40 ans aujourd'hui pour le futur monarque
40 ans aujourd'hui pour le futur monarque
Monseigneur, quelle signification accordez-vous à ce 40ème anniversaire?
«Pour moi, comme pour tout le monde, il s'agit d'une étape importante. Je suis heureux en ménage et j'ai pu profiter des joies de la paternité depuis la naissance de Charles, il y a un an et demi.
Dès votre plus jeune âge, vous avez été préparé à votre futur rôle de chef d'État. Quelles ont été les étapes cruciales de ce parcours?
«Ce rôle est une grande responsabilité dont j'ai pris conscience très tôt. Les conseils et le soutien de mes parents m'ont énormément aidé. La transmission des valeurs joue un rôle important dans notre famille. Je considère l'achèvement de l'école d'officiers, mon séjour à l'université et mes fonctions de Grand-Duc héritier (qui, avec mes nombreuses activités et réunions, me permettent d'écouter mes compatriotes, de les comprendre et de les soutenir) comme des passages importants.
Comme tout adolescent, j'ai traversé des crises et des moments de doute face au poids de la charge qui m'était destinée. A cette époque, ma mère a joué un rôle central. Elle a eu la patience de m'écouter et m'a donné ses conseils pour que je trouve ma voie dans le rôle que je devais jouer. Il est important de toujours être fidèle à soi-même.
Votre fils, le prince Charles, sera également soumis à ces préparatifs en vue de la succession. Que voulez-vous lui transmettre et, au regard de votre propre parcours, quelles expériences souhaitez-vous lui épargner?
«J'espère pouvoir offrir à Charles une enfance aussi normale que possible, comme ce fut le cas pour moi. Je suis très reconnaissant à mes parents d'avoir veillé à cela. Il s'agira de trouver un équilibre entre la préparation à ses futures responsabilités et une vie qui ne soit pas trop publique. En outre, Charles devrait également être autorisé à faire des erreurs dans sa vie. Parce que vous pouvez apprendre de vos erreurs. En tout cas, moi, cela m'a toujours rendu plus fort.
Je parle luxembourgeois avec mon fils alors que sa mère parle français avec lui. Sinon, seul le luxembourgeois est parlé au château de Fischbach. Je suis d'ailleurs curieux d'entendre les premiers mots de Charles (et s'ils seront en luxembourgeois ou en français)... Petite confidence : nous avons tous les deux, avec mon fils, un rituel au déjeuner. Je mange mon kachkéisschmier et Charles peut le goûter. Ce qu'il fait déjà avec beaucoup de plaisir.
Charles est né pendant la pandémie covid. Dans quelle mesure cela a-t-il affecté votre vie de famille?
«Nous avons passé beaucoup de temps ensemble dans la nature, si bien que Charles a déjà pu apprendre à connaître un peu les merveilleux panoramas du pays. Et j'ai pu passer aussi beaucoup de temps avec mes proches en général et voir au plus près Charles grandir.
Beaucoup de gens ne peuvent pas imaginer ce qu'est le quotidien d'un membre de la famille grand-ducale. Avez-vous une certaine routine ?
«Dans un certain sens, oui. Par exemple à travers les réunions régulières avec mon personnel. Par ailleurs, l'agenda de nos vies reste largement déterminé par nos engagements officiels, que ce soit sur le plan social, économique ou culturel, et par nos fonctions de représentation.
L'une de vos fonctions consiste à participer à des missions économiques, comme actuellement à l'exposition universelle de Dubaï. Dans quelle mesure y a-t-il toujours une pression à représenter au mieux les intérêts du Luxembourg et appréciez-vous encore ces déplacements?
«Ces voyages sont enrichissants pour moi, même s'ils sont loin d'être des vacances. J'aime l'atmosphère conviviale et je suis toujours impressionné par le savoir-faire de l'économie luxembourgeoise. Si ma présence en tant que Grand-Duc héréditaire contribue à ouvrir des portes et à construire des ponts, je considère cela comme une partie utile de mon rôle.
La protection de l'environnement tient particulièrement à cœur à votre père, le Grand-Duc Henri. Comment voyez-vous l'engagement des jeunes générations et que peut-on/doit-on faire pour ne pas les décevoir ?
«Nous devons être conscients que les plus jeunes ont considérablement souffert de la pandémie ces derniers mois. Il est donc important pour moi de discuter de cette expérience en contact direct avec eux, comme je l'ai fait récemment lors de ma visite au lycée Robert-Schuman. Bien sûr, il s'agit aussi de façonner l'avenir, et la lutte contre le changement climatique est ici une préoccupation particulière.
En tant que générations plus âgées, nous devrions accompagner et soutenir les jeunes dans cet engagement. La contribution positive des jeunes a été démontrée, par exemple, par les scouts luxembourgeois pendant la pandémie. Cela leur a d'ailleurs valu de recevoir le Prix du citoyen européen pour leur engagement. En tant que scout, cela me remplit de fierté.
En tant que membre du Conseil d'État, dans quelle mesure contribuez-vous à façonner les décisions prises?
«Pour moi, siéger au Conseil d'État constitue un formidable apprentissage. Cela me permet de me familiariser avec les processus législatifs. Mais ma présence reste guidée par des principes de neutralité politique et de retenue. J'écoute attentivement afin de me faire une idée aussi complète que possible du contexte politique et social.
La monarchie luxembourgeoise a connu des jours mouvementés dans un passé récent. Comment avez-vous vécu la période qui a conduit au rapport Waringo et à la création de la Maison du Grand-Duc ?
«C'était en effet une époque agitée et difficile. En particulier pour mes parents qui, pendant cette période, ont dû ressentir que leur engagement pendant de nombreuses années n'était plus apprécié. Cependant, mes parents ont toujours pu compter sur le soutien et l'appréciation de leur famille.
Avec la Maison du Grand-Duc et la nouvelle administration des biens du Grand-Duc, nous disposons désormais de nouvelles structures. Et même s'il s'agit encore d'un processus évolutif, j'envisage l'avenir avec beaucoup de confiance et cela d'autant plus que nous sommes entourés d'un personnel très bon et compétent.
Bientôt, la réforme constitutionnelle fera également entrer l'institution du chef de l'État dans le XXIe siècle. En tant que Grand-Duc héritier, dans quelle mesure acceptez-vous le fait que les politiciens puissent se prononcer sur votre rôle?
«La constitution ne prescrit pas comment je devrais me comporter en tant que Grand-Duc. Le nouveau projet constitutionnel, comme la constitution existante, définit le cadre du rôle du Grand-Duc en tant que chef de l'État. Mais les textes laissent la place pour une certaine spontanéité personnelle.
Quels arguments utiliseriez-vous pour convaincre quelqu'un de l’utilité et de la modernité de la monarchie?
«Je citerais notre tradition familiale dont je suis très fier. Il y a suffisamment d'exemples dans l'histoire de la façon dont notre famille a défendu le Luxembourg. Il suffit de penser à la Seconde Guerre mondiale, lorsque la Grande-Duchesse Charlotte, le prince Félix et le prince Jean se sont battus sur de nombreux fronts pour préserver l'indépendance du Luxembourg.
Ensuite, une monarchie moderne doit s'adapter, faire face aux défis de l'époque et s'impliquer. En particulier dans la sphère économique, elle peut fonctionner comme une puissance douce. Et puis une monarchie doit être humaine. Nous devons nous intéresser à nos concitoyens et être là pour eux, dans les bons et surtout les mauvais moments.»
- Extraits de l'entretien signé Marc Schlammes et Michael Juchmes paru en version intégrale dans le Luxemburger Wort.
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