La «grande dame» de la poésie au Luxembourg Anise Koltz est décédée
La «grande dame» de la poésie au Luxembourg Anise Koltz est décédée
Anise Koltz, la grande dame de la poésie au Luxembourg, est décédée. Comme l'a annoncé RTL dans la soirée, la poétesse est décédée à l'âge de 94 ans.
Anise Koltz a d'abord écrit en allemand. Mariée au Dr René Koltz, elle aurait continué à s'exprimer dans la langue de Goethe si son mari n'était pas mort prématurément des suites des tortures infligées par les nazis. Elle a donc décidé d'abandonner la langue des tortionnaires et de se tourner exclusivement vers celle des poètes français.
Avec son collègue poète et romancier Jean Portante, qui écrit également en français, elle était peut-être l'écrivaine luxembourgeoise la plus connue à l'étranger. Ce qui frappait surtout, c'était la force des mots dans ses courts vers de poésie, des mots qui étaient «sacrés» pour Anise Koltz et qui, comme elle le disait, «sont trop souvent malmenés par les poètes».
Elle était critique, mais aussi très modeste. En 2018, elle a reçu le prix Goncourt de la poésie, la plus haute reconnaissance française pour la poésie. Cela a attiré l'attention d'un public plus large sur son œuvre. En 2016, Gallimard a publié une anthologie de ses poèmes intitulée «Somnambule du jour». Le plus grand critique littéraire français, Bernard Pivot, président de longue date du jury du Goncourt, écrivait alors :
«Anise Koltz est une admirable, une grande poète. Si vous ne lisez qu'un livre de poésie par an, laissez-vous tenter par le choix de ses poèmes écrits tout au long de sa vie, réunis sous le titre Somnambule du jour et publiés dans la prestigieuse collection Poésie/Gallimard, qui fête ses 50 ans. Et si vous ne lisez jamais de poésie, faites un effort, procurez-vous ce recueil dont la lecture n'est pas difficile et qui vient de recevoir, puisque représentatif de toute l'œuvre, le Goncourt de la poésie, prix de consécration.»
Anise Koltz a également reçu de nombreux autres prix, les prix Batty Weber et Servais, et d'autres encore en France, le prix Guillaume Apollinaire (1998) et le prix Jean Arp de littérature française (2008).
Elle a entretenu une correspondance avec de nombreux poètes, dont les plus connus sont Hermann Hesse, Thomas Bernard et Andrée Chedid. Elle a été la fondatrice, avec son mari René Koltz, des Mondorfer Dichtertage.
Révolte et critique sociale
Au-delà de la poésie, la poétesse était également connue pour son insubordination et sa critique sociale. Une partie des ventes de l'un de ses livres, «Un monde de pierres», paru en 2015, a été reversée à des projets en Grèce, alors que le pays était victime des mesures sévères de la «troïka».
Dieu est mort, fini, fleurs et petits oiseaux.
La poésie doit témoigner des maux de notre époque. Dans l'histoire de l'humanité, il n'y a jamais eu de siècle aussi barbare que le nôtre, a déclaré l'écrivaine dans une interview, une déclaration qui s'est encore confirmée récemment avec la guerre en Ukraine. «Dieu est mort, fini, fleurs et petits oiseaux». La mort de Dieu au sens de Nietzsche était un thème récurrent dans la poésie d'Anise Koltz.
L'homme est seul face à lui-même, expliquait la poétesse, et il n'appartient pas à la poésie de fuir la réalité ou de la recouvrir de maquillage et de sourires mensongers. La poésie doit témoigner, a-t-elle ajouté. Anise Koltz a choisi les bons mots - ceux qui dénoncent aussi.
A propos de sa mort, elle écrivait par anticipation ceci : «À ma mort / je mélangerai mon corps d'argile / avec celui de l'aimé / décédé avant moi / Nous fusionnerons / une dernière fois / pour affronter / l'éternité barbare». C'est maintenant le cas. Une voix se tait, mais une œuvre reste. Une importante, une unique.
Cet article a été initialement publié sur le site du Luxemburger Wort
Traduction: Thomas Berthol
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