Les pouvoirs spéciaux accordés au gouvernement Wilmès
Les pouvoirs spéciaux accordés au gouvernement Wilmès
De notre correspondant, Max Hellef (Bruxelles) - Le coronavirus a eu raison des divisions des partis politiques belges. Dimanche vers 23 heures, Sabine Laruelle et Patrick Dewael ont annoncé l'accord intervenu entre dix partis au cours de la journée pour soutenir le gouvernement minoritaire de la libérale Sophie Wilmès. Cet exécutif pourra recourir aux pouvoirs spéciaux pendant une période maximale de six mois. Six mois qui seront essentiellement consacrés à tenter de résoudre la crise sanitaire du Covid-19.
Le gouvernement reste constitué des trois partis rescapés de la chute du gouvernement Michel en décembre 2018. Soit les libéraux du nord et du sud pays (le Mouvement réformateur et l'Open VLD) ainsi que les chrétiens-démocrates flamands du CD&V. L'actuel gouvernement Wilmès ne dispose que de 38 sièges (sur 150) à la Chambre des représentants.
Tous les autres partis – à l’exception des communistes du PTB et du Vlaams Belang (extrême droite flamande) - soutiennent l'actuel gouvernement minoritaire: les socialistes, les verts, la N-VA nationaliste flamande, le parti humaniste CDH et les libéraux-sociaux de Défi. Ils autorisent de facto l'exécutif emmené par Sophie Wilmès à disposer des pouvoirs spéciaux afin de prendre en urgence les mesures qui s'imposent, sans passer par le Parlement. Ce n'est pas une première: dans les années 80, les pouvoirs spéciaux furent déjà décrétés pour permettre à certains gouvernements Martens de faire face aux difficultés économiques que rencontrait alors le pays. En 2009, il était cette fois question de la grippe H1N1.
Une telle union est remarquable et témoigne de l'importance du moment. Elle se substitue à la tentative avortée de former ce week-end un gouvernement d'urgence qui aurait réuni les deux ennemis jurés de la politique belge: les socialistes francophones de Paul Magnette et les nationalistes flamands de Bart De Wever. Un accord paraissait possible dimanche matin, lorsqu'à l’heure du déjeuner le leader socialiste a rejeté toute possibilité de compromis. Il a accusé son adversaire de vouloir tirer un profit personnel de la crise. Bart De Wever, le président du principal parti du pays en ordre d'importance, entendait devenir Premier ministre du prochain gouvernement. Il n'y aura donc pas de nouveau gouvernement réunissant le PS et la N-VA ou de gouvernement «d'union nationale», du moins d’ici la rentrée.
Il reste au gouvernement de Sophie Wilmès à demander un vote de confiance à la Chambre. Celui-ci devrait être obtenu sans problème jeudi alors que la Belgique pique du nez dans la pandémie. Ce lundi matin, le pays fait de surcroît face à un scandale potentiel : des masques qui devaient être livrés par une entreprise turque risquent de ne pas arriver entre les mains des Belges en raison d’une fraude. Quant aux hôpitaux mis sur le pied de guerre, ils s’attendent à être débordés rapidement. Dimanche, le bilan humain du Covid-19 s’élevait à 4 morts et 886 personnes contaminées. La barre des 1000 cas est proche.
La satisfaction était bien présente dimanche soir chez les informateurs royaux Sabine Laruelle et Patrick Dewael. «Je voudrais remercier l'ensemble des présidentes et présidents de partis démocratiques de ce pays qui ont pu mettre le pays avant les intérêts de leurs propres partis», a d'abord déclaré la libérale francophone Sabine Laruelle, avant de préciser que le roi va nommer - sans doute ce lundi - la Première ministre formatrice.
Ce n'est pas un chèque en blanc
«Elle sera chargée de rédiger avec les dix partis démocratiques une déclaration et elle obtiendra le soutien de ces dix partis au niveau du Parlement. D'un gouvernement en affaires courantes, on passera bien à un gouvernement de plein exercice. Ce sera un gouvernement avec un programme limité. L'urgence aujourd'hui, c'est lutter contre le coronavirus», a ajouté Sabine Laruelle.
Une première évaluation aura lieu dans les trois mois. Le mandat accordé au gouvernement Wilmès pourra être prolongé d’un trimestre. «Ce n'est pas un chèque en blanc que les partis donnent à ce gouvernement, ils souhaitent pouvoir être consultés», a tenu à préciser Sabine Laruelle.
