Des épines pour la rose belge
Des épines pour la rose belge
De notre correspondant Max HELLEFF (Bruxelles) - Le ronron des discussions politiques qui doivent mener à la formation du futur gouvernement fédéral belge s'est subitement mis à hoqueter, pour la plus grande joie du président de la N-VA Bart De Wever.
Depuis plusieurs semaines, il n'était plus question que d'une coalition arc-en-ciel (socialistes, écologistes, libéraux) qui, en gagnant l'appui des chrétiens-démocrates flamands, aurait disposé d'une majorité confortable à la Chambre. La N-VA en serait exclue.
Mais Bart De Wever a plus d'un tour dans son sac. Le week-end dernier, il a proposé une «politique sociale forte» et le «relèvement des petites pensions». Tous les analystes y ont vu un appel du pied au PS, avant de comprendre que ce ne sont pas seulement les socialistes francophones, mais également les socialistes flamands du SP.A transformés en appâts que visait le nationaliste.
En nouant une alliance avec les «rouges» du nord et du sud du pays, ainsi qu'avec les libéraux francophones et les chrétiens-démocrates flamands, la N-VA pourrait se targuer d'avoir réussi à former une coalition forte de 80 députés (sur 150).
Dispute publique
Bart De Wever s'est trouvé des partisans de première classe chez deux ex-ministres socialistes flamands: Johan Vande Lanotte et Freya Van den Bossche pour qui «le parti n'est pas "scotché" au PS francophone». Entre socialistes des deux côtés de la frontière linguistique, on s'est alors regardés en chiens de faïence. Les rouges francophones se sont rappelé que leurs cousins flamands sont associés à Bart De Wever à la tête de la ville d'Anvers. Et s'ils voulaient répéter cette alliance contre nature au fédéral?
Depuis, c'est le grand rétropédalage. L'ancien président du parti socialiste flamand Bruno Tobback vient de déclarer qu'on a «l'habitude que Bart De Wever hypnotise la presse flamande». Il estime que le leader de la N-VA ne propose rien de sérieux, mais essaie seulement de faire traîner la formation d'un gouvernement fédéral. La Belgique «a besoin d’une politique de centre-gauche pour mettre de l'ordre dans l’économie du pays notamment», précise-t-il.
Quant à Georges-Louis Bouchez et Joachim Coens, les deux informateurs royaux, Bruno Tobback les qualifie d'«infor-machins». «Qu'ont fait ces deux messieurs? Je n'ai vu aucun projet, aucune ambition mais bien des manoeuvres pour freiner, retarder avec Bart De Wever, qui essaie de jouer un peu», ajoute-t-il. Ambiance.
Il reste que le bord socialiste se serait bien passé de cette dispute publique. Gouverner avec la N-VA reviendrait en effet à prendre un risque énorme pour les socialistes francophones. Non seulement, ils seraient lâchés illico presto par leurs alliés écologistes, mais en plus ils se mettraient en porte-à-faux avec leurs électeurs. Cela reviendrait à «s'engager dans une négociation qui aurait de bonnes chances d'échouer, à s'exposer ainsi à une vraisemblable sévère sanction populaire en cas d'élections anticipées», écrit Le Soir.
Et puis, il y a les valeurs socialistes… Officiellement en opposition totale avec celles de la N-VA. Quoique… Le bourgmestre PS de la commune bruxelloise de Saint-Josse est au cœur de la polémique depuis une semaine. D'origine turque, Emil Kir a rencontré une délégation de maires venus d'Anatolie parmi lesquels figuraient deux membres du MHP, parti ultranationaliste d'extrême droite. Kir a été dénoncé auprès du comité de vigilance de son parti. Il a depuis émis de vagues regrets. Il attend la décision du PS bruxellois qui se serait bien passé d'une telle publicité.
