Sale temps pour Super Maggie
Sale temps pour Super Maggie
De notre correspondant, Max Hellef (Bruxelles) - Si elle demeure l'une des personnalités préférées des Flamands, elle est en revanche devenue la tête de Turc des francophones. L'étoile de la ministre de la Santé, Maggie De Block (Open-VLD) a singulièrement pâli ces dernières années. A 58 ans, elle reste toutefois un pion incontournable du jeu politique belge. Ceux qui rêvent d'avoir sa peau ne sont pas au bout de leur peine. Les syndicats sont vent debout. «C'est la pire ministre de la Santé que j'ai connue», avance un syndicaliste en dénonçant la politique de santé «à l'américaine» défendue par Maggie De Block et sa propension à plaider pour le banc patronal.
Les critiques adressées à «Super Maggie» n'ont guère varié tout au long d'un mois de mars placé sous le signe du coronavirus. La ministre De Block serait coupable d'incompétence et d'imprévoyance: les stocks de masques, de tests réactifs et de protections pour le personnel soignant manquent ou non pas été renouvelés.
Depuis 2014, l'essentiel de l’action de la libérale flamande aurait, clament ses adversaires, consisté à dépecer les soins de santé. Elle serait aussi responsable de la pénurie de médecins généralistes annoncée côté francophone pour la prochaine décennie. Elle aurait pris la pandémie par-dessus la jambe dans un premier temps, évoquant un «drama queen», etc. Plus largement, selon un sondage paru jeudi, un Belge sur deux estime «insuffisante» l'action du gouvernement fédéral auquel appartient Maggie De Block.
A la Chambre, les socialistes n'ont de cesse d'insister sur le fait que «les travailleurs de la santé manquent de tout!». En coulisses, ils exècrent Maggie De Block. Quant à la député humaniste Catherine Fonck en pointe sur le dossier de la pandémie, elle s'adresse systématiquement à la Première ministre Sophie Wilmès, sans même accorder un regard à sa consœur. Consœur, puisque toutes deux sont médecins de formation. Si les attaques sont parfois virulentes côté francophone, les coups sont en revanche retenus. La population ne comprendrait pas en effet qu'une crise politique s'ajoute à la crise sanitaire alors que chaque jour, dans des dizaines de médias, les épidémiologistes cautionnent le choix du gouvernement Wilmès de confiner le pays.
Il ne suffira pas de couper des têtes
Et puis, il y a ce pacte qu'ont noué les partis gouvernementaux avec la plupart des partis d'opposition pour piloter la Belgique à travers la crise du covid-19. Il implique une «paix des braves» qui ne s'évaporera pas nécessairement avec la fin de la pandémie. S'ils veulent toujours former un gouvernement fédéral de plein droit sans la N-VA nationaliste flamande de Bart De Wever, les partis francophones sauront se souvenir que la participation des libéraux flamands de l'Open-VLD est indispensable. Or Maggie De Block est incontournable à l'Open-VLD.
Les chiffres, enfin, démontrent que Maggie De Block n'est pas le fossoyeur de la Sécu que l'on croit. Sous son «règne», les soins de santé ont sans doute été gérés avec un souci d'orthodoxie budgétaire, mais elle n'est pas seule à avoir tranché dans le vif. Avant elle, les socialistes francophones avaient aussi réalisé de grands plans d'économie. Les chiffres, toujours eux, montrent que le Belge s'acquitte à titre personnel de 17,6% de ses factures «santé». Ce montant n'a plus été aussi bas depuis longtemps. «Il ne suffira pas de couper des têtes, il faudra régénérer tout un système», tranchait jeudi dans son éditorial Le Soir, en rappelant que l'épidémie a montré les limites du système de santé tout en plongeant ses travailleurs dans le désarroi.
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