Haro sur les pouvoirs spéciaux en Belgique
Haro sur les pouvoirs spéciaux en Belgique
De notre correspondant Max HELLEFF (Bruxelles)- La N-VA de Bart De Wever pourrait retirer son appui aux pouvoirs spéciaux conférés en mars dernier au gouvernement minoritaire de la Première ministre Sophie Wilmès. Ces derniers jours, les déclarations des nationalistes flamands se sont multipliées sur le ton de la menace.
Peter De Roover, le chef de groupe N-VA à la Chambre, a ainsi balayé la prolongation des pouvoirs spéciaux d’un revers de la main sur la chaîne publique VRT: «Pour l’instant, je ne vois que très peu de raisons de les prolonger. Il s’avère maintenant qu’il n’y a pas tellement de mesures qui doivent être prises au moyen des pouvoirs spéciaux. On avait donné l’impression qu’il s’agissait d’une machine qui ouvrirait d’énormes possibilités, mais ce n’est pas le cas». Selon Peter De Roover, trois mois de pouvoirs spéciaux suffiront dès lors, et pas davantage.
Pour mieux comprendre cette attitude, il faut revenir en mars dernier. A défaut d’avoir réussi à former une coalition capable d’incarner le nouveau gouvernement fédéral issu des élections du 26 mai 2019, les partis politiques ont décidé de soutenir l’exécutif minoritaire en affaires courantes de la libérale francophone Sophie Wilmès. Il fallait en effet parer au plus pressé pour faire face au coronavirus.
Tous ont donc voté la confiance au gouvernement Wilmès le 19 mars, à l’exception de la N-VA, du Vlaams Belang (extrême droite flamande) et des communistes du PTB. Le 27 mars, ils en ont fait de même pour les pouvoirs spéciaux qui permettent au gouvernement de prendre des mesures dans le cadre de la crise sanitaire sans passer dans l’immédiat par le Parlement. Cette disposition vaut pour trois mois, renouvelable éventuellement une fois. Cette fois, la N-VA a choisi de s'y rallier.
La N-VA change d'avis
C’est ce compromis que la N-VA remet aujourd’hui en cause. Elle menace de ne pas accorder en juin la prolongation de trois mois qui permettrait au gouvernement Wilmès de continuer à disposer des pouvoirs spéciaux tout au long de l’été. Et donc d'avoir les armes juridiques et législatives censément nécessaires pour organiser le futur déconfinement sans s’astreindre à de longs débats parlementaires.
L'appui de la N-VA apporte une légitimité évidente aux pouvoirs spéciaux. Le parti de Bart De Wever reste en effet pour l’heure la première formation politique du pays.
La rentrée sera chaude
Par ailleurs, les nationalistes flamands ne sont pas seuls à se montrer critiques avec le gouvernement Wilmès. En coulisses, les écologistes et les socialistes bouillonnent. Ils voient d’un mauvais œil le rebond des libéraux francophones autrefois dirigés par Charles Michel à la faveur de la crise sanitaire. Ils estiment eux aussi que la prolongation des pouvoirs spéciaux fera rapidement l’objet d’âpres débats. Seule une second vague pandémique pourrait les amener à changer d’avis, à suivre certains.
Dans un registre annexe, la relance de l’économie après la crise devrait remettre en scène les oppositions idéologiques et communautaires classiques. D’un côté, des aides aux travailleurs et aux démunis censées relancer la consommation et l’activité économique. De l’autre, la mise à la diète des finances de l’Etat pour contrôler la poussée de fièvre du déficit public.
Une chose est sûre : les partis ont déjà pris rendez-vous à la rentrée pour relancer les hostilités en vue de former enfin un gouvernement fédéral de plein droit. La mise ou non sous contrôle de la pandémie fixera en bonne partie le timing des discussions politiques à venir.
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