Le cordon sanitaire belge resserré
Le cordon sanitaire belge resserré
De notre correspondant MAX HELLEFF (Bruxelles) - Une crise est parfois l'occasion de resserrer les liens. Jeudi, les principaux partis francophones belges (socialistes, libéraux, écologistes, sociaux-chrétiens et libéraux-sociaux) ont trouvé un accord sur l'actualisation de la charte de la démocratie qui fixe les règles du cordon sanitaire. Depuis 1993, ce pacte exclut toute entente politique et tout débat dans les médias avec l'extrême droite.
Le mois dernier, Georges-Louis Bouchez, le leader des libéraux francophones, avait provoqué l'ire des autres partis pour avoir débattu sur un plateau de télévision avec Tom Van Grieken, le président du Vlaams Belang (extrême droite flamande).
S'ils sont courants en Flandre comme en France, ces débats sont prohibés en Belgique francophone. Quant à s'allier avec un parti qui tiendrait un discours d'extrême droite, autant s'acoquiner avec le diable.
Depuis son débat avec Tom Van Grieken, Georges-Louis Bouchez a fait une courbe rentrante alors que, parallèlement, une négociation s'ouvrait entre les partis francophones pour aller vers une nouvelle charte de la démocratie. Afin de resserrer en quelque sorte le cordon sanitaire.
Une extrême droite bien implantée en Flandre
Au final, la charte réitère les engagements pris il y a 30 ans. Elle interdit toute alliance politique avec une formation d'extrême droite - «qui manifestement porte des idéologies ou des propositions susceptibles d'attenter aux principes démocratiques qui fondent notre système politique». Elle rejette tout débat avec ses représentants dans les médias et sur les réseaux sociaux, que ce soit en Flandre ou du côté francophone.
Les défenseurs de la charte estiment que c'est grâce à cet engagement que l'extrême droite n'a jamais réussi à s'implanter vraiment en Wallonie depuis la dernière guerre, alors qu'elle cartonne en Flandre. Selon un récent sondage, le Vlaams Belang est le second parti au nord du pays, juste derrière la N-VA nationaliste de Bart De Wever.
Mais tous les signataires ne sont pas pour autant satisfaits. Le libéral Georges-Louis Bouchez aurait souhaité que les formations qui n'adhérent pas à la charte soit bannies des alliances interpartis futures. Les communistes du PTB sont clairement visés, ceux-ci tenant à garder leur liberté en tant que parti «national» (une exception) d'aller débattre en Flandre avec le Vlaams Belang. Il y a quelques années, le précédent président du PTB, Peter Mertens, avait accepté lui aussi de débattre avec le Belang.
Attention aux réseaux sociaux
La question de la nature et des intentions exactes du PTB est fréquemment posée par la droite libérale. Pour cette dernière, l'extrême gauche est aussi dangereuse que l'extrême droite. Elle aurait donc souhaité tendre un cordon sanitaire également contre le PTB, parti qui n'a jamais renié ses racines maoïstes et marxistes-léninistes. Mais les socialistes et les écologistes ont rejeté cette requête, laissant entendre qu'ils pourraient se passer des libéraux là où les trois partis gouvernent aujourd'hui ensemble.
La nouvelle charte devrait faire référence au 8 mai, date anniversaire de la précédente. Mais aussi commémoration de la victoire contre le nazisme. Modernisée, elle mettra en garde contre l'avènement des réseaux sociaux qui «sans aucune régulation a donné aux idéologies nationalistes, identitaires, discriminatoires et racistes une caisse de résonance qu'elles n'avaient pas jusqu'alors» et qui «leur permet de séduire les citoyens». «Le racisme, la xénophobie, la discrimination et l'antisémitisme ne sont pas des opinions, mais sont des délits qu'il convient de dénoncer et de faire condamner.»
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