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Culture 4 min. 21.09.2014 Cet article est archivé
Pierre-Laurent Aimard était en concert le jeudi 18 septembre à la Philharmonie

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Pierre-Laurent Aimard estime que la partition culte de Bach n'a pas encore livré tous ses secrets.
Pierre-Laurent Aimard était en concert le jeudi 18 septembre à la Philharmonie

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Pierre-Laurent Aimard estime que la partition culte de Bach n'a pas encore livré tous ses secrets.
Marco Borggreve
Culture 4 min. 21.09.2014 Cet article est archivé
Pierre-Laurent Aimard était en concert le jeudi 18 septembre à la Philharmonie

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Les mélomanes n'auront pas manqué de le noter: Pierre-Laurent Aimard était de retour cette semaine au Luxembourg avec un programme consacré à Bach. Celui qui a été le premier artiste invité en résidence à la Philharmonie en 2005 est l'un des grands pianistes de notre temps et l'un des spécialistes les plus sollicités de musique contemporaine. Mais pas seulement. Dans un entretien, il décrypte son univers musical.

Les mélomanes n'auront pas manqué de le noter: Pierre-Laurent Aimard est de retour cette semaine au Luxembourg avec un programme consacré à Bach. Celui qui a été le premier artiste invité en résidence à la Philharmonie en 2005 est l'un des grands pianistes de notre temps et l'un des spécialistes les plus sollicités de musique contemporaine. Mais pas seulement. Dans un entretien, il décrypte son univers musical.

Vous avez surtout la réputation d'un interprète hors pair de musique contemporaine. Or vous avez présenté jeudi l'intégrale du «Clavier bien tempéré» de Bach, achevée en 1750. Avez-vous un répertoire de prédilection?

Il me semble naturel de jouer de la musique d'aujourd'hui. Cela me situe un peu à part dans l'univers de la musique classique qui reste extrêmement conservateur et couvre à peu près un siècle et demi. Pour moi, il n'y a pas une culture dominante ou une expression qui serait meilleure que les autres. Bach, Mozart et Schumann sont merveilleux mais ils ne sont pas les seuls. J'ai besoin de cette diversité pour mon équilibre intérieur.

Pourquoi Bach aujourd'hui?

Je n'ai presque jamais joué l'oeuvre de Bach en public jusqu'à l'âge de 50 ans. C'est l'une des plus riches musiques écrites pour clavier, mais c'est aussi l'une des plus difficiles. C'est une oeuvre de synthèse qui demande d'avoir une bonne compréhension de l'époque baroque mais qui absorbe aussi beaucoup de style antique. Par ailleurs, le «Clavier bien tempéré» n'a pas été écrit pour le piano moderne mais pour clavecin, orgue ou clavicorde baroques. J'ai estimé qu'il me fallait du temps. Et en effet, cela a été une aventure.

Est-ce une oeuvre qui peut encore surprendre?

A mon sens, il y a encore des choses à faire pour l'interprétation de Bach. Depuis plus d'un demi-siècle, il y a eu une révolution baroque grâce à des musiciens bien informés qui ont travaillé avec des musicologues et des instruments d'époque. Ils ont remis les pendules à l'heure. Or l'absorption de ce phénomène sur des instruments modernes n'est pas complètement faite. Même dans les conservatoires, on enseigne Bach toujours de façon post-romantique, très académique. D'autre part, cette partition a été conçue en dehors de tout projet d'exécution publique. Cela m'intéresse de présenter une oeuvre comme cela, absolument pas formatée pour un concert tel qu'il se pratique actuellement.

Il y a un paradoxe à rechercher plus d'authenticité tout en jouant Bach sur un piano moderne...

C'est un défi. La question est de savoir si le défi mérite la peine d'être relevé. Je pense que oui. Tout d'abord parce que Bach trouvait que les instruments de son temps étaient insuffisants, en particulier le clavecin. Le piano moderne a des richesses de relief, de dynamique et de variété qu'aucun des instruments de l'époque n'avait. Par ailleurs, le «Clavier bien tempéré» a été pensé pour différents instruments. Le piano moderne permet quelque part de résoudre le problème de l'immense variété de ces styles instrumentaux.

Comment concrètement avez-vous abordé cette oeuvre que vous aviez sûrement jouée dès votre plus jeune âge?

La malchance et la chance que j'ai eues, c'est que j'ai mal appris ces préludes et fugues. A Paris, je n'ai pas été éduqué pour Bach. Je n'avais aucune conscience stylistique de cette musique. De sorte que quand je l'ai reprise récemment, j'ai pu faire une table rase complète. Le projet est né il y a un peu plus de deux ans et j'ai pris sept mois de congé sabbatique pour pouvoir le préparer correctement. Je ne voulais pas lui imposer notre tempo d'aujourd'hui.

Comment expliquez-vous la fascination toujours intacte des mélomanes comme des interprètes pour l'oeuvre de Bach?

Je crois que cela tient à sa dimension artistique – une sève de création jamais interrompue, la manière dont il transcende tous les cadres de référence de son époque – et artisanale – un savoir-faire qui atteint la perfection dans les moindres détails. Il est incomparable.

Même la musique pop ou techno l'a récupéré. Cela vous semble légitime ou de la profanation?

C'est un hommage à son pouvoir extraordinaire de communication. Il n'est jamais hermétique. Il y a toujours un niveau dans son oeuvre qui parle aux différents types d'éducation. Il y a un côté universel chez lui.

INTERVIEW: MARIE-LAURE ROLLAND


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