La mobilité connectée, cette «nouvelle carte à jouer»
La mobilité connectée, cette «nouvelle carte à jouer»
Le 3 juin dernier, le Luxembourg s’est engagé au sein du projet «Data for road safety» qui regroupe plusieurs pays européens, des constructeurs automobiles et des fournisseurs de services. En quoi consiste concrètement ce projet ?
Jean Schiltz, attaché à la smart mobility au ministère de l'Économie: «Il s’agit d’améliorer la sécurité des usagers de la route en mettant à disposition des usagers de la route toutes les informations relatives à la sécurité. Autrement dit, les indications relatives aux accidents, aux voitures en contresens, aux chantiers ou aux chaussées glissantes pour que tous soient informés de ce qui les attend sur leur trajet via l’instauration d’un système de partage en direct de données pour le bien public et la prévention d’accident. Pour ce faire, l’Espagne, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Finlande et le Luxembourg mais aussi le groupe BMW, Ford Europe, Daimler et Volvo ainsi que Tom Tom et Here Europe se sont associés pour mettre à disposition les données, sous réserve de ne pas les réutiliser à des fins commerciales. »
À ce jour, seuls quelques pays se sont engagés dans ce projet qui vise, à terme, à mettre en place un système unique au niveau européen...
Jean Schiltz : «Effectivement. Même si tous les pays, tous les constructeurs et tous les fournisseurs de services ne participent pas encore, l’idée principale tient dans la mise en place d'un système qui fonctionnera quelle que soit la marque du véhicule utilisé ou le pays fréquenté. Maintenant qu’une telle initiative a été officiellement lancée, nous espérons attirer d’autres acteurs clés pour bénéficier d’un cercle le plus large possible qui servirait alors de base pour la Commission européenne pour démontrer la faisabilité à l’échelle européenne d’un tel dispositif. »
Quelle plus-value peut tirer le Grand-Duché d’un tel projet ?
Jean Schiltz : «Ce projet s’intègre dans la stratégie d’innovation axée sur les données et qui intègre différents thèmes, dont celui de la mobilité intelligente. Le Luxembourg entend donc se placer comme acteur clé de l’économie des données, dans une logique de poursuite de la diversification économique. Plus concrètement, cela signifie que ce projet s’ajoute à ce qui a d’ores et déjà été lancé, comme le projet de conduite connectée transfrontalière et que cela va permettre non seulement d’accroître le niveau de savoir-faire de certains acteurs du secteur automobile et de la mobilité présents au Luxembourg. »
À qui faites-vous référence ? Au List, au Liser, à l’Uni ? À des acteurs privés comme Delphi, IEE ou GoodYear ?
Jean Schiltz : «Ça peut être des acteurs de la recherche, comme ça peut être des acteurs de l’industrie ou du secteur privé. L’idée étant avant tout de mettre en application dans les faits les principes contenus dans la directive STI (directive sur les systèmes de transports intelligents, ndlr) via une coopération entre les pays signataires, les acteurs de l’industrie automobile et les fournisseurs de service partenaires. L’enjeu étant la mise en place d’un écosystème très complexe et l’établissement de règles claires pour permettre l’échange des flux de données. »
Christian Tock, directeur des technologies durables au ministère de l'Économie : « Il est clair que le Luxembourg, seul, ne pourra pas développer toutes les compétences nécessaires pour mener à bien un projet d’une telle envergure. Et donc que ce projet, comme les autres projets d’importance, nécessite de bénéficier de réseaux qui pourraient venir enrichir l’écosystème déjà en place au Grand-Duché. »
Avec comme objectif clairement affiché d’obtenir une plus grande visibilité au niveau international...
Christian Tock: «Clairement. Si l’infrastructure physique comme le futur HPC de Bissen, les data centers ou notre réseau ICT constitue un aspect important de ce projet, l’intérêt repose avant tout dans la capacité à ramener au Luxembourg des connaissances et un savoir-faire mais surtout de les développer. Le domaine de la mobilité étant actuellement en pleine transformation, passant d’un modèle où chacun possédait son véhicule vers un modèle basé sur les services – et donc de données -, il y a clairement une carte à jouer pour que le Luxembourg fasse son entrée sur le marché. Sans compter le fait que ce secteur sera l’un des grands fournisseurs de données, sinon le principal, il est cohérent que nous nous penchions sur ce sujet, dans une logique de capitalisation des investissements ICT qui ont été réalisés au cours des 20 dernières années. »
Comment comptez-vous tirer votre épingle du jeu dans un contexte de compétition européenne dans ce secteur d’avenir, la donnée étant considérée comme le nouvel or noir ?
Christian Tock : «Outre la neutralité reconnue du pays, liée à la taille de son écosystème, le Luxembourg peut tirer profit de la complexité toujours plus grande du monde dans lequel nous évoluons. Car cette complexité nécessite d’impliquer un nombre toujours plus grand d’acteurs, qu’ils soient publics ou privés. Par le passé, pour tester une voiture, il n’était nullement nécessaire d’impliquer les P&T car les deux secteurs n’étaient pas liés. Ce qui n’est plus le cas désormais. Dans ce contexte, un petit environnement bien intégré, agile et rapide peut nous démarquer au détriment de pays de taille plus importante et dont les acteurs n’agissent peut-être pas toujours au même rythme. »
Ce projet-pilote doit donc servir de vitrine technologique pour attirer d’autres activités, voire de nouveaux acteurs...
Christian Tock: «Nous espérons effectivement pouvoir démontrer ce que nous savons faire pour soit voir émerger des spin-offs, soit faire venir des activités spécifiques de certains acteurs internationaux qui constateraient que le Luxembourg constitue un endroit idéal pour créer des entités proposant de nouveaux services à forte valeur ajoutée. »
Suivez-nous sur Facebook, Twitter et abonnez-vous à notre newsletter de 17h.
