Cattenom veut tourner jusqu'en 2050
Cattenom veut tourner jusqu'en 2050
Non, la centrale nucléaire de Cattenom n'a toujours pas l'intention de fermer, au grand dam de ses voisins allemand et luxembourgeois. Son directeur Thierry Rosso poursuit les travaux et contrôles de rigueur afin de prolonger la vie de la deuxième centrale de France en puissance installée. «Cattenom veut s'inscrire dans la durée, au-delà de 40 ans et vise 60 ans», a-t-il rappelé au début de la conférence de presse annuelle, mercredi matin.
La question de la fermeture de cette centrale voisine du Grand-Duché revient régulièrement sur le devant de la scène politique. Elle est même une priorité du gouvernement luxembourgeois pour les cinq prochaines années. Ce point a été abordé lors de la visite de François Hollande en mars 2015, puis à nouveau lors de la venue de son successeur, Emmanuel Macron en août 2017. Entre-temps, en mai 2016, la ministre de l'Environnement, Ségolène Royal, avait annoncé la fermeture de trois centrales dont Cattenom.
«C'est de la politique et ce n'est pas mon travail. Je suis un industriel», martèle Thierry Rosso sur un ton ferme, légèrement adouci par son accent du Gers. Il ajoute que la part du nucléaire en France est amenée à diminuer, puisque l'objectif est d'atteindre 50% (contre 75% aujourd'hui) d'ici à 2035 (objectif initialement annoncé pour 2025), mais pas question de fermer Cattenom qui fournit «65% des besoins en consommation du Grand Est», une région où sont implantées «de nombreuses industries».
«Le Luxembourg importe 80% de son électricité. Elle vient bien de quelque part!» a poursuivi le directeur du site, un brin ironique, à la question d'un confrère luxembourgeois à propos de la fermeture du site. Selon un rapport de l'ILR (institut luxembourgeois de régulation), le Grand-Duché importe exactement 86,6% de son électricité. Sa provenance exacte est difficile à déterminer: si le Luxembourg importe principalement d'Allemagne, cette dernière est également cliente de la France.
Sécurité et maintenance
«On se prépare à gérer l'improbable»: Thierry Rosso, doté du sens de la formule, explique que certaines des installations de sécurité sont superflues au regard de la situation géographique de Cattenom, vraisemblablement isolée du risque sismique - «Le dernier séisme remonte au 13 avril 1733 à Clervaux avec une magnitude de 4,8 sur l'échelle de Richter».
Les quatre réacteurs de 1.300 mégawatts chacun ont été installés entre 1986 et 1991 et subissent tour à tour opérations de maintenance et visite décennale, selon un cahier des charges qui évolue avec le temps… et les événements. Ainsi, le tragique accident nucléaire de Fukushima a entraîné la mise en place d'un programme de contrôles supplémentaires, d'amélioration des installations et de modernisation pour parer à toute éventualité: séisme, tempêtes, attaques…
Faire face au réchauffement climatique
Deux opérations programmées en 2018 ont entraîné l'arrêt des unités de production un (de février à avril) et trois (avril à mai) pour rechargement du combustible et maintenance courante, ainsi que la visite décennale de l'unité de production deux. La troisième visite décennale s'achèvera en 2023; la quatrième débutera en 2026. Ces gros chantiers garantissent le fonctionnement de la centrale pour dix ans supplémentaires.
Enfin, le réchauffement climatique fait lui aussi partie du programme et le site se protège des tempêtes, «amenées à être plus fréquentes», et a aussi «augmenté la capacité de ventilation et de climatisation des salles des machines» en raison de «l'augmentation des périodes de canicule».
L'argument environnemental
«La production électrique en France est sept fois moins carbonée que la moyenne européenne», poursuit le directeur, qui enchaîne sur la recommandation émise par le GIEC (IPCC) pour qui «maintenir le réchauffement planétaire en dessous de 1,5°C nécessite une forte augmentation de la production d'énergie nucléaire».
Rôdé à l'exercice face aux questions des journalistes, il estime que la défiance envers le nucléaire est «historique» parce que c'est un domaine «mal connu, abordé à travers un prisme idéologique avec de l'émotion, donc pas rationnel.»
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