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Instantané du frontalier lorrain
International 7 min. 08.04.2014 Cet article est archivé

Instantané du frontalier lorrain

Vision presque idyllique d'une A31 en dehors des heures de pointe

Instantané du frontalier lorrain

Vision presque idyllique d'une A31 en dehors des heures de pointe
Capture d'écran StreetView
International 7 min. 08.04.2014 Cet article est archivé

Instantané du frontalier lorrain

En 2013, 1.042 emplois créés au Luxembourg sont revenus à des frontaliers français et, aujourd'hui, quasiment 80.000 d'entre eux travaillent au Grand-Duché. Une dynamique freinée par la crise mais pas stoppée. Distance maison – travail, temps passé sur les routes, choix du mode de transport, salaires : notre portrait actualisé, en quatre minutes.

Près de 80.000 frontaliers lorrains étaient recensés par le STATEC au Luxembourg fin 2013 (79.684 exactement). Ils étaient quelque 20.000 de moins en 2005. La crise a légèrement stoppé cette croissance en 2009 mais cette dernière est depuis repartie, à un rythme toutefois plus faible. Entre fin 2012 et fin 2013, 1.042 emplois ont ainsi été créés, dont 207 au troisième trimestre 2013, révèle le Conseil économique, social et environnemental de Lorraine.

Les frontaliers lorrains travaillant au Luxembourg représentaient en 2012 à peu près la moitié des frontaliers ayant un emploi au Grand-Duché.

Le principal relais de la création d'emploi

L'emploi frontalier occupait au total, en 2012, 101.520 Lorrains. Depuis 1990, leur nombre a plus que triplé. Ils représentent aujourd'hui près d'un actif sur dix résidant dans la région. Un mouvement qui, par la création de 31.100 emplois depuis 2000, a servi d'amortisseur alors que, depuis le nouveau millénaire, près de 58.000 postes ont été perdus en Lorraine.

L'eldorado luxembourgeois est toutefois lui-même touché par le chômage : au sein de la Grande Région, la hausse annuelle relative la plus forte, en novembre 2013, a eu lieu au Luxembourg où le nombre de demandeurs d'emploi a cru de 15,5% et affichait 7,1% (chiffre STATEC), contre 11,1% en Lorraine (chiffre INSEE), l'un et l'autre à des niveaux historiques.

Sur le plan du chômage, la Lorraine s’est longtemps trouvée dans une situation un peu plus favorable que l’ensemble des autres régions françaises, grâce à l’importance du travail frontalier et le départ de nombreux jeunes actifs. Mais depuis 2001, le chômage augmente plus rapidement en Lorraine. En 2012, près de 11.000 emplois ont été perdus sur un an dans la région. «Le dernier moteur de la croissance lorraine reste le travail frontalier», jugeait l'INSEE en mai 2013.

Une étude publiée fin 2011 et intitulée « Qui sont les travailleurs de la Grande Région ? » indique une tendance générale montrant que les frontaliers veulent souvent effectuer plus d'heures de travail que les actifs locaux. Cette tendance, notée par les professionnels de l'immobilier, est particulièrement marquée pour les frontaliers lorrains.

Un foyer à moins de 20 kilomètres de la frontière

Une étude publiée en 2005, intitulée « Frontaliers et marché de l'emploi transfrontalier dans la Grande Région », indique que neuf frontaliers lorrains sur dix habitent à moins de 20 km de la frontière (soit la distance jusqu'à Thionville centre). Plus de 40% des frontaliers lorrains viennent d'ailleurs à eux seuls de la région de Thionville (contre 27,4% en 1990).

Une autre, publiée sept ans plus tard et menée par le CEPS / INSTEAD, « La mobilité des frontaliers du Luxembourg : dynamiques et perspectives », estime la distance moyenne domicile lorrain – travail au Luxembourg à 40 km.

En moyenne près de deux heures sur la route

En moyenne, un frontalier (habitant la France, l'Allemagne ou la Belgique) qui utilise sa voiture pour aller au travail parcourt 44 km en 50 minutes (en semaine et en dehors des périodes de vacances) soit, quotidiennement, près de deux heures sur la route.

Les frontaliers de la Grande Région ont peu à peu tendance à privilégier les transports en commun, ainsi que le révèle cette même étude, un mouvement qui s'affirme davantage en Lorraine. Ainsi, 83% des frontaliers lorrains utilisaient leur voiture en 2010 contre 89% trois ans auparavant pour préférer le train mais surtout le bus.

Toutefois, malgré la baisse relative de l'usage de la voiture par rapport aux transports en commun, le nombre de frontaliers se déplaçant principalement en voiture a aussi connu une augmentation depuis 2007. La pratique du covoiturage restant stable, on peut en déduire que le trafic automobile frontalier a continué de croître.

Le train, quand c'est possible

En 2012, la ligne ferroviaire du sillon lorrain Metz – Luxembourg était fréquentée quotidiennement par plus de 6.000 frontaliers, soit presque le triple de la fréquentation sur la ligne Arlon Luxembourg (2.200 frontaliers entre Marloie et Luxembourg). Les frontaliers allemands, eux, utilisent moins le train.

Mais même en Lorraine, le train peut ne pas être la panacée, pourvu qu'on n'habite pas à proximité d'une gare et/ou que l'entreprise basée au Luxembourg est éloignée des gares de Bettembourg ou Luxembourg-Ville. « Metz n'est pas une ville très chère. Y habiter et prendre le train quand on est frontalier, c'est très bien quand on travaille à Luxembourg-Ville. Mais souvent, dans un couple, l'un des deux ne travaille pas dans la capitale et, pour lui, prendre le train est une aberration. C'est souvent la raison pour laquelle le couple se rapproche de la frontière. A l'inverse, tous nos clients messins qui sont célibataires et travaillent à Luxembourg restent à Metz », résume ainsi Jean-Pierre Fischer, de l'agence immobilière Benedic.

Des salaires parmi les moins élevés

En 2010, les travailleurs qui résidaient au Luxembourg avaient le salaire médian le plus élevé (46.486 euros), relève le STATEC dans un bulletin paru en 2012. Ils étaient suivis des résidents belges (43.805 euros), allemands (39.402 euros) et français (37.529 euros). L’écart salarial hommes-femmes était de 16% parmi les travailleurs résidents, de 7% parmi les frontaliers français, 5 % parmi les frontaliers belges et de 1% parmi les frontaliers allemands.

35.000 Français vivent au Luxembourg

Pour finir, combien ont décidé de passer le cap pour s'installer au Grand-Duché ? En 2013, 35.200 Français vivaient au Luxembourg, soit 6,5% des quelque 537.000 résidents. Leur part relative est la plus élevée depuis 1875. Leur nombre a triplé depuis 1981, année où ils étaient 11.900, alors l'équivalent de 3,3% de la population. Au sein des étrangers (44,5% de la population totale), ils représentaient l'an dernier la deuxième population, derrière les Portugais.

Sur l'ensemble des Français habitant au Grand-Duché, les trois quarts (73,4%) sont nés en France et moins d'un sixième (16,4%) au Luxembourg.

Enfin, près des trois quarts (72%) des Français résidant en 2011 au Luxembourg sont arrivés entre 1995 et 2011, alors que le pourcentage correspondant n'est que de 56% pour l'ensemble des immigrés. Ce qui signifie que, si l'immigration s'accélère en général, elle est encore plus importante pour les Français depuis le milieu des années 1990.

Les Français sont les plus nombreux à Luxembourg-Ville (16.490 personnes recensées en 2013). C’est également dans la capitale que leur part relative est la plus importante avec 15,86% de la population de la Ville de Luxembourg. Ils représentaient, en 2011, une petite moitié (42,8%) des Français habitant au Grand-Duché.

Dominique Nauroy


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