Haro sur les mesures énergie du gouvernement De Croo
Haro sur les mesures énergie du gouvernement De Croo
Par Max HELLEFF (Bruxelles)
Le Premier ministre Alexander De Croo pensait avoir trouvé la formule idéale en rassemblant les principaux niveaux de pouvoir dans un «comité de concertation» consacré à l'allègement de la facture énergétique des Belges. Mercredi, il pouvait ainsi annoncer une série de mesures censées permettre à tous d'affronter l'hiver en étant mieux armés, sans pouvoir toutefois promettre de «solution miracle». Depuis, les critiques ne cessent de fuser.
Parmi ces mesures, on retient le maintien du tarif social pour un million de ménages et la TVA à 6% (au lieu de 21%) sur le gaz et l’électricité jusqu’à la fin mars. Le soutien des investissements dans les panneaux solaires, chaudières et pompes à chaleur est prolongé.
Alexander De Croo et ses partenaires veulent également étendre l’actuelle taxe nucléaire – qui rapporte 750 millions d’euros à l’Etat annuellement – à d’autres entreprises du secteur énergétique générant des bénéfices très élevés. Cet argent devra aider les ménages de la classe moyenne, qui ne bénéficient pas du tarif social, à payer leurs factures. Il est aussi question de négocier avec les banques le report de paiement pour les crédits hypothécaires lorsque les factures énergétiques sont trop lourdes pour les emprunteurs.
Les esprits s'échauffent
Ces décisions - qui consistent essentiellement à prolonger des mesures actuelles - n’ont pas réussi à calmer les esprits. L'association de consommateurs Test-Achats a ouvert le feu en demandant que les fournisseurs de gaz et d'électricité réintègrent les contrats fixes, les tarifs variables imposés ces derniers mois mettant l'économie des ménages en grand danger. «Il est temps de faire preuve de courage politique!», assène Julie Frère, la porte-parole de Test-Achats.
Les revendications ne se limitent cependant pas aux plus fragiles. Dans les colonnes de L'Echo, le patron de la Fédération des entreprises de Belgique (FEB), Pieter Timmermans juge que la situation nécessite de lancer sans tarder une grande concertation qui engloberait les grands dossiers économiques (énergie, marché du travail) mais aussi sociaux. Le message vaut pour le gouvernement, mais également pour les syndicats.
Pieter Timmermans prévient : «Le remède passera par des mesures rapides et qui nous engagent sur le long terme. Des mesures «corona-like» peuvent certes aider à soulager la douleur (comme la facilitation du chômage pour les indépendants, les reports de cotisation…) mais ne suffiront pas. On est dans une crise différente du covid, beaucoup plus profonde. La crise de l'énergie affecte plus largement l'économie, elle se répand comme une tache d’huile et il n'y a pas de vaccin à espérer. »
L'opposition s'en donne à coeur joie
L’opposition parlementaire s'en donne elle aussi à cœur joie. Le parti Défi (libéral-social) et Les Engagés (ex-humanistes) passent à la moulinette les mesures annoncées. Pour Raoul Hedebouw, le leader du PTB communiste, il n'y a «aucune nouvelle mesure pour nos factures… La seule chose nouvelle qu'on apprend, c'est qu'ils (la majorité) trahissent leur promesse («personne ne s’enrichira»): ils ne toucheront pas aux milliards de surprofits d'Engie Electrabel. C'est une honte!»
Les partis qui composent la coalition Vivaldi d'Alexander De Croo bottent en touche. «Après un premier pas, d'autres mesures seront discutées dans le cadre du conclave budgétaire», promet ainsi la socialiste wallonne Christie Morreale. Le ministre fédéral de l'Economie et du Travail, le socialiste Pierre-Yves Dermagne, annonce déjà la prolongation du chèque mazout jusqu'au 31 mars 2023. Le libéral David Clarinval explique pour sa part vouloir inclure la classe moyenne dans les mesures de soutien.
Un appel du pied à l'Europe
Tous ont le regard tourné vers l’Europe. C'est à elle qu’Alexander De Croo s'est longuement adressé au cours du Codeco de mercredi. Il l'incite à bloquer le prix du gaz. Si le Premier ministre belge se dit conscient que «les mesures n'aident pas tout le monde, le blocage (européen) représente en revanche la mesure la plus urgente et la plus efficace pour alléger la facture des consommateurs». Il met clairement la pression en vue de la réunion des ministres de l'Energie de la semaine prochaine.
«Depuis mars, explique-t-il encore, la Belgique plaide pour ce système (de blocage). Au début, peu de pays y croyaient, mais on voit aujourd'hui que de plus en plus de pays le font. Même la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen s'est exprimée en début de semaine sur le fait que des interventions sur le marché du gaz européen étaient nécessaires».
La balle est clairement dans le camp de l'UE…
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