La petite graine bio tarde à germer
La petite graine bio tarde à germer
Le Grand-Duché ne manque pas d'ambition pour assainir ses cultures. Après avoir banni le glyphosate des champs, le gouvernement souhaite consacrer 20% de ses parcelles à l'agriculture biologique d'ici 2025, et même 100% à l'horizon 2050. Mais le chemin à parcourir s'annonce encore long. A ce jour, à peine 5% des parcelles agricoles luxembourgeoises sont en effet converties au bio.
Aussi, pour inciter plus d'agriculteurs à franchir le pas, le gouvernement n'hésite pas à mettre la main à la poche. En 2017, le Premier ministre Xavier Bettel (DP) avait ainsi annoncé des primes étatiques - de 270 à 1.350 euros par hectare et par an - pour les paysans qui décideraient de convertir une partie de leur exploitation au bio. Seulement, en trois ans, seuls un agriculteur et un vigneron ont sollicité cette aide.
Un faible engouement que le ministre de l'agriculture Romain Schneider (LSAP) justifie par les difficultés techniques inhérentes. «En pratique, il est plus facile de gérer une conversion totale que partielle», souligne-t-il. Et pour cause: les conditions de production du biologique sont très strictes et peu compatibles avec les méthodes dites traditionnelles. En outre, l'agriculture biologique bannit l'usage de pesticides. Les paysans qui font le choix de combiner les deux techniques n'ont donc logiquement pas le droit de mélanger les cultures au risque de se voir interdire de les vendre sous l'étiquette «bio».
Ceux qui sautent le pas du 100% bio sont donc (un peu) plus nombreux. En trois ans, «28 paysans ont opté pour une conversion totale», précise Cathy Giorgetti, porte-parole du ministère de l'Agriculture. Au total, le Luxembourg compte donc à ce jour 149 exploitations biologiques ou en phase de conversion.
Mais pour Ekkehart Schmidt, porte-parole de l'association Etika, la transition se trouve freinée par les réticences de nombreux autres agriculteurs. «Beaucoup de cultivateurs souhaitent se convertir, mais il y a des blocages psychologiques, des incertitudes et de potentielles pertes de revenus», regrette-t-il. Encore plus pesantes sont les contraintes concernant l'octroi de la certification bio : «Il faut payer des frais de contrôle, le travail administratif est complexe pour à la fin, peut-être, ne pas gagner plus», résume Ekkehart Schmidt.
Des barrières qui justifient la nécessité d'un plan d'action plus large. «Il faut que l'ouverture des marchés, l'éducation et la sensibilisation des consommateurs soient également au centre de nos préoccupations», milite ainsi Daniela Noesen, directrice de l'asbl Vereenegung fir Biolandwirtschaft Lëtzebuerg. A ce jour, les ménages luxembourgeois consacrent en moyenne 12% de leurs dépenses alimentaires aux produits bio.
Le gouvernement, lui, prend sa part de responsabilité. Quatre projets-pilotes seront ainsi mis en place cette année afin notamment de promouvoir la filière bio luxembourgeoise et «voir si on peut relever le défi», souligne le ministre de l'Agriculture. Ces derniers consisteront ainsi à introduire, dans des cantines, des produits provenant de «3/5e de la production régionale et 2/5e de l'agriculture biologique».
Car si les chiffres sont encore loin des ambitions affichées par le gouvernement à l'horizon 2025, l'essentiel, souligne Romain Schneider, reste de «montrer qu'on va dans la bonne direction».
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