L'exode wallon vers les campagnes se poursuit
L'exode wallon vers les campagnes se poursuit
De notre correspondant Max HELLEFF (Bruxelles)
Les villes wallonnes se font moins attractives, en tout cas pour ceux qui ont la possibilité de choisir l'endroit où ils veulent vivre. Au milieu de la décennie précédente, ce désamour avait déjà été relevé pour les tranches d'âge supérieures à 25 ans.
Une nouvelle étude de l'Institut wallon de l'évaluation, de la prospective et de la statistique (Iweps) conclut que «Liège, Namur, Mons et Charleroi continuent à subir un processus de périurbanisation, la population quittant la ville pour gagner des communes rurales toujours plus loin». En tout, 59 communes (sur 262) présentent un solde migratoire interne négatif depuis cinq ans. Avec quelque 10.000 habitants en moins, Liège détient la palme. Charleroi (-2.634) et Mons (-1.121) suivent à plusieurs longueurs. Namur, la capitale de la région wallonne, s'en sort bien (-8).
L'Iweps estime que «ces mouvements correspondent aux migrations de jeunes adultes avec enfants recherchant un cadre de vie moins urbain et plus spacieux. On constate également un déficit pour les personnes âgées qui ne privilégieraient pas certaines grandes villes».
Se protéger du bruit et de la pollution
Cette analyse rejoint un certain nombre d'observations déjà dressées pendant la crise sanitaire, moment où nombre de Belges confrontés au confinement ont recherché davantage d'espace. Ils ont souvent quitté la ville pour la campagne, entraînant une hausse des prix de l'immobilier en des lieux jusque-là peu courus. Avec pour conséquences que les locaux n'ont plus toujours les moyens d'acquérir un logement dans leur propre village.
Cette migration va à rebrousse-poil de la politique territoriale wallonne. La volonté est, en effet, de concentrer à l'avenir 75 % de l'urbanisation dans les zones de centralité, autrement dit là où l'habitat est déjà dense. Mais vivre dans des villes au lourd passé industriel comme Liège ou Charleroi peut rebuter des jeunes couples comme des seniors à la recherche d'un endroit protégé du bruit et de la pollution. Cela en dépit des efforts que font les bourgmestres pour tenter d'améliorer la qualité de vie dans les grandes agglomérations.
Hors Wallonie, Bruxelles connaît une situation assez proche. Son centre comme sa région assistent également au départ de milliers d'habitants.
Proposer des logements neufs
Mais ce phénomène migratoire n'est pas irréversible. L'inflation qui frappe la construction et les énergies pourrait ramener une partie de la population wallonne vers les villes. «Certains projets en périphérie vont passer à la trappe et seront moins avantageux aux yeux des gens qui voudront ou devront peut-être se passer de leur voiture», analyse l'urbaniste Joël Privot (ULiège) dans les colonnes du Soir qui consacre un dossier à ces migrations intérieures.
En attendant, pour donner le change, certaines cités optent pour la mise à disposition de milliers de logements neufs - c'est le cas de Liège; Charleroi parie sur le retour de la nature en ville et un habitat plus attractif; etc.
Il importe aussi de préciser que cette érosion démographique est compensée par l'arrivée de migrants internationaux. Ce n'était pas le cas il y a vingt ans.
En octobre dernier, le même institut Iweps pointait une autre réalité. Il concluait que l'enchevêtrement des crises - covid-19, inondations, guerre en Ukraine et inflation galopante – «affecte l'ensemble de la population et provoque une détérioration qualitative et quantitative de la situation de nombreuses personnes, dont beaucoup se trouvaient déjà en situation de précarité». Aux côtés d'une Wallonie plus mobile vit ainsi une Wallonie plus pauvre que par le passé.
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