Six pistes pour relancer la construction de logements au Luxembourg
Six pistes pour relancer la construction de logements au Luxembourg
Les économistes d'Idea le rappellent bien souvent, les crises se succèdent. Après le «socialisme pandémique» et le «socialisme énergétique» découlant de la guerre en Ukraine, devrait donc logiquement survenir le «socialisme immobilier de circonstance» pour les résidents.
Et pour cause, «la crise du logement», souvent annoncée dans les notes de conjoncture et les discours politiques sur la dernière décennie, semble bel et bien se profiler, notamment en raison de la remontée fulgurante des taux d’intérêt.
Si l'on ajoute à cela «le recul prononcé (-28%) du nombre d'autorisations de bâtir délivrées sur les neuf premiers mois de l’année 2022» ainsi que «l'effondrement des ventes de logements en état futur d'achèvement (-36% au troisième trimestre 2022 en glissement annuel)», tous les voyants clignotent donc pour «annoncer un net ralentissement à venir de l'activité dans le secteur de la construction résidentielle».
Si le phénomène se précise, le risque serait alors «une perte définitive de potentiel de croissance» en raison de faillites d’entreprises de construction et/ou des difficultés de reconstitution de la main-d'œuvre, entrainant alors «l'affaiblissement durable du nombre de logements (pouvant être) construits chaque année». Le tout dans un contexte «où le parc immobilier est relativement sous-dimensionné (387 logements pour 1.000 habitants contre 468 logements pour 1.000 habitants dans les pays de l’OCDE)».
Aussi, l'économiste Michel-Edouard Ruben liste six solutions pour endiguer la situation à court terme.
1. Réintroduire les transferts de plus-value
Première mesure coup de pouce envisageable, remettre à l'ordre du jour ce qui était possible jusqu’en 2015, à savoir transférer la plus-value dégagée lors de la vente d'un bien immobilier sur un bien de remploi, à la condition sine qua non que les immeubles acquis pour le dit remploi soient neufs.
Au vu du contexte actuel, Michel-Edouard Ruben précise que «cet incitant fiscal pourrait utilement contribuer à la relance de l'investissement dans de nouveaux logements».
2. Baisser les droits d'enregistrement
Actuellement établis à 7%, les droits d’enregistrement dus suite à des mutations immobilières sont au Luxembourg particulièrement élevés en comparaison européenne.
Fait notable, ce taux est d'ailleurs figé au Grand-Duché alors qu'il a reculé de 4,4% à 2,8% en moyenne au sein de l’UE entre 2002 et 2021. Sans compter qu’au moment de son introduction, le Bëllegen Akt valait quasi-abolition des droits d’enregistrement pour de nombreux acquéreurs, mais qu’en raison de l’envolée des prix de l'ordre de +190% depuis 2002, le pouvoir d’achat immobilier de ce crédit d’impôt sur les actes notariés se trouve fortement réduit.
3. Reconsidérer le nouveau régime d'amortissement accéléré
Pour rappel, l’investissement locatif a représenté certaines années près de 50% des ventes d’appartements en état futur d’achèvement. Autrement dit, il s’agit d’un important moteur de l’activité de construction.
Là où le bât blesse, c’est lorsque l’Observatoire de l’habitat présente le ralentissement des possibilités d’amortissement accéléré prévues par la loi comme «responsable de la réduction de l’activité sur le marché du neuf en 2021». Auxquelles on peut ajouter «les nouvelles limitations introduites par la loi du 23 décembre 2022 concernant le budget pour l’exercice 2023» sur la question.
Pourtant, reconsidérer la question du nouveau régime d’amortissement accéléré serait un «signal bienvenu de nature à rassurer (et encourager) les investisseurs locatifs». Cet abattement immobilier spécial «pourrait de nouveau être accordé aux contribuables qui réalisent un bénéfice commercial, un bénéfice agricole et forestier ou un bénéfice provenant de l’exercice d’une profession libérale (comme avant la limitation décidée dans le cadre du budget 2023)».
À terme, cela soutiendrait l’activité de construction puisque «de telles décisions, de nature à alimenter l’offre locative, bénéficieraient in fine également aux ménages modestes qui, majoritairement, se trouvent dans l’incapacité d’acquérir leur résidence principale» et qui risquent fort d’être lésés par «une raréfaction de biens à louer pouvant causer des hausses significatives des loyers exigés».
4. Rehausser la «faveur fiscale» de TVA logement
Autre mesure à (re)considérer, l’adaptation du montant maximal de la TVA à l’acquisition d’un logement pour habitation principale. Présentement figé à 50.000 euros depuis 2002 (non sans avoir été porté à 60.000 euros entre 2009 et 2012), sa revalorisation serait cohérente «avec la volonté de donner un nouveau souffle à l’activité de construction via un soutien du pouvoir d’achat immobilier»; tout en tenant «compte de l’évolution de l’indice du coût de la construction depuis 2002 (+60%). De cette façon, «la faveur fiscale pourrait être portée à 80.000 euros».
De plus, en harmonisation avec la dernière réforme européenne de la directive TVA, «l’application (jusqu’à un certain seuil) du taux réduit (7%) sur les achats de logements neufs par les investisseurs bailleurs est une option à envisager».
5. Impliquer d'autres acteurs-clé
Déjà évoqué par Michel Wurth lors de la présentation du recueil de la Fondation Idea sur «La politique du logement: entre bons motifs et gros montants», il conviendrait d’inciter les entreprises à participer à une politique active du logement et à (s’)investir de façon plus significative dans le développement du parc immobilier grand-ducal.
Une possibilité à l'image «de ce que faisaient les maîtres de forge d’antan avec leurs logements de service dont la qualité est encore aujourd’hui remarquable».
6. Appliquer des mesures prévues dans le projet de loi n°7938
Enfin, à l'image «de ce qui a été fait pour la subvention loyer dans la foulée de l’accord tripartite de mars 2022», le gouvernement pourrait décider «de précipiter l’adoption de certaines mesures de soutien au pouvoir d'achat immobilier» contenues dans le projet de loi 7938 relative aux aides individuelles au logement.
Seraient concernés «l’augmentation de 30% du montant maximum de la garantie de l’État», «l’élargissement du cercle des bénéficiaires des aides à la propriété» (prime d’accession, subvention d’intérêt), sans oublier «la mise en place de la prime pour la création d’un logement intégré qui ne peut être destiné qu’à la location et doit être subordonné en surface au logement principal».
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