Voici où 1.400 emplois bien rémunérés sont disponibles
Voici où 1.400 emplois bien rémunérés sont disponibles
Combien de secteurs au Luxembourg comptent 1.400 emplois non pourvus ? Probablement un seul. Il s'agit du «private equity», qui signifie en anglais «capital-investissement». Pour faire simple, il s'agit de sociétés spécialisées qui rachètent des entreprises non cotées en bourse, les dynamisent et les revendent si possible avec un bénéfice après une dizaine d'années. Le tout se déroule bien entendu - comment pourrait-il en être autrement - sur la Place financière luxembourgeoise. Le secteur y emploie aujourd'hui 8.000 personnes sur les 51.000 que compte le secteur financier.
Ce secteur d'activité relativement nouveau, qui est développé de manière systématique et ciblée depuis plus de dix ans au Luxembourg, a encore d'autres superlatifs à faire valoir. Avec 509 milliards d'actifs sous gestion, le Luxembourg est le numéro un en Europe et le numéro deux dans le monde derrière les États-Unis. Le secteur connaît donc un succès similaire à celui des fonds d'investissement luxembourgeois, qui sont créés sur la Place financière luxembourgeoise et commercialisés dans le monde entier.
Avec le Brexit, les grands gestionnaires du "private equity", qui étaient basés à Londres, ont cherché un nouveau lieu où s'établir et leur choix s'est porté sur le Luxembourg.
Mais à première vue, le «private equity» n'a rien à voir avec le Luxembourg, où l'activité bancaire, pour simplifier, consiste plutôt à tenir des comptes ou à lancer des produits conformément au droit en vigueur. Le «private equity» emploie certes des collaborateurs de ces secteurs sur la Place financière, mais il va encore plus loin.
De nouvelles professions
«Avec le Brexit, les grands gestionnaires de ''private equity'', qui étaient basés à Londres, ont cherché un nouveau domicile et leur choix s'est porté sur le Luxembourg. De ce fait, de plus en plus de fonds de ''private equity'', avec leurs sociétés de gestion, sont venus s'installer au Luxembourg. C'était le grand changement dans le secteur», explique Stéphane Pesch, directeur de l'association luxembourgeoise de «private equity» LPEA.
Aujourd'hui, 18 des plus grands gestionnaires de fonds de «private equity» au monde sont basés au Luxembourg. Ils ont entraîné dans leur sillage des professions entières qui ne sont pas du tout habituelles au Luxembourg : gestionnaires de risques, évaluateurs, spécialistes en compliance, etc. Parfois, il s'agissait de responsables de départements entiers ou même de «chief financial officers». Des postes prestigieux donc, qui ont permis à la Place financière de faire un saut qualitatif.
Une ascension fulgurante pour le secteur
Le secteur a donc connu une ascension fulgurante. Celle-ci a été favorisée ces dix dernières années par le développement du marché européen et par le gouvernement, qui a transposé rapidement et efficacement les directives européennes correspondantes dans le droit national. En 2013, la loi sur les fonds d'investissement alternatifs (AIFMD) a ainsi vu le jour. Dans son sillage, d'autres véhicules d'investissement ont vu le jour en 2013 avec le «Limited Partnership» et en 2016 avec le «Reserved Alternative Investment Fund» (RAIF).
Aujourd'hui, la commercialisation des fonds de «private equity» est fortement orientée vers l'UE. Le boom du secteur l'amène à vouloir se présenter de manière plus ciblée aux politiques dans un avenir proche. «L'année prochaine, nous avons l'intention de rendre visite aux différents partis et d'échanger avec eux sur la manière dont le »private equity« s'est développé au Luxembourg et sur les possibilités qui s'offrent ici à la Place financière», explique Stéphane Pesch.
Pas pour les petits investisseurs
Le secteur annonce donc une success story. Mais au Luxembourg, le consommateur lambda qui place de temps en temps une petite somme d'argent dans sa banque en profite-t-il ? Sans doute pas dans un avenir proche. Des produits existent sur le marché, «mais nous ne parlons pas ici de possibilités d'entrée à partir de 200 ou 2.000 euros. Nous n'en sommes pas encore là et je ne sais vraiment pas si ce serait l'objectif», explique Stéphane Pesch.
C'est à chacun de décider si le modèle fera des émules au Luxembourg.
Il connaît un produit où il existe des possibilités de placement à partir de 25.000 euros. «Nous sommes donc encore loin de ce que BPI fait en France - il offre aux petits investisseurs des possibilités d'entrée à partir de 3.000 ou 5.000 euros. C'est à chacun de décider si ce modèle fera des émules au Luxembourg», laisse entendre Stéphane Pesch.
Cet investissement exigeant est dû au fait que les fonds de «private equity» sont fermés. Le gestionnaire qui a découvert une entreprise dans laquelle il souhaite investir lance un appel aux dons et collecte l'argent des investisseurs. Ensuite, le fonds est fermé et sa durée peut aller jusqu'à dix ans. Dans ce contexte, on parle d'investisseurs avertis qui prennent un engagement à plus long terme. «Ce processus serait extrêmement difficile à mettre en place avec un grand nombre de petits investisseurs - où chacun placerait par exemple 2.000 euros», explique Pesch.
Ce qui n'est pas possible pour les petits investisseurs l'est en revanche pour les clients plus aisés : ceux-ci investissent auprès de leurs banques au Luxembourg dans des produits de «private equity» qui ont été lancés sur la Place financière. «Nous parlons ici de placements d'au moins 100.000 à 125.000 euros», explique Stéphane Pesch. Les clients peuvent s'attendre à des rendements parfois élevés - douze à 18% par an n'étaient pas inhabituels ces derniers temps. En tant que complément d'un portefeuille diversifié, le «private equity» présente l'avantage de ne pas dépendre de l'évolution des bourses. Mais il existe aussi un risque de perte du capital investi.
Les autres clients pour les opérations au Luxembourg - et il s'agit là du cas normal pour le «private equity» - sont des investisseurs institutionnels tels que les grandes banques, les caisses de pension, les fonds d'investissement, les compagnies d'assurance, les «family offices», qui connaissent la complexité des fonds.
Soutenir le boom
Mais comment le Luxembourg compte-t-il faire face à la croissance des activités de «private equity» ? «Cela ne peut se faire qu'avec du personnel et de la technologie supplémentaires», dit Stéphane Pesch. Comme dans d'autres domaines financiers, les talents doivent venir du Luxembourg, de la Grande Région et d'ailleurs. Stéphane Pesch met en avant les efforts de l'entreprise. Ainsi, l'association «Private Equity» LPEA 2020 a créé une académie. Elle a développé du matériel numérique qui permet de se faire une première idée du domaine. Il a été réalisé par des professionnels au Luxembourg.
En outre, la LPEA propose, en collaboration avec HEC Liège, le «Private Equity Certificate», qui faisait autrefois partie des attributions de la «Sacred Heart University» au Luxembourg. La présence sur les salons de l'emploi fait également partie des obligations du secteur. Enfin, la LPEA a l'espoir «qu'à un moment donné, l'Université du Luxembourg proposera, avec l'industrie et d'autres partenaires, un programme de master dans le domaine des fonds et des investissements alternatifs, dont une partie pourrait être consacrée au »private equity«», indique M. Pesch.
Existe-t-il un mode d'emploi pour les personnes potentiellement intéressées par un emploi dans le domaine du private equity ? «Il suffit de se rendre à l'un de nos événements et de rencontrer nos experts. Ce n'est pas compliqué en soi et c'est très accessible». Les diplômés des filières classiques et les personnes qui changent de voie sont les bienvenus. Dans de nombreux cas, l'entrée dans la vie professionnelle se fait ainsi, estime Stéphane Pesch.
Cet article est paru initialement sur le site du Luxemburger Wort.
Traduction: Mélodie Mouzon
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