Polémique autour du traçage belge
Polémique autour du traçage belge
De notre correspondant, Max Hellef (Bruxelles) - Moins de deux semaines après la rentrée des primaires, le covid-19 est réapparu dans certaines écoles du pays. Des classes ont été fermées, des élèves renvoyés chez eux et des parents contraints de garder à nouveau leurs enfants à la maison. Comme établi lors du déconfinement, le traçage des malades a été activé afin d'identifier les personnes infectées et tenter ainsi d'endiguer la propagation du virus.
Ces derniers jours toutefois, il a été beaucoup question de l'utilité relative du traçage orchestré par les autorités belges. Le nombre de contaminations est fortement à la baisse en dépit des cas dépistés dans ces écoles. Le dispositif qui a été mis en place apparaît donc démesuré. Pour les spécialistes, il s'agit désormais de trouver l'équilibre entre la taille et le coût de la nouvelle structure et la prévention du risque sanitaire. Un accord de coopération entre les Régions vient de conforter le principe de précaution, donnant à la Belgique une arme qui lui a cruellement manqué au début de la pandémie.
Mais il y a une ombre au tableau: l'homme qui a imaginé le cadre légal du traçage est aujourd'hui malmené par la presse. Selon le magazine Wilfried, Frank Robben est l'objet de multiples soupçons de conflits d'intérêts. Son mandat à l'Autorité de la protection des données, un organe censé veiller sur les datas personnelles, serait de surcroît illégal.
Wilfried voit en outre dans le Comité de la sécurité de l'information un «organisme mystérieux» créé en 2018 par Frank Robben, contre l'avis de la Commission européenne et du Conseil d'État, contre la Constitution belge et le Règlement général sur la protection des données (RGPD), mais approuvé par le parlement. Or, cet organe désigne qui est autorisé ou non à recourir aux données privées des malades.
«Un système digne d'un État policier»
Pour la Libre Belgique, «d'un côté, Frank Robben dirige des administrations qui gèrent les échanges de données. De l'autre, il contrôle la bonne utilisation des données par la force publique. Pour nombre d'observateurs, il y a là un conflit d'intérêts, encore aggravé par sa troisième casquette, celle de patron de Smals, une société qui fournit des services informatiques (aux) deux institutions qu'il dirige.» Ces accusations s’ajoutent à un tempérament décrit par Wilfried comme «totalitaire». Frank Robben serait «capable à lui seul de faire tomber un gouvernement» dans la mesure où il est juge et partie, où il bénéficie «d'une situation de monopole sur le marché des données de santé publique et de sécurité sociale».
Le gouvernement de la Première ministre Wilmès, qui a désigné Frank Robben, se retrouve en conséquence accusé d'avoir mis en place «un système digne d'un État policier». La Ligue des droits humains évoque «un simulacre de démocratie» et craint que le traçage des malades ne perde tout crédit auprès de la population. «Avec le traçage, les dirigeants de notre pays disposent d'un outil hallucinant de contrôle sur les citoyens», estime la Ligue des droits humains.
Contacté par plusieurs médias, Frank Robben se défend dans toutes les langues, estimant qu'il n’y a pas d'incompatibilités entre ses différentes fonctions. Et puis, rappelle-t-il, c'est le gouvernement Wilmès qui est venu le chercher. Problème: en Belgique «la commission d’enquête (sur les dysfonctionnements potentiels dans la gestion de la crise sanitaire) reste dans les limbes», rappelait samedi L'Echo. Une résolution des communistes du PTB allant dans ce sens n'a pas passé la rampe en Wallonie. Au fédéral, on en est toujours aux discussions.
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