Le marché de l'emploi en phase de dégel
Le marché de l'emploi en phase de dégel
(JFC, avec Julie Edde) - Après le net fléchissement du marché du travail au Luxembourg suite à la crise sanitaire, les demandeurs d'emploi entrevoient déjà le bout du tunnel. Alors que de nombreuses entreprises avaient gelé les embauches en attendant des jours meilleurs, voilà qu'aujourd'hui des postes vacants correspondant aux premières victimes du confinement il y a trois mois réapparaissent.
Avec le déconfinement progressif, «les employés commencent à revenir au bureau et les entreprises sont en mesure de proposer des entretiens d'embauche en face-à-face», relate Maxime Durant, directeur de la société de recrutement Michael Page chez nos confrères de LuxTimes ce mercredi. Ce «alors que les cabinets de recrutement au Luxembourg ont connu une baisse de 40 à 60% de leurs activités pendant la pandémie», avance l'association industrielle Federation Recruitment Search & Selection (FR2S).
En avril, le taux de chômage s'élevait à 6,93% au Grand-Duché, soit une hausse de 1,4% en seulement deux mois. Mais d'avril à juin, le nombre de personnes bénéficiant du chômage partiel a dégringolé de 149.575 à 10.756. Un système qui prévoit que le gouvernement verse les salaires sans que les entreprises ne soient obligées de licencier le personnel. Malgré cela, les entreprises sont tentées de maintenir leurs effectifs à un faible niveau cette année pour compenser la perte de revenus due au ralentissement de l'activité. Les recruteurs se contentent juste de pourvoir aux postes vacants qui existaient avant la crise.
«Nous voyons certaines entreprises réévaluer leurs priorités et leurs besoins en personnel», fait remarquer Amandine Bianchi, directrice de Robert Half, une agence de recrutement pour les fiduciaires. «Les rôles opérationnels sont les plus demandés, alors que les postes plus stratégiques ou de gestion le sont un peu moins», ajoute-t-elle. «L'expérience en matière de restructuration d'entreprises est une compétence particulièrement prisée», relève pour sa part M. Durant. Ainsi, les avocats spécialisés dans le droit social, qui comprend l'emploi et la sécurité sociale, sont très demandés, contrairement à leurs homologues versés dans le droit bancaire et financier.
Les entreprises coupent aujourd'hui les lignes managériales
Dans des secteurs comme le marketing, la communication, l'administration et le développement des entreprises, des emplois seront supprimés cette année, mais ils devraient ressurgir en 2021. Car les entreprises chercheront à réduire le nombre de niveaux de direction, en ciblant particulièrement les cadres intermédiaires non essentiels aux opérations de base. «Les entreprises coupent aujourd'hui les lignes managériales», indique Stanislas Dutreil, directeur général de Badenoch + Clark Luxembourg, qui invoque «le coût de plusieurs niveaux de direction et la lenteur dans la prise de décision.»
Concernant les domaines des ressources humaines et de l'informatique, la situation est différente. Là, les fonctions sont très demandées depuis le début de la crise, car les entreprises doivent repenser la gestion du personnel et le travail à distance pour continuer à fonctionner. La concurrence est plus forte pour les travailleurs ayant des compétences dans les domaines du numérique, de la technologie et de la cybersécurité, car les grandes institutions bancaires ont entamé une transition vers les technologies modernes, tandis que les grandes sociétés d'audit et de comptabilité créent des départements pour traiter ces sujets.
L'augmentation des salaires a été trop rapide par rapport à la croissance des activités des entreprises
Par ailleurs, là où les entreprises avaient l'habitude, dans le passé, de se tourner vers du personnel du monde entier, les résidents luxembourgeois et les travailleurs transfrontaliers sont maintenant plus demandés. Ils sont en effet «disponibles dans des délais plus courts, avec moins de contraintes liées à la paperasserie et au déménagement des familles», explique Stanislas Dutreil.
L'évolution devrait aussi toucher les rémunérations. Comparé à d'autres pays, le marché du travail luxembourgeois est connu pour sa forte rotation et ses salaires gonflés. La crise devrait y mettre un terme, en théorie en facilitant le recrutement de personnel de haut niveau à des prix plus raisonnables par les entreprises. «L'augmentation des salaires a été trop rapide par rapport à la croissance des activités des entreprises. Certains postes sont devenus presque trop chers pour le marché, ce qui a rendu difficile pour les entreprises l'engagement de candidats déjà basés au Luxembourg», estime Maxime Durant.
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