L'Uni travaille sur un ciment plus vertueux
L'Uni travaille sur un ciment plus vertueux
Question environnement, le secteur de la construction mérite toujours un carton rouge. A elle seule, cette activité consomme chaque année la moitié des ressources naturelles prélevées; engendre plus de 50% des déchets produits à l'échelle de la planète et participe pour près d'un tiers du total des émissions de CO2 dans l'atmosphère. «Dans ce contexte, réfléchir à un mode de production de ciment plus vertueux participerait à améliorer considérablement les choses. Car c'est bien ce matériau qui est à l'origine de toute cette série de reproches», souligne Danièle Waldmann.
Et la professeure en ingénierie à l'Université de Luxembourg a bon espoir d'apporter sa pierre à ce progrès. L'ingénieure en structure et ses équipes de chercheurs sont ainsi impliquées dans une multitude de projets visant à apporter un peu plus de vert dans des techniques du bâtiment souvent bien grises.
Cela passe aussi bien par l'intégration des fibres végétales de miscanthus pour réaliser du béton; par l'étude de nouveaux modes de conception pour assurer le recyclage des matériaux de construction au terme du cycle de vie du bâti ou encore étudier des reliefs de façade permettant d'assurer le rafraîchissement d'une tour sans faire usage de climatisation.
Quatre universités et 14 industriels
Pour le ciment, une des idées testées tient dans le remplacement d'un ingrédient essentiel : le clinker. A la place, Danièle Waldmann mesure l'efficacité d'un possible ajout de boues issues des installations de lavage des carrières.«Pour l'instant, ce substitut donne des résultats intéressants. Il faut poursuivre les études», souffle la scientifique.
Car veiller à améliorer le bilan carbone du ciment sans en maintenir les qualités physiques ne servirait à rien. «Pour convaincre l'industrie, il faut effectivement trouver la façon de moins consommer de sable et de gravier (qui commencent à s'épuiser), de moins faire monter en température les fours qui donnent la poudre de ciment, mais surtout assurer la même facilité d'emploi du matériau pour assurer la construction massive et sans risque.» Voilà l'équation à résoudre dans les laboratoires de Belval.
Mais l'Uni n'est pas la seule à cogiter autour de ce projet baptisé CO2 Redres. Les universités de Lorraine, de Liège (Belgique) et de Trèves (Allemagne) sont également intéressées par ces recherches. Travaux sur lesquels veillent également 14 partenaires industriels privés. Comme Folschette-Carrières Feidt, Cimalux ou Contern Luxembourg Beton, par exemple.
«Forcément qu'ils sont intéressés, sourit la Dr Waldmann. Déjà parce qu'il y a un intérêt financier à ce que ces acteurs de la construction diminuent leur impact environnemental (moins de taxes à payer), mais aussi parce que diminuer le coût de production du m3 de ciment alors que les chantiers en réclament des volumes astronomiques peut engendrer une meilleure marge.»
Evaluer d'autres pistes
Pour l'heure, l'introduction des boues (cuites ou calcinées) reste au stade expérimental. Leur transport et leur assèchement coûtant encore un peu cher pour une solution envisageable dans le process. «Mais l'on voit déjà qu'elles n'ont besoin que de 750 à 900°C pour être déshydratées et exploitables, contre une cuisson à 1.450° pour fabriquer le clinker traditionnellement utilisé. Cela signifie moins d'énergie à fournir, un meilleur bilan carbone et une facture plus légère.»
Et si cette solution ne fonctionne pas, l'équipe du département ''Solid Structures'' dirigé par Danièle Waldmann évaluera d'autres pistes. Pourquoi ainsi ne pas réinjecter des morceaux de béton non utilisés (ou issus de chantiers de démolition) dans la composition du précieux liant hydraulique? Un usage bis, écologiquement bienvenu, et bien plus rentable sans doute que la mise au rebut sur des décharges pour déchets inertes.
«Il faudra de toute façon passer par ces agrégats recyclés car parmi les ingrédients du ciment, beaucoup ne sont pas renouvelables par la nature seule», rappelle la chercheuse. Sans oublier le respect des nouvelles exigences environnementales européennes ou nationales.
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