Lula élu pour un 3e mandat au Brésil
Lula élu pour un 3e mandat au Brésil
(AFP) - Luiz Inacio Lula da Silva a obtenu 50,84% des voix, contre 49,16% pour le président sortant d'extrême droite, avec les résultats de 99% des bureaux de vote.
C'est l'écart le plus serré entre deux finalistes de la présidentielle depuis la retour à la démocratie après la dictature militaire (1964-1985).
La marge est bien plus étroite que ce que prédisaient les sondages, qui avaient déjà sous-estimé le score de Jair Bolsonaro avant le premier tour.
L'ancien métallo de 77 ans au destin digne d'un film de Hollywood, qui a connu la faim dans son Pernambouc (nord-est) natal, fera son retour au sommet de l'Etat le 1er janvier.
«C'est le jour le plus important de ma vie», avait-il déclaré en matinée au moment de voter.
Lula avait atteint une popularité record à l'issue de ses deux premiers mandats (2003-2010), mais avait ensuite connu la disgrâce, passant par la case prison, après des condamnations pour corruption finalement annulées pour vice de forme.
Après cette victoire serrée, Lula va devoir composer avec un Parlement qui penche clairement à droite et devra nouer des alliances pour gouverner.
Le silence assourdissant de Bolsonaro
Acclamé par une impressionnante marée rouge de centaines de milliers de partisans massés sur l'Avenida Paulista de Sao Paulo, Lula a prôné la «paix et l'unité» après son élection. «On m'avait enterré vivant!», a lancé l'icône inoxydable de la gauche, qui a comparé sa victoire à une «résurrection».
Il s'est toutefois dit «inquiet» du silence assourdissant de son adversaire, qui n'avait toujours pas reconnu sa défaite plus de quatre heures après le résultat.
Jair Bolsonaro est le premier président se présentant à un second mandat à ne pas être réélu depuis le retour à la démocratie en 1985.
«À partir du 1er janvier, je vais gouverner pour les 215 millions de Brésiliens et Brésiliennes, pas seulement ceux qui ont voté pour moi», a dit Lula.
«Personne ne veut vivre dans un pays divisé, en état de guerre perpétuelle. Ce pays a besoin de paix et d'unité. (...) Il n'y a pas deux Brésil, nous sommes un seul peuple, une seule nation», a insisté l'icône de la gauche, en référence à la présidence clivante de Bolsonaro.
Une campagne ultra-polarisée
La campagne entre les deux hommes que tout oppose s'est déroulée dans un climat brutal et ultra-polarisé qui les a vus s'insulter copieusement pendant que les réseaux sociaux charriaient des torrents de désinformation.
«Voleur», «ex-prisonnier», «alcoolique» ou «honte nationale», a dit Bolsonaro au sujet de Lula. Ce dernier a rendu les coups: «pédophile», «cannibale», «génocidaire» ou «petit dictateur».
Si une vive polémique a éclaté autour de barrages filtrants de la Police routière fédérale (PRF) qui ont retenu les électeurs, notamment dans les régions pauvres du nord-est, fief électoral de Lula, aucun incident violent n'est venu entacher le vote des quelque 156 millions de Brésiliens appelés aux urnes dimanche.
Félicitations de Macron et Biden
La victoire de Lula a été saluée par des feux d'artifice et des cris de joie dans de grandes villes comme Rio de Janeiro et Sao Paulo, où des centaines de milliers de personnes faisaient la fête dans la rue, ont constaté des journalistes de l'AFP.
«Lula, c'est un synonyme d'espoir, l'espoir de voir des jours meilleurs», a déclaré Alexandra Sitta, enseignante de 48 ans, qui fêtait la victoire du candidat de gauche à Sao Paulo.
Sur l'emblématique Avenue Paulista, une foule compacte de plusieurs centaines de milliers de personnes est venue acclamer le président élu.
«La démocratie est de retour au Brésil, la liberté est de retour!», a-t-il scandé depuis une estrade, devant une foule gigantesque en liesse.
Lula a été rapidement félicité par plusieurs dirigeants étrangers. Le président américain Joe Biden a salué son élection «libre et juste» et son homologue français Emmanuel Macron a estimé que sa victoire «ouvre une nouvelle page de l'histoire du Brésil».
«Notre pays est trop grand pour être relégué au triste rôle de paria», a déclaré le président élu dans son discours de victoire, assurant que le Brésil était «de retour» sur la scène internationale.
Lula a également évoqué le sujet brûlant de l'Amazonie, où la déforestation et les incendies ont fortement augmenté sous le mandat de Jair Bolsonaro.
«Le Brésil est prêt à jouer à nouveau les premiers rôles dans la lutte contre le changement climatique. Le Brésil et la planète ont besoin d'une Amazonie en vie», a-t-il dit.
«Le cauchemar est enfin terminé. Lula doit agir fermement et rapidement sur l'environnement», a réagi le collectif d'ONG Observatoire du Climat.
L'espoir d'une «saine transition»
Les Bolsonaristes, eux, étaient particulièrement amers.
«Je suis révoltée, le peuple brésilien ne va pas avaler une élection manipulée comme cela et remettre le pays entre les mains d'un bandit. Bolsonaro doit agir vite, sinon, on ne pourra plus rien faire», dit Ruth da Silva Barbosa, enseignante de 50 ans, dépitée après avoir suivi le dépouillement à Brasilia.
Mais plusieurs alliés importants de Jair Bolsonaro ont reconnu sa défaite, comme l'ancien juge anticorruption Sergio Moro.
«La démocratie est ainsi. Je serai dans l'opposition en 2023», a tweeté celui qui avait envoyé Lula en prison.
Douze gouverneurs d'Etats brésiliens ont également été élus dimanche, dont le bolsonariste Tarcisio de Freitas dans l'Etat de Sao Paulo, le plus peuplé et le plus riche du Brésil.
