Dernière ligne droite pour la loi Pandémie belge
Dernière ligne droite pour la loi Pandémie belge
De notre correspondant Max HELLEFF (Bruxelles) - Le 30 mars dernier, un tribunal bruxellois avait ordonné à l’Etat belge de mettre fin aux mesures exceptionnelles prises dans le cadre de la pandémie, et ce dans les trente jours. Il avait estimé que l’exécutif ne pouvait pas travailler par arrêtés ministériels et mener la lutte contre le covid sans réelle base légale. L’action avait été lancée par la Ligue des droits humains (LDH) et son équivalent flamand, la Liga voor Mensenrechten. L’Etat avait fait appel.
Il y a une semaine, le texte de «loi Pandémie» de la ministre de l’Intérieur Annelies Verlinden a été approuvé par le Conseil des ministres après la prise en compte des différents avis requis. Lundi soir, c’était au Parlement de se saisir de ce projet de loi qui donne une véritable assise juridique aux mesures de restriction prises dans le cadre de la crise sanitaire depuis mars 2020.
Entre-temps, le texte a fait l’objet de critiques du Conseil d’Etat, critiques qui ont conduit le gouvernement à y aller de quelques adaptations. La disposition sur le traitement des données privées posait notamment problème. Elle a été retirée par la ministre Verlinden, quitte à prévoir ultérieurement «un cadre légal adéquat pour autant que cela soit nécessaire».
Pas assez de place pour l'avis des députés
Désormais, selon ce projet de loi, les mesures sanitaires seront «en principe prises par arrêté royal» et une concertation préalable entre le fédéral et les entités fédérées (Régions et Communautés) sera de rigueur si elles sont de nature à avoir un impact sur des domaines politiques qui relèvent de leurs compétences. Un débat parlementaire sera également possible lorsque des dispositions sanitaires seront prises. L’absence du Parlement dans ces décisions était en effet déplorée par les défenseurs des droits humains et par l’opposition au gouvernement De Croo.
Lundi soir, la commission de l’Intérieur de la Chambre a approuvé en première lecture, et après de longs débats, le projet de loi. Mais le vote en plénière a été reporté. Les communistes du PTB, rejoints par les nationalistes flamands (N-VA) de Bart De Wever, ont demandé une deuxième lecture.
Pour Peter De Roover, le chef de file des nationalistes flamands à la Chambre, le projet de loi Pandémie n’offre toujours pas de garanties «en termes de contrôle parlementaire et contre d’éventuelles dérives (…) Aucune. Les juristes ne sont pas tous d’accord là-dessus, mais une partie d’entre eux met en garde, et c’est suffisant selon moi pour ne pas laisser passer le texte. Quid à l’avenir si, d’aventure, après je ne sais quelle séquence politique, nous devions avoir un gouvernement plus autoritaire, «illibéral»? Nous serions piégés, avec cette loi Pandémie», estime-t-il dans les colonnes du Soir.
Dans une carte blanche, deux juristes regrettent précisément que le projet de loi «ne renouvelle pas le modèle de gouvernance actuel, celui qui n’a convaincu ni la population ni les responsables chargés de l’appliquer, parce qu’il reste trop rigide pour faire face aux questions émergentes». Un autre de ses torts serait de ne pas prendre en compte «l’augmentation des inégalités socioéconomiques, les tendances sécuritaires et les processus de multi-discrimination, l’adoption de nouveaux comportements en matière de consommation, de communication ou de travail».
Ces réticences ne devraient toutefois pas entraver le vote en plénière. La majorité fait corps autour de ce texte qui doit légitimer son action sanitaire passée et future.
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