Les communes wallonnes dans le rouge
Les communes wallonnes dans le rouge
De notre correspondant, Max HELLEFF (Bruxelles) - L’autonomie communale a un prix, et celui que devraient payer à l’avenir les communes wallonnes sera conséquent. Pourtant, en 2020, celles-ci auraient dû sortir la tête hors de l’eau : 342 millions d’euros étaient promis à être épongés moyennant des mesures d’assainissement prises par le Fédéral et par la Région wallonne. Aujourd’hui, bien au contraire, les experts estiment que la crise du covid-19 plombera les finances des communes à hauteur de 180 millions d’euros. Ce déficit pourrait monter à 300 millions en 2021.
Mais il n’y a pas que les pertes traditionnellement imputées aux crises qui malmènent les finances communales. «Si les habitants de ce Royaume sortent couverts ces jours-ci, constate Le Soir dans un éditorial au picrate, ils le doivent essentiellement à leur bourgmestre, à leur commune, au budget de celle-ci, qui n’en demandait pourtant pas tant.»
Ce sont en effet les communes qui doivent aujourd'hui fournir à leurs habitants une partie des masques nécessaires à la bonne marche des différentes phases de déconfinement. L’absence de stocks suffisants imputée à la mauvaise gestion fédérale a été en partie palliée par le niveau local. Il faut y ajouter la multiplication des interventions de police, le soutien aux écoles, l’information de la population… autant de missions qui ont un coût et dont se seraient bien passées celles que l’on nomme parfois ici à la française les «municipalités».
Cette montée en flèche des dépenses devrait se répercuter sur les taxes communales dans les années à venir. Mais pas seulement : en Belgique, ce sont les communes qui gèrent en bonne partie la précarité de leurs concitoyens via les Centres publics d’aide sociale (CPAS). Or ceux-ci sont de plus en plus sollicités, notamment par les jeunes. Question : comment feront-ils demain pour soutenir les plus démunis à défaut d’un budget suffisant?
Pour faire face à cette situation, des «mesures dérogatoires exceptionnelles» viennent d’être annoncées par le ministre régional en charge des Pouvoirs locaux, le socialiste Pierre-Yves Dermagne. L’une d’elles n’est pas passée inaperçue : les communes pourront «présenter un budget déficitaire à l’exercice propre de l’ordre de 3% maximum pour 2020 et de 5% maximum pour 2021».
Elles pourront également utiliser les réserves et provisions constituées lors des années antérieures, voire recourir à l’emprunt si la trésorerie manque. Jusqu'à 100 euros empruntés par habitant pour financer des plans de relance destinés notamment à aider les ménages et les entreprises.
Négocier avec un gouvernement, en affaires courantes ou muni de pouvoirs spéciaux, ne sert à rien.
André Antoine
Certains voient dans cette bouée de secours une réponse au «waterboarding» (simulacre de noyade) qui aurait été jusqu’ici imposé aux communes par le niveau fédéral, via des rentrées fiscales moindres mais aussi par le financement annoncé de nouvelles missions. Dans les colonnes de L’Echo, le député humaniste André Antoine y voit l’opportunité de sceller enfin une «paix fiscale». «L’État qui ne respecte pas la neutralité budgétaire de ses décisions sur ses pouvoirs subordonnés se saborde lui-même», juge-t-il. Et l’ex-ministre d’y aller d’un croc-en-jambe au gouvernement fédéral de la libérale Sophie Wilmès : «Négocier avec un gouvernement, en affaires courantes ou muni de pouvoirs spéciaux, ne sert à rien.»
Une manière comme une autre de dire qu’un an après les élections du 26 mai 2019, la Belgique a besoin d’un gouvernement de plein droit pour gérer l’après-crise sanitaire et remettre l’église au milieu du village…
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