La relance belge manque de nerfs
La relance belge manque de nerfs
De notre correspondant, Max Helleff (Bruxelles) - Ce n’est plus un gouffre mais un abysse. Le déficit public de la Belgique pour 2020 est estimé à 45 milliards d’euros. Le plus lourd de l’après-guerre avec un trou de 10,04% du produit intérieur brut. Auparavant, il atteignait 1,95% du PIB, soit 9,3 milliards.
Les raisons de cette dégringolade sont bien sûr à trouver dans la crise du coronavirus. 21 milliards d’euros ont été dégagés pour le seul soutien aux différents secteurs d’activité mis sur pause et aux travailleurs en péril. A contrario, les recettes fiscales se sont écroulées. Au total, estime le ministère du Budget, la crise aura eu un impact de 35,6 milliards.
Pierre Wunsch, le gouverneur de la Banque nationale de Belgique, insiste : «Je ne plaide pas pour un retour à l’assainissement budgétaire avant que la reprise soit suffisamment solide. Cela n’aurait aucun sens. Mais dès que la situation se sera normalisée, la Belgique devra se fixer un objectif budgétaire permettant de garantir la soutenabilité des finances publiques». Faute de pouvoir compter sur de nouveaux impôts, «l’essentiel de l’effort devra venir du côté des dépenses». Problème : la Belgique n’en finit plus de se serrer la ceinture depuis la crise économique et financière de 2008. La Fédération Wallonie-Bruxelles, le niveau de pouvoir qui organise l’enseignement francophone, passe ainsi pour être virtuellement en faillite.
Le moment serait donc venu de se montrer créatif. Or, précisément, la Belgique vient de remettre à l’Europe le volet «réformes structurelles» de son plan de reprise et de résilience. C’est la condition sine qua non pour accéder aux 5,9 milliards d’euros qui lui sont promis d’ici à 2026.
Un problème de choix
Et là, la déception est à la hauteur de l’enjeu. Pour Le Soir, l’inventaire des réformes structurelles élaboré par les différents gouvernements du pays «démontre une impressionnante maîtrise de l’art du… copier-coller. Pour l’essentiel en effet, chaque entité expose sa déclaration de politique générale, comme si celle-ci répondait parfaitement aux demandes européennes.»
La Commission attendait des réformes dans les finances publiques, les soins de santé, la compétitivité ou encore la mobilité. Et bien sûr en matière de transition vers une économie bas carbone. La Belgique répond par un vaste catalogue d’intentions qui va de l’arrivée de la 5G au ferroviaire en passant par l’économie circulaire. A priori, ces listes sont compatibles. Le problème réside plutôt dans l’incapacité des différents niveaux de pouvoir belges à faire des choix précis. Circonstance aggravante : la plupart des projets émis datent de l’avant-covid, «alors que le plan de reprise demandé par l’Europe est censé répondre à la crise du coronavirus et aux faiblesses qu’elle a mises en évidence».
173 réformes
Plusieurs raisons peuvent expliquer cela : la crise sanitaire est chronophage, la plupart des partis sont au pouvoir et refusent de tirer un trait sur leur propre programme, les exécutifs manquent de leadership, etc.
En tout, le royaume a listé 173 réformes, soit le triple de ce que demande l’Europe. Cette dernière semble en outre dubitative face à certains projets (qui n’en sont pas) - comme la mise en application de telle ou telle directive européenne – ou tiennent de la quadrature du cercle comme la très controversée taxation automobile à Bruxelles dont la Flandre et la Wallonie ne veulent pas.
La Belgique doit remettre sa nouvelle proposition à la Commission avant le 30 avril à minuit.
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