogène. Et un abattement fiscal de 300 euros pour les vélos à assistance électrique.
«Nous apportons également un critère de propreté pour les voitures de fonction», résume Pierre Gramegna. La réforme fiscale prévoit que l'avantage en nature forfaitaire pour les voitures de fonction -il est actuellement de 1,5% de la valeur du véhicule neuf, TVA comprise- soit dorénavant plus favorable aux véhicules qui polluent moins et qui roulent à l'essence.
Les PME ne sont pas en reste
«Le Luxembourg veut rester compétitif» a répété le ministre des Finances avant d'expliquer que la réforme fera progressivement baisser la charge fiscale des PME. Le fameux IRC (Impôt sur le revenu des collectivités) baissera de 2% en 2017. Il est actuellement de 21%. Et encore d'1% supplémentaire pour passer à 18% en 2018.
«Pour renforcer l'entrepreunariat au Luxembourg et surtout les startups», la réforme baissera le taux de l'IRC de 20% à 15% pour les PME dont le revenu imposable sera inférieur à 25.000 euros en 2017.
La réforme va également vers une défiscalisation de la transmission des entreprises familiales. «Nous créerons les conditions pour que la transmission soit plus simple. Le grand problème étant les immeubles et terrains qui appartiennent à l'entreprise. La plus-value ne sera pas imposable aussi longtemps que l'entreprise continuera d'exister», résume Pierre Gramegna.
Intensification de la lutte contre la fraude fiscale
Les quatre ministres présents à Senningen l'ont souligné. Après avoir laissé le temps aux contribuables fraudeurs de régulariser leur situation depuis l'entrée en vigueur de l'échange automatique d'informations, l'étau va se resserrer. «La justice fiscale est une chose logique et il est temps qu'elle soit respectée», pose le Premier ministre.
«Dans les prochaines semaines et mois», promet Felix Braz, le Luxembourg va se donner davantage de moyens pour lutter contre la fraude fiscale. Le ministre de la Justice parle de «produire des éléments législatifs» et «pour les poursuites légales, d'embaucher les bonnes personnes au sein de la police judiciaire et de la magistrature.»
A noter que l'impôt à la source payable sur les intérêts va passer de 10 à 20% au Luxembourg en 2017.
La «version finale» de cette réforme fiscale d'ampleur qui est en cours de discussion avec les partenaires sociaux -une rencontre a encore eu lieu dimanche soir entre gouvernement et partenaires sociaux à Senningen- Xavier Bettel la présentera le mardi 26 avril 2016 lors de son discours sur l'état de la Nation.
L'intégralité des nouvelles mesures peuvent être consultées sur le site dédié à la réforme fiscale 2017.
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