Ce n'est pas la place qui manque pour bâtir
Ce n'est pas la place qui manque pour bâtir
La question d'un accès à un logement abordable demeure la préoccupation centrale des Luxembourgeois. A nouveau, dans le dernier sondage Politmolitor, 82% des électeurs en ont fait leur demande première. Et si la volonté politique est là, si les grues se multiplient dans le paysage, la construction de nouvelles unités d'habitation ne suit pas la demande. Le frein principal reste la libération des terrains. Pourtant, estime le ministre de l'Aménagement du territoire, la réserve foncière actuellement disponible permettrait d'assurer du logement pour... 300.000 habitants.
Claude Turmes (Déi Greng) vient ainsi de faire un état des lieux particulièrement révélateur à la fois des surfaces accessibles pour du résidentiel et des propriétaires de ces quelque 3.750 hectares recensés qui, a priori, pourraient être cédés pour des opérations immobilières. Et encore, il ne s'agit là que d'une estimation faite sur 89 communes du Grand-Duché, il faudrait encore ajouter quelques superficies libres sur les 13 localités manquant à l'étude. Mais voilà déjà de quoi espérer pouvoir bâtir de l'ordre de 142.000 logements ou maisons.
Sauf que chaque cm2 de ce pays est un trésor qui rapporte bien plus en le conservant qu'en le cédant. Ainsi, à analyser le foncier résidentiel, l'Observatoire de l'habitat note que ses prix ont été multipliés par 2,1 en dix ans. Et c'est principalement cette augmentation qui explique la flambée des tarifs de l'immobilier. En effet, sur la même période le tarif d'un logement neuf n'a été multiplié ''que'' par 1,7, contre 1,2 pour le coût de la construction.
Ces «grandes capacités de développement de logements» (diversement répartis sur le territoire), le gouvernement entend en faciliter la libération pour des projets de construction. Le Premier ministre en a fait un des axes de son dernier discours sur l'état de la Nation, le gouvernement une priorité, et des mesures comme le remembrement, le nouveau Pacte Logement 2.0 ou la réforme annoncée de l'impôt foncier devraient contribuer à accélérer le mouvement.
Car maintenant la pression est mise tous azimuts. Sur les communes pour qu'elles prennent conscience qu'elles peuvent agir, elles aussi, pour diminuer les tensions sur un marché immobilier saturé. Mais Claude Turmes et l'ensemble de la classe politique vont surtout devoir convaincre les 746 sociétés privées et les quelque 2.400 propriétaires individuels qui retiennent à eux seuls 84% des terrains potentiellement accessibles pour la construction de logis. C'est là que le match se gagnera ou se perdra.
Utopiquement, et il le sait, Claude Turmes peut l'affirmer : «si la construction de tous ces logements potentiels était effectivement démarrée dans les cinq prochaines années, cela mènerait à un quasi-doublement des logements produits par année à moyen terme et à la création de quelque 20.000 logements supplémentaires». Mais le rêve doit affronter une cruelle réalité, à savoir l'extrême concentration de la propriété foncière.
En réalité, 0,5% de la population luxembourgeoise détient la majeure partie du foncier constructible (1.865 ha détenus par 3.400 individus). Et ces propriétaires-là ne sont pas près de céder si rapidement. Même sous pression de nouvelles taxes... Aussi, le ministère de l'Aménagement (et celui du Logement) peuvent-ils déjà s'appuyer sur la volonté des bourgmestres de libérer plus de terrains, mais aussi sur celle des acteurs publics d'acquérir puis mettre à disposition pour des projets de constructions de nouvelles aires.
Une urgence sociale
Ces cinq dernières années, État, communes, fonds (Belval, Kirchberg, Logement...) ont ainsi réussi à mobiliser 1,9% de surfaces éligibles à de futurs bâtiments d'habitat supplémentaires.
Reste que pour Claude Turmes «il est maintenant essentiel de parvenir à un changement de mentalité dans la société luxembourgeoise. La propriété privée ne doit pas alimenter la flambée des prix du logement au détriment de l’accès au logement abordable». Dans un pays où 21.000 ménages dépensent plus de la moitié de leur revenu pour le logement, cela devient même plus qu'une préoccupation, une urgence sociale.
Suivez-nous sur Facebook, Twitter et abonnez-vous à notre newsletter de 17h.
