Bertogne et Bastogne veulent s'unir
Bertogne et Bastogne veulent s'unir
De notre correspondant Max HELLEFF (Bruxelles) - Ce qui se passe au nord de la frontière belgo-luxembourgeoise en dit long sur les transformations que subissent nos régions. Bastogne et Bertogne, deux communes de la province de Luxembourg, envisagent en effet de fusionner pour ne faire plus qu'une. Ce mariage prononcé au nom de l'efficacité serait une première au sud du pays depuis 1976, année qui a vu la fusion des communes modifier substantiellement le visage institutionnel et administratif de la Belgique.
Benoît Lutgen et Christian Glaude, respectivement bourgmestres de Bastogne et de Bertogne, sont pressés. Objectif: les élections d'octobre 2024. Si leur projet passe la rampe, un seul conseil communal sortira des urnes. Le nombre d'élus sera ainsi réduit, passant de 38 actuellement à 27. La nouvelle entité comprendra 73 villages et hameaux, accueillant 20.355 habitants. Elle sera la seconde commune de la province, derrière Arlon.
Bastogne et Bertogne subissent de plein fouet la poussée démographique observée un peu partout en Belgique. La vie et l'économie y sont fortement influencées par les échanges interfrontaliers avec le Grand-Duché qui joue également ici un rôle d'aimant. Les deux communes partagent déjà les mêmes canton, arrondissement, zone de police et de secours, société de logements et maison de tourisme. Avec autant de points communs, le mariage semblerait aller de soi. « Fusionner, c'est avoir plus de moyens financiers pour plus de projets et avoir un autre poids dans maintes négociations », expliquent les deux bourgmestres – qui appartiennent tous deux au CDH, le parti humaniste. « Le Fonds des communes (NDLR : l'argent de la Région alloué aux communes) sera dopé car un des critères repose sur la densité de population. Plus elle est faible, plus le fonds aide. » Donc plus d'argent à la clé.
«Une initiative scandaleuse»
La semaine dernière, le gouvernement wallon du socialiste Elio Di Rupo a finalisé le cadre légal qui permettra les futures fusions. Plusieurs autres communes réfléchissent en effet à s'unir en divers endroits du territoire régional. Le ministre Christophe Collignon (PS), qui est en charge du dossier, affiche sa «volonté au niveau des pouvoirs locaux notamment, d'optimaliser les ressources, en mutualisant les moyens et en recherchant les économies d'échelle, soit par des rapprochements de structures locales ou en développant la supracommunalité via l'appel à projet en cours.»
Mais rien n'est encore fait. Sur place, l'opposition dit avoir été prise de court et réfute les arguments des deux bourgmestres humanistes. Dans Le Soir, son chef estime que «c'est une initiative scandaleuse et un manque de respect des institutions, de la population et surtout de la démocratie». Les adversaires du projet font valoir qu'en 1976, la fusion des communes participait d'un mouvement général, à l'échelon national, alors qu'ici elle ne serait que l'expression d'ambitions personnelles. Elle réclame une consultation populaire qui pourrait faire du dégât.
Le compte à rebours a commencé. Les communes désireuses de se marier ont jusqu'au 31 octobre prochain pour demander la publication des bans. Le gouvernement wallon aura alors deux mois pour soumettre le projet au Parlement qui se prononcera d'ici mars 2023. Si la fusion est acceptée, les majorités politiques locales auront une grosse année devant elles pour convaincre les habitants qu'elles ont pris une décision opportune. Et puis viendront les élections. Ce n'est pas gagné d'avance.
En Flandre, la fusion des communes fait aussi des émules. Tongres et Looz sont les dernières en date à avoir annoncé leur volonté de s'unir.
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