La grosse fatigue des démocrates-chrétiens belges
La grosse fatigue des démocrates-chrétiens belges
De notre correspondant Max HELLEFF (Bruxelles) - Les partis «chrétiens» belges ne brillent pas par leur forme. L’ex-Parti social-chrétien (PSC), qui avait tourné le dos à la croix en devenant au début du millénaire le cdH (Centre démocrate humaniste), vient à nouveau de changer de nom pour devenir «Les Engagés». Il voit dans cette refondation, couplée à une cure d’opposition aux différents niveaux de pouvoir, la possibilité d’un rebond.
Mais c’est surtout au nord que les choses prennent une tournure dramatique. Le parti chrétien-démocrate flamand (CD&V) boit carrément le bouillon. Un sondage de la chaîne publique VRT le donne à 8,7 % des intentions de vote, contre 15,4 % des suffrages aux élections régionales de 2019. Ce score en fait la lanterne rouge des formations politiques flamandes, derrière les communistes du PVDA. Du jamais-vu.
Un homme a décidé de tirer les conclusions de ce naufrage : Joachim Coens, le président du CD&V, va démissionner. Il évoque un «sondage trop dramatique» - qui en confirme d’autres.
Un parti à la ramasse
En Flandre comme souvent ailleurs, la démocratie-chrétienne est à la ramasse. Mais le CD&V paie aussi le fait de s’être allié il y a une quinzaine d’années à un petit parti qui allait devenir très vite un incontournable de la politique belge: la N-VA de Bart De Wever. Plus flamande, plus rageuse contre la Belgique francophone, plus anti-immigration, servie de surcroît par un homme habile et manœuvrier. Pour bien des analystes, De Wever, qui n’a jamais pris de responsabilités au fédéral, fut le véritable Premier ministre du gouvernement Michel (2014-2018). Le CD&V en fit partie lui aussi, mais en demi-teinte, aux côtés des libéraux francophones et flamands.
La N-VA a rejoint à la fin 2018 l’opposition, mais le CD&V n’a pas pour autant tiré parti de cette mise en retrait du pouvoir. Il est de surcroît l’objet de querelles internes. La dernière a opposé le président Coens à «son» ministre régional Wouter Beke. Ce dernier avait eu la malencontreuse idée de suggérer de limiter le congé parental non plus au douzième anniversaire de l’enfant, mais au troisième seulement. Pour un parti qui met la famille et ses valeurs au centre de son programme, une telle suggestion faisait assurément tache.
Un jeune atout en remplacement
Le successeur de Joachim Coens pourrait être Sammy Mahdi, l’actuel secrétaire d’Etat à l’Asile et la Migration. Un homme jeune encore, issu de l’immigration, mais qui n’hésite pas à prendre des décisions difficiles contre ces nouveaux arrivants qui font tellement peur à une certaine Flandre. Le tout en se mettant en poche les partis progressistes de la coalition Vivaldi du Premier ministre Alexander De Croo.
Mahdi est doté d’un sens évident de la communication. Il a déjà été candidat à la présidence du parti, mais les membres lui avaient préféré de peu Joachim Coens. Ils avaient ainsi choisi le profil le plus conventionnel, technocratique et quelque peu raide, qui aujourd’hui ne séduit plus les jeunes électeurs. Mahdi, lui, veut un CD&V plus social - le socioéconomique revient en force - mais aussi plus conservateur sur le plan culturel et sociétal.
Et pour le reste, le Vlaams Belang (extrême droite) est toujours le premier parti de Flandre, selon le sondage VRT. Un parti castré puisqu’il ne gouverne pas, suivi de peu par la N-VA. Les socialistes de Vooruit – servis par le très christique ministre de la Santé Frank Vandenbroucke – sont troisièmes. L’Open VLD du Premier ministre De Croo stagne aux alentours de 10 % des intentions de vote. A peine mieux que le CD&V. Alexander De Croo est pourtant l’un des hommes politiques les plus populaires du pays.
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