La Place luxembourgeoise se transforme
La Place luxembourgeoise se transforme
(ASdN avec Marco Meng) - Si la fermeture annoncée de la Commerzbank Luxembourg peut paraître anecdotique, l'information reflète en réalité une tendance bien plus globale. Ces dernières années, de plus en plus de banques allemandes baissent en effet le rideau. Si elles étaient encore 59 en 2001 au Grand-Duché, elles ne seront bientôt plus que 21. Soit un chiffre divisé par trois en l'espace de 20 ans.
Dans le même temps, d'autres banques ont fait leur apparition sur la Place. Au cours de ces dernières décennies, les filiales de banques chinoises sont ainsi passées de quatre à quatorze. L'annonce du Brexit a par ailleurs fait réagir les banques qui ont déplacé des divisions du Royaume-Uni au Grand-Duché.
Mais l'évolution du paysage bancaire luxembourgeois s'explique également par le début d'une nouvelle ère. Depuis 2015, la fin du secret bancaire et le début de l'échange de données bancaires ont en effet changé la donne. Peu à peu, certains établissements ont ainsi quitté le pays, à l'image des succursales de Landesbanken. D'autres ont dû s'acquitter d'une amende de plusieurs millions d'euros, à l'image de la Commerzbank Luxembourg ou la Spuerkeess qui a dû verser quelque 14 millions d'euros aux autorités allemandes en 2016.
L'atout de l'internationalisation
Les points forts de la Place n'étant plus d'actualité, le Luxembourg doit donc désormais se différencier autrement. Notamment par «son orientation et son expertise transfrontalières», estime Judith Gledhill, porte-parole de l'association bancaire ABBL auprès de nos confrères du Luxemburger Wort. Selon l'association bancaire, l'internationalisation est une caractéristique avec laquelle le site luxembourgeois peut en effet se démarquer, raison pour laquelle les grandes institutions financières chinoises ont installé leurs hubs européens à Luxembourg.
En outre, le Luxembourg dispose d'un «large écosystème financier», souligne par ailleurs l'ABBL. Et si cela concerne en premier lieu les sociétés de fonds et autres services financiers, c'est aussi le cas des cabinets d'avocats luxembourgeois à vocation internationale, souligne la porte-parole de l'association.
La taille compte
A en croire la CSSF, gendarme du secteur financier, la situation des banques dites traditionnelles reste néanmoins «sous pression». Le secteur du crédit n'est en effet plus une valeur sûre pour les établissements bancaires. Pour autant, malgré des taux d'intérêt bas, les institutions peuvent profiter d'une demande de prêts qui ne faiblit pas.
Si les dépôts bancaires sont également en hausse - 88 % en provenance du Luxembourg - ceux-ci sont néanmoins parfois coûteux. En cause, les intérêts de pénalité sur l'argent «excédentaire» que les banques doivent déposer auprès de la BCE. Pour l'ABBL, il est donc difficile de rester rentable. La taille de la structure a donc son importance pour de telles opérations.
Face à la hausse des coûts, la CSSF considère donc la numérisation comme fondamentale pour l'avenir du secteur financier luxembourgeois, tout comme la question de la durabilité. «Le Green Deal ne peut être réalisé sans une finance durable», juge-t-elle. Or, une économie fondée sur la durabilité sera plus résistante, «et une économie durable va de pair avec une finance durable»
Mais une chose est sûre, la Place ne sortira pas indemne de la pandémie. Le virus a en effet causé des perturbations importantes, mettant la pression sur les banques «pour qu'elles fournissent des fonds et fassent partie de la solution», souligne Roxane Haas, responsable du secteur bancaire chez PwC Luxembourg. Pour autant, ces perturbations pourraient «certainement accélérer la transformation des banques».
Pour rappel, depuis les années 1990, environ un quart de la valeur ajoutée brute du Luxembourg provient du secteur financier. En 2019, les banques ont ainsi déclaré un bénéfice combiné de 5,7 milliards d'euros. A ce jour, le secteur emploie près de 26.000 personnes.
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