Bonnevoie: le projet Hariko «était une belle aventure»
Bonnevoie: le projet Hariko «était une belle aventure»
Marianne Donven nous a donné rendez-vous devant la structure en ce dernier jour de l'année 2018. Attristée mais confiante en l'avenir, elle évoque avec nous ces trois dernières années, son engagement, mais aussi le futur des artistes qui habitaient ces lieux et ce qu'il advient des services sociaux, notamment pour les réfugiés, qui s'étaient développés à cet endroit.
«C'est grâce à l'Oeuvre Nationale de Secours Grande-Duchesse Charlotte que nous avons pu finir l'année dans ces locaux. Elle a fini par financer le Hariko à Bonnevoie jusqu'au dernier jour, y compris pour la fête de clôture du 1er décembre. Le financement devait se terminer au 30 septembre, mais nous avons obtenu une prolongation de dernière minute, dont nous étions très reconnaissants», explique Marianne.
«Presque tout le monde a retrouvé un toit»
Des palettes, bouts de verres et autres briques jonchent le trottoir autour du Hariko. Une structure en bois, occupée par quelques sans-abri, protège du froid à l'arrière du bâtiment, où des fenêtres ont été brisées. Nous faisons le tour de l'édifice: «presque tous les artistes ont retrouvé une place quelque part», souffle Marianne en marchant.
L'un d'entre eux a déménagé à Bruxelles, un autre a ouvert son propre atelier à la gare, un autre encore dans sa maison. Huit d'entre eux ont également suivi Marianne à Esch-sur-Alzette, où un nouveau Hariko a vu le jour en septembre dernier. «Un seul n'a pour l'instant plus d'atelier mais je ne perds pas espoir pour lui».
Sur les façades de l'immeuble, juste au-dessus des briques, les portraits de ces artistes donnent encore un peu de vie à l'endroit: «Ces photos font encore un peu vivre le Hariko, même si cette exposition aurait dû se faire plus tôt, lorsque le projet vivait encore», soupire la créatrice du projet.
Elle ne cache pas sa tristesse. Les derniers mois ont été très difficiles, elle qui a vu les briques s'empiler sous ses yeux alors qu'elle était encore dans l'édifice. «C'était une belle aventure. C'est difficile à expliquer, mais ce fut trois années incroyables, qui m'ont beaucoup appris», explique-t-elle, dans un sourire.
Appris humainement surtout. Car le Hariko n'était pas uniquement un projet dédié à l'art. Tout un pan social a été développé au cours de ces trois dernières années et notamment pour venir en aide aux demandeurs d'asile. «Je n'y connaissais rien du tout au départ. J'ai appris sur le terrain, en laissant de côté les a priori, pour comprendre les besoins des réfugiés», détaille Marianne.
«Il y a énormément de besoins au niveau social au Luxembourg»
Plusieurs associations étaient ainsi présentes dans ce bâtiment et accueillaient régulièrement des personnes dans le besoin: Passerell, Digital Inclusion, Open Home... tous ces projets sont nés au sein du Hariko et ont connu un franc succès.
«Ma salle d'attente était pleine. Le Hariko était un lieu où ces personnes se sentaient en sécurité. Beaucoup de gens venaient simplement parler, faire des rencontres. Le Luxembourg manque cruellement d'endroits comme celui-ci où les personnes dans le besoin peuvent passer la journée», rapporte Marianne.
Un jeune homme vient justement la solliciter devant l'établissement au moment de notre interview. Elle lui promet de «voir ce qu'elle peut faire pour lui» alors qu'il lui glisse quelques papiers sous le bras. «Il y a encore beaucoup à faire. Il y a énormément de besoins au niveau social au Luxembourg, pas seulement pour les réfugiés: pour des Luxembourgeois, des SDF aussi...», alarme-t-elle.
Une nouvelle "maison de l'inclusion" à venir dans la capitale
D'ici un mois, le bâtiment sera entièrement vidé avant la démolition. Mais Marianne a le cœur plus léger depuis 15 jours à cette pensée: le Hariko va repousser, à Luxembourg-Ville, dans une nouvelle "maison de l'inclusion" qui doit voir le jour d'ici le mois de février.
«Nous attendons d'être prêts pour communiquer là-dessus. Notre nouvelle adresse sera affichée sur les façades de l'ancien bâtiment, s'il est toujours là, et toutes les associations présentes ici le seront dans le nouvel établissement», explique-t-elle avec aplomb.
Assistance sociale, avocates, le lisko de la Croix-Rouge, des cours de langue... l'offre sera complète pour aider les plus défavorisés. «Nous aurons aussi de grands espaces communs pour accueillir d'autres associations qui souhaiteraient venir chez nous», poursuit-elle, enthousiaste.
La partie artistique ne sera plus présente dans la capitale - au profit d'Esch/Alzette et d'ici la fin de l'année d'une autre annexe à Ettelbruck - mais Marianne refusait de voir l'aspect social s'éteindre de cette manière.
«Pendant longtemps je me demandais ce que nous allions devenir et je suis soulagée d'avoir trouvé une solution in extremis. C'est une expérience sociale incroyable avec des gens merveilleux. Nous avons partagé différentes phases de leur vie au cours de ces trois dernières années et nous allons encore évoluer dans les prochains mois à venir. Je suis très attachée à ce projet, nous allons revenir», conclut-elle, confiante.
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