Douze bombes atomiques pour la Belgique
Douze bombes atomiques pour la Belgique
(Max Helleff) La Libre Belgique et De Morgen viennent de réveiller un vieux serpent de mer en diffusant des extraits d’un document issu de l’assemblée de l'OTAN. Dans ce «projet de rapport» daté du 16 avril, ces lignes ont interpellé : «Dans le contexte de l'OTAN, les Etats-Unis déploient environ 150 armes nucléaires, en particulier des bombes gravitationnelles B61, en Europe, à bord d'avions à double capacité, à la fois américains et alliés. Ces bombes sont stockées dans six bases américaines et européennes – Kleine-Brogel en Belgique, Büchel en Allemagne, Aviano et Ghedi-Torre en Italie, Volkel aux Pays-Bas et Inçirlik en Turquie».
Mais le 11 juillet, le document a disparu du web pour être remplacé par une version corrigée. Celle-ci stipule toujours que «dans le contexte de l'OTAN, les États-Unis déploient environ 150 armes nucléaires (…) à bord d'avions à double capacité…» C'est ici qu'intervient la correction: «Les alliés européens souvent cités comme exploitant de tels avions sont la Belgique, l'Allemagne, l'Italie, les Pays-Bas et la Turquie».
Autrement dit, le premier projet de rapport présentait la Belgique et les autres pays nommés comme des Etats abritant la «bombe» – en contradiction apparente avec l'article 2 du Traité de non-prolifération des armes nucléaires.
Secret absolu
La seconde version se contente de préciser qu'ils possèdent des avions susceptibles de la transporter. Le subterfuge n'a pas échappé à un député Ecolo qui s'est fait fort d'alerter la presse. Et pour cause: la présence de bombes atomiques en Belgique qui fut par le passé à l'origine de manifestations antinucléaires semble bien réelle. Un secret de Polichinelle jamais officiellement confirmé.
Le «draft» incriminé a manifestement fuité d'une réunion de l'OTAN qui s'est tenue du 31 mai au 3 juin dernier, à Bratislava. A priori, il ne représente que les vues du rapporteur général. Toutefois, le secret absolu sur la localisation des arsenaux de l'Alliance atlantique s'applique aussi à son assemblée.
Redoutable privilège
Quoi qu'il en soit, le rapport apporte au moins deux informations. Un: les Belges – mais aussi leurs voisins directs – ont le redoutable privilège de côtoyer une nouvelle génération de bombes atomiques. De «faible puissance», la B61-12 peut être guidée et non plus seulement larguée. Coût total de sa production aux Etats-Unis: entre 7,5 et 10 milliards de dollars.
Douze de ces nouvelles bombes sont ou seront stockées à Kleine-Brogel (sur les 150 destinées à l'Europe contre 240 engins nucléaires de vieille génération).
Ni démenti, ni confirmé
Deux: le F-35 que la Belgique vient d'acquérir sera adapté par son constructeur Lockheed Martin afin de tirer la nouvelle B61-12. Coïncidence? Tout au long du marché public qui a encadré l'achat du nouvel avion, il a été reproché au gouvernement Michel d'avoir lancé un appel d'offre taillé sur mesure pour le chasseur bombardier américain F-35, seul avion à disposer de la technologie nécessaire pour le transport de la bombe atomique… américaine.
Priées de s'expliquer, les autorités belges n'ont ni démenti, ni confirmé la présence d'un arsenal nucléaire de dernier cri à Kleine-Brogel, dans le Limbourg.
L'an dernier, à Bruxelles, l'OTAN avait souligné que la dissuasion nucléaire atlantique repose «également» sur les bombes américaines déployées en Europe et sur les infrastructures mises à disposition «par les Alliés concernés», y compris les «avions à double capacité». Même de «faible puissance», l'arme atomique semble bien faire son retour en grâce.
