Au chevet du système de santé
Au chevet du système de santé
Après des mois d'attente, les représentants des infirmières et infirmiers ont finalement été reçus fin novembre par le Premier ministre. Pendant quelques dizaines de minutes, les voix de ceux et celles qui se trouvent en première ligne sanitaire ont été entendues par Xavier Bettel. A défaut d'avoir été écoutées, car le chantier qui s'annonce se révèle être complexe à mettre en oeuvre et implique un besoin de vision transversale. Et donc, prendra du temps.
Déjà connues puisque détaillées dans le rapport Laire, publié fin 2019, les lacunes du système de santé du Luxembourg étaient listées, comme la «pénurie de personnels issus du Luxembourg» ou «la fragilité du système de soins». Si les sept défauts mis en avant étaient accompagnés de recommandations, ces dernières n'ont non seulement pas pu être mises en oeuvre en raison de l'arrivée de la pandémie, mais leurs effets néfastes ont été exacerbés.
«Il est évident qu'une seule réunion, quand bien même tenue avec le Premier ministre, ne résoudra pas tout», reconnaît Anne-Marie Hanff, présidente de l'Association des infirmières et infirmiers du Luxembourg (ANIL). «Mais il était important qu'elle ait lieu, ne serait-ce que pour améliorer la coordination ministérielle», affirme la porte-parole des quelque 6.200 infirmiers du pays.
Car si les quelque 15.000 personnels des professions de santé dépendent principalement du ministère de la Santé, une vingtaine d'instances «interviennent dans la gestion des ressources professionnelles de santé», note le rapport Laire, qui précise que cette gestion est réalisée «sans véritable concertation globale sur les problèmes rencontrés». Autrement dit, que chaque ministère ou administration gère la mission qui lui a été attribuée sans vision globale.
Une réalité qui avait partiellement été prise en compte début 2020 lors de l'organisation d'une table ronde santé, qui visait officiellement à «identifier les défis du système, analyser divers scénarios possibles et proposer des mesures prioritaires». Avec comme horizon un plan national santé validé à la fin 2021.
La pandémie de covid-19 en aura donc décidé autrement et contraint l'exécutif à accélérer son calendrier. Selon le ministère d'Etat, une réunion interministérielle devrait se réunir «courant janvier 2021» pour tenter de mettre sur pied un dispositif visant notamment à «former plus d'infirmières et d'infirmiers au Luxembourg».
Pour ce faire, l'ANIL plaide pour la mise en place de deux chantiers en parallèle: la refonte complète de la formation d'un côté et l'amélioration de l'image du métier de l'autre. Outre la revalorisation du diplôme pour qu'il obtienne un statut universitaire, Anne-Marie Hanff plaide notamment pour «la création de passerelles avec la formation d'aide-soignant», «la possibilité de suivre la formation à mi-temps» mais aussi pour un travail de pédagogie dans les lycées.
«Car certains professeurs déconseillent cette voie à leurs élèves, car jugée trop compliquée par rapport au niveau des classes et où le français joue un trop grand rôle», assure la présidente de l'ANIL. Chaque année, une quarantaine d'élèves sortent diplômés au Luxembourg, alors que les besoins annuels sont estimés à 200 rien que pour répondre aux attentes de l'OMS qui recommande, à l'horizon 2030, l'autonomie en matière de personnels de santé.
Et donc de stopper «les sous-investissements chroniques en matière d'éducation et de formation de personnels de santé» qui amènent le pays «à se reposer sur la production de personnels de santé dans les pays étrangers limitrophes (...) déstabilisant ainsi les systèmes de santé dans ces régions». En 2019, 53% de la totalité des professionnels de santé étaient originaires d'Allemagne, de Belgique et de France, selon les données du ministère de la Santé.
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