Cauchemar sur les routes: Frontaliers à bout: les contrôles routiers en 4 questions
Cauchemar sur les routes: Frontaliers à bout: les contrôles routiers en 4 questions
Pour tous les Français, les attentats perpétrés à Paris le 13 novembre sont difficiles à vivre: la nation est plongée dans la peine, et pour tout le monde, il y a "un avant" et "un après".
Sans compter que ces attaques terroristes ont aujourd'hui des conséquences très concrètes sur le quotidien de dizaine de milliers de Français: les travailleurs frontaliers. Ils vivent un véritable cauchemar sur les routes depuis la mise en place des contrôles renforcés aux différentes frontières.
Vers la Suisse, l'Espagne ou vers le Luxembourg: partout, les mêmes images de bouchons qui n'en finissent plus, et des temps de trajet de plusieurs heures, matin et soir.
Des contrôles jusqu'à quand?
La France avait d'abord annoncé des contrôles ciblés aux frontières en vue de la COP21, du 30 novembre au 11 décembre à Paris, mais dans la foulée, la préfecture de Lorraine avait précisé que les flux transfrontaliers ne seraient pas impactés. C'était le 6 novembre. Entre temps, l'Etat islamique a semé la mort et fait vaciller Schengen.
Sur l'A31, les douaniers ont pris position dès le 16 novembre, avec des contrôles filtrants 24h/24 dans les deux sens de circulation. Le terroriste Salah Abdeslam est toujours recherché mais on pouvait penser que les barrages seraient levés assez rapidement.
Des contrôles aussi longtemps que la menace terroriste le nécessitera
Or, le 20 novembre, le ministre français Bernard Cazeneuve, à Bruxelles pour un conseil extraordinaire des 28 ministres de l'Intérieur et de la Justice de l'UE, annonce que la France maintiendra le contrôle à ses frontières, "aussi longtemps que la menace terroriste le nécessitera".
On ne sait donc pas à ce jour jusqu'à quand ces contrôles seront effectifs, ou même si ils cesseront un jour, puisqu'il est désormais question de modifier le "Code Frontières Schengen" pour autoriser les contrôles systématique à la fois aux frontières extérieures de l'UE mais aussi aux frontières intérieures.
Comment s'organisent les frontaliers?
Les internautes sont nombreux à réagir, notamment sur notre page Facebook. Si la plupart sont conscients que ces contrôles sont nécessaires dans le contexte actuel, certains se posent des questions quant à leur efficacité.
En effet, les frontaliers ont bien remarqué que des routes du réseau secondaire allant directement du Luxembourg à la France ne sont pas du tout surveillées! C'est le cas, par exemple, à Mondorf-les-Bains, Frisange ou Schengen.
Mathieu Landrin fait partie de ces milliers de gens dont le quotidien est maintenant bouleversé à cause des contrôles aux frontières. Cet ambulancier de Thionville et son épouse ont du revoir totalement leur organisation, et cela ne va pas sans poser des problèmes:
"On a un petit garçon qui est gardé par une nourrice après l'école, mais elle ne fait pas d'heure supplémentaire, ce qui d'habitude, ne nous pose aucun souci: on récupère notre fils en fonction de qui finit le plus tôt."
Ma femme a dû poser des demi-journées de congés car elle n'a pas réussi à faire ses 40 heures
"Mais depuis la semaine dernière, c'est impossible. Même en partant plus tôt le matin, ma femme n'a pas réussi à être tous les jours à l'heure à son travail: elle a donc dû poser des demi-journées de congés parce qu'elle n'a pas fait ses 40 heures. Et en quittant le bureau à 17h10 au Kirchberg, elle n'est pas arrivée à la maison avant 19h45 voire 20 heures, au lieu de 18h10 d'ordinaire."
"De mon côté, en accord avec mon employeur, j'interromps plus tôt mon service, c'est-à-dire que je demande des permissions à répétition pour pouvoir aller chercher mon fils car mon épouse est bloquée. Mais cela ne pourra pas continuer comme ça bien longtemps. Le petit réclame sa maman le soir et ça nous coûte cher en congés."
Transports en commun: la solution?
Alors que le Vice-premier ministre, Etienne Schneider, conseillait aux frontaliers de privilégier les transports en commun face à ces mesures radicales, force est de constater que le train ou le bus ne sont pas une solution miraculeuse. Bien au contraire.
Notre journaliste, qui s'est rendu en gare de Thionville ce lundi matin, à la rencontre des frontaliers qui prennent le TER vers Luxembourg, a pu voir que les rames supplémentaires mises à disposition par la SNCF ne servent en fait qu'à absorber l'affluence habituelle. Les usagers sont excédés.
Quant au bus, Charel Vandivinit, de la société luxembourgeoise Voyages Vandivinit qui propose des courses transfrontalières, confirme que la situation est catastrophique:
3 heures nous sont nécessaires pour acheminer nos voyageurs de Luxembourg-Kirchberg à Thionville, au lieu d'une heure habituellement
"J'espère que tout cela va se finir le plus vite possible! Je comprends que ça soit pour notre sécurité mais en ce moment, 3 heures nous sont nécessaires pour acheminer nos voyageurs de Luxembourg-Kirchberg à Thionville, au lieu d'une heure habituellement."
"Emprunter le réseau secondaire n'est pas envisagé car cela engendrerait des coûts supplémentaires, et de toutes façons, toutes les routes sont engorgées." La société n'a pas augmenter ses courses, mais des chauffeurs interviennent en renfort pour maintenir toutes les courses chaque jour.
"Nous avons introduit une demande en urgence auprès du ministère des Infrastructures pour qu'une voie de l'autoroute soit réservée aux bus. Nous attendons leur réponse."
Par ailleurs, aucun bus Vandivinit n'a encore été contrôlé par les forces de l'ordre.
En retard au travail: quelles conséquences?
Selon la loi, il est clair que ces contrôles routiers faisant désormais partie du quotidien, le salarié est censé prendre ses dispositions pour pouvoir arriver à l'heure à son poste de travail.
Seule la composante "imprévisible" d'une difficulté à se rendre au travail est prise en compte. Ainsi, si les retards survenus les premiers jours de la mise en place de ce dispositif extraordinaire ne peuvent pas être des motifs valables de licenciement ou de non-rémunération, des retards répétés, alors que le salarié sait que la situation est chaotique chaque matin, peuvent l'être. Le site public guichet.lu donne tous les détails nécessaires à ce sujet.
