«Favoriser ceux qui produisent de l'électricité verte»
«Favoriser ceux qui produisent de l'électricité verte»
Fin mai, François Bausch (Déi Gréng) a évoqué la possibilité pour les ménages qui produisent déjà de l'énergie photovoltaïque d'utiliser cette production pour leur propre consommation. Quelle est l'idée derrière ce concept?
Claude Turmes (Déi Gréng), ministre de l'Energie - «Le gouvernement entend favoriser ceux qui produisent de l'électricité verte et qui exploitent l'énergie produite dans leur propre bâtiment. Ceci n'est pas contradictoire avec le fait de pouvoir aussi basculer cette production sur le réseau national, cela correspond plutôt à une évolution dans notre approche. Les outils informatiques déjà à notre disposition associés à un coût de moins en moins élevé des batteries font que nous allons vers un monde où la gestion énergétique décentralisée sera la norme.
Comment cette idée va-t-elle se concrétiser, que ce soit pour les ménages ou pour les entreprises?
«Nous sommes en train de finaliser la révision de la loi électricité existante pour changer la taxation sur la consommation énergétique. Les personnes qui produiront et consommeront leur propre électricité bénéficieront d'un avantage économique du fait de l'exonération de certaines taxes ou redevances. Au final, ce sera plus rentable de consommer sa propre électricité que de l'injecter dans le réseau comme c'est le cas actuellement. Cette loi prévoit aussi de faciliter la mise en place des outils informatiques nécessaires à la gestion de cette électricité verte, que ce soit dans des maisons individuelles ou dans des résidences.
Mais aussi dans ce qu'on appelle "une communauté d'énergie renouvelable", à savoir la possibilité pour plusieurs ménages par exemple d'utiliser l'énergie produite sur l'un des toits du quartier. Ce concept prévoit que même les résidents qui ne possèdent pas de panneaux photovoltaïques, car ils habitent dans un bâtiment dont le propriétaire ne souhaite pas en installer, puissent en bénéficier. Cette loi remaniée, inspirée de ce qui existe en Californie, devrait être adoptée avant l'été, une fois le dernier avis du Conseil d'Etat rendu.
Comment fonctionnera concrètement cette communauté d'énergie renouvelable?
«Nous l'avons définie comme un ensemble de résidents qui se situent à proximité du dernier transformateur à basse tension, ce qui signifie que seules des personnes habitant dans un même rayon d'action pourront intégrer cette communauté. Car l'autre idée de l'autoconsommation, c'est d'arriver à une optimisation des flux d'électricité dans le réseau. Ce qui signifie produire et consommer soit directement sur place, soit à proximité immédiate via le réseau basse tension.
Si des exonérations fiscales sont prévues pour les producteurs d'électricité verte, en serait-il de même pour ceux qui souhaiteraient s'équiper à l'avenir?
«C'est quelque chose que nous sommes en train de discuter. Aujourd'hui, nous sommes dans un système de prix garanti pour l'électricité injectée dans le réseau, mais il se peut que dans une prochaine étape nous donnions une subvention directe pour les investissements dans l'achat de panneaux solaires. Mais dans ce cas de figure, je ne donnerai plus de prix garanti réduit. Nous allons d'abord observer ce que cette loi va déclencher comme investissement, notamment du côté des entreprises, avant de faire d'éventuels réajustements un ou deux ans plus tard.
Pour rendre ce concept tangible, la question des batteries apparaît comme centrale. Quelle(s) solution(s) préconisez-vous?
«Nous avons des échanges avec des experts sur cet aspect, car différentes réponses existent. A Mannheim, en Allemagne, par exemple, les batteries sont regroupées pour un seul et même quartier et les capacités de ces batteries sont virtuellement mises à disposition des habitants qui sont équipés en panneaux photovoltaïques. Il se peut que cette solution soit plus économe, en ce qui concerne le matériel car je ne sais pas si c'est réellement une bonne idée d'avoir une batterie dans chaque cave.
Quel est le gain estimé de ces mesures pour la réduction des émissions de CO2?
«Chaque panneau solaire installé en Europe diminue la nécessité du recours aux centrales à charbon et revêt donc un rôle très important pour combattre le changement climatique. Pour le Luxembourg, il est très difficile d'avancer des chiffres sur les réductions réellement effectuées, car cela dépendra du nombre de nouveaux panneaux qui seront installés.
Lors de sa présentation, François Bausch a parlé de «road box». Ce qui sous-entend que le concept doit aussi être lié à l'électromobilité. Or, pour le moment, il n'en est pas question...
«Solaire et mobilité vont de pair. Car ceux qui iront encore au bureau en voiture le feront en électrique et les bâtiments des entreprises seront équipés de panneaux photovoltaïques.
La future réforme fiscale doit favoriser les véhicules électriques, notamment pour les flottes de leasing. Ce qui n'est pas du goût des professionnels du secteur qui n'ont pas vraiment apprécié votre annonce...
«J'ai simplement dit ce que le gouvernement pense et écrit dans le Plan national Energie Climat, à savoir que la réforme mettra le leasing au centre de l'électromobilité. Pourquoi est-ce que l'Etat donnerait des subventions pour des voitures fonctionnant aux énergies fossiles? Le gouvernement n'interdit pas aux entreprises d'acheter ce type de véhicule, chacun sa responsabilité. Mais il est de notre responsabilité, en tant que gouvernement qui a ratifié les accords de Paris, de ne pas utiliser l'argent du contribuable pour subventionner quelque chose qui va à l'encontre du climat. Ce que je trouve absurde.»
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