La Belgique réduit sa stratégie de tests
La Belgique réduit sa stratégie de tests
De notre correspondant, Max Helleff (Bruxelles) - Perseverare diabolicum… La Belgique a-t-elle de nouveau commis une lourde erreur dans sa gestion de la pandémie. En cause: un manque de capacité de tests qui lui impose dès ce mardi de ne plus dépister que les cas symptomatiques. «Pas de symptômes, pas de test», répètent à l’unisson politiques, médecins et laboratoires.
De nombreux témoignages venus des centres de dépistage et de la médecine de première ligne dénoncent une saturation totale. Ce généraliste liégeois évoque parmi d’autres des journées entières passées à glisser les écouvillons des tests PCR au fond des narines afin d’y détecter le virus. Le covid étant désormais partout, certains patients se sont déjà fait tester plus de dix fois, contribuant à l'engorgement des laboratoires.
De 24 à 48 heures, le délai d’obtention des résultats est parfois passé à 4 ou 5 jours, avec pour conséquence que la quarantaine est postposée et que le porteur du virus a tout loisir de continuer à contaminer son entourage. Certains labos ont donc décidé d’eux-mêmes de faire le tri entre les «vrais» malades et les autres.
Lundi, les ministres de la Santé et le «commissaire coronavirus» Pedro Facon n’ont eu d’autre choix que de revoir la stratégie de dépistage actuelle, au moins jusqu’au 15 novembre. Les personnes asymptomatiques ne seront plus testées, mais devront se mettre en quarantaine pendant 10 jours.
«On teste beaucoup, mais comme il y a énormément de malades, il y a un moment où les labos ne suivent plus, les êtres humains qui sont derrière non plus», a expliqué la ministre wallonne de la Santé Christie Moreale. «Et donc, il faut qu’on prenne le temps, quinze jours-trois semaines, de faire descendre la pression, de s’assurer que le service suive, que les résultats arrivent à temps. On a décidé de réorganiser le testing en priorisant.»
Seules les personnes avec symptômes, les membres du personnel soignant, les plus de 65 ans et les collectivités dans lesquelles il y a au minimum deux contaminations avérées pourront désormais être testées.
Cette nouvelle tombe au plus mauvais moment. La pandémie atteint des pics inégalés jusqu’ici dans le pays, les 10.000 contaminations par jour étant dépassées. Un moindre dépistage menace de rendre partiellement inopérantes les mesures de reconfinement entrées en application ce lundi 19 septembre, à savoir la fermeture des restaurants, le recours élargi au télétravail ou encore le passage en mode distanciel des cours universitaires.
Ce couac renvoie la Belgique aux premières heures de la pandémie, lorsqu’en mars dernier elle s’est aperçue qu'elle ne disposait pas du matériel le plus élémentaire pour se protéger. A l’époque, les tests, les masques ou encore le gel hydroalcoolique étaient inexistants. Chaque pénurie trahissait des années de désinvestissement dans les soins de santé, conséquence de la mise à la diète de la sécurité sociale imposée par les gouvernements successifs.
La presse cherche des responsables. Elle pointe un haut fonctionnaire zélé qui aurait renoncé à une commande durant cet été en prétextant du respect des règles de marchés publics. D’où un retard dans l’arrivage de machines commandées par le gouvernement fédéral pour augmenter la capacité de tests, laquelle atteint péniblement aujourd’hui la moitié des 100.000 dépistages quotidiens annoncés.
Le gouvernement De Croo refuse toutefois de céder au pessimisme. Le tout nouveau «commissaire coronavirus» Pedro Facon estime que la seconde vague est la conséquence d’un «relâchement collectif», plutôt qu’un échec des politiques, experts et citoyens…
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