Le projet Fage s'attire les critiques
Le projet Fage s'attire les critiques
Produire 80 tonnes de yaourts depuis une nouvelle implantation au Luxembourg. L'agro-industriel Fage en rêve depuis 2016. Et depuis quatre ans, le projet alors soutenu par l'ancien ministre socialiste Etienne Schneider ne cesse d'accumuler les doutes (au mieux), les attaques (au pire). Et après l'enquête commodo/incommodo menée cet été, le ton reste le même. La preuve en a été donnée par les avis envoyés ce mardi à l'administration environnementale par divers acteurs publics.
Le plus critique des commentaires provient des élus de Bettembourg. Alors que l'usine est annoncée sur la Zone industrielle Wolser voisine, la commune de Bettembourg repousse l'idée. Avec déjà ce premier reproche d'avoir été consultée à la va-vite (du 28 juillet au 12 août) en plein cœur de l'été et donc sans forcément tout le temps ou les moyens de consulter l'imposant dossier présenté. Huit classeurs, 900 pages!
Voilà pour la forme, car sur la forme aussi le collège échevinal dirigé par le CSV Laurent Zeinert et dont la première échevine n'est autre que la cheffe de fraction Déi Gréng, Josée Lorsché. Le principal reproche tient dans la grande soif des installations annoncées.
Car pour assurer sa production, Fage aurait besoin d'eau. Beaucoup d'eau même. Approximativement, 2.500 m3 chaque jour. Soit deux fois plus que la seule consommation des habitants de Bettembourg. Aussi les élus s'inquiètent de la ponction sur la réserve naturelle, et particulièrement alors que les sécheresses s'annoncent plus nombreuses dans le futur.
Investissement de 100 millions d'euros
Mais en huit pages, la commune de Bettembourg aligne d'autres reproches. Comme le peu d'intérêt régional d'une telle implantation alors que, dans le même temps, les acteurs locaux tentent de promouvoir une agriculture durable et locale. Le bourgmestre veut croire que fort de ces arguments notamment le dossier capote. Il a d'ailleurs affirmé son espoir au micro de RTL : «Le gouvernement changera de position après tous les avis négatifs des citoyens».
Du côté de Dudelange, l'avis est plus mesuré. Dan Biancalana (LSAP) n'a jamais caché que voir ainsi se créer a minima une centaine d'emplois n'était pas pour lui déplaire. Et la commune se rallie à cet avis. Si le bourgmestre et son conseil émettent quelques réserves sur l'investissement estimé à 100 millions d'euros, ils se disent «a priori favorables» à la venue de l'usine Fage. Ainsi, espèrent-ils que d'ici la délivrance des permis de construire, l'industriel apporte des améliorations à son dossier. Que cela soit sur sa consommation d'eau, mais aussi sur la question du trafic poids lourds aux abords du site (déjà propriété de l'industriel).
Le potentiel d'étouffer l'Alzette
Paul Weimerskirch (CSV)
Autre acteur, autre humeur avec le représentant des sept communes membres du Contrat de rivière du bassin supérieur de l'Alzette. Son président, Paul Weimerskirch (CSV), a lui aussi rendu un avis négatif sur la possible implantation. Selon la structure intercommunale, difficile d'admettre que la rivière Alzette serait en mesure d'absorber l'eau rejetée au terme de la fabrication des produits laitiers. Même après filtration.
«Le rejet de 3.100 m3 d'eaux usées par jour d'une station d'épuration d'une capacité équivalente à près de 125.000 habitants a le potentiel d'étouffer l'Alzette», note Paul Weimerskirch au nom d'Esch-sur-Alzette, Mondercange, Sanem, Schifflange, Kayl, Bettembourg et Roeser. Ainsi, l'objectif de remettre en bon état environnemental la rivière pour 2027 serait sérieusement compromis avec la venue de l'unité Fage.
Le dossier va maintenant transiter par les services du ministère de l'Environnement pour une analyse fine. Cela alors que la ministre en personne reste toujours sceptique sur cette venue. Mais déjà, Franz Fayot (LSAP) s'est exprimé ce mardi sur les ondes de 100.7 pour rappeler que «Fage n'a pas été traité différemment de toute autre entreprise industrielle».
L'actuel ministre de l'Economie signalant aussi que si l'Etat devait financer le coût du canal de drainage d'1 km (entre l'usine et l'Alzette), cette dépense n'aurait rien d'exceptionnel. Il s'agit là de travaux habituellement pris en charge par l'Etat sur d'autres zones industrielles, Wolser ne ferait pas exception.
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