Un sac de sable pour s’éclairer
Un sac de sable pour s’éclairer
PAR SARAH NORRMAN (SPARKNEWS)
Tout a commencé par un échec. Mais la roue de la créativité était lancée, et elle fit aboutir un autre projet. Martin Riddiford et Jim Reeves, consultants londoniens en design industriel, ont été contactés par l’association caritative britannique SolarAid pour mettre au point un système d’éclairage fonctionnant sur panneaux photovoltaïques et batterie pour un prix de revient inférieur à 6 dollars (4,5 euros). L’objectif était d’offrir aux habitants des pays en précarité énergétique une alternative au kérosène, combustible coûteux, toxique, polluant et dangereux.
Au terme de longues recherches, les deux inventeurs ont jeté l’éponge: puisque l’énergie solaire devait nécessairement être stockée dans une batterie pour être restituée après la nuit tombée, toutes les solutions revenaient trop cher et étaient inefficaces. Il fallait trouver un système susceptible de générer de l’énergie à moindre effort et de l’utiliser aussitôt. Et c’est là que les deux hommes eurent une illumination.
«Le moment où nous avons compris que l’on pouvait éviter de stocker l’énergie en la produisant grâce à la force gravitationnelle a réellement été une révélation, raconte Reeves. L’idée qu’un dispositif aussi simple qu’un sac lesté de pierres ou de terre puisse produire la tension nécessaire à générer l’énergie cinétique en fut une autre.» La GravityLight surpasse les autres appareils remontés manuellement, comme la radio à manivelle ou les lampes à pédales, par la vitesse à laquelle elle produit de l’énergie: en trois secondes, le temps de relever le sac, on parvient à générer jusqu’à vingt-huit minutes de lumière basse tension. «Dans un premier temps, Martin a démontré la faisabilité du principe sur un système bricolé à partir d’une roue de vélo, de chaînes et de lampe à dynamo», poursuit Reeves.
0,1 watt
La Gravity Light pèse un peu moins d’un kilogramme et le kit se compose de quelques éléments de base: le boîtier principal, dont l’aspect est à mi-chemin entre un œuf minuteur de cuisine et un moulin de canne à pêche; la courroie à laquelle est suspendu le poids qui alimente la dynamo, et deux sacs de lests munis d’attaches. Lorsque le premier sac est lesté de pierres ou de sable, il pèse environ 10 kg (s’il est trop plein, un voyant rouge s’allume). Une fois rempli, le petit sac se fixe à l’autre extrémité et fait office de contrepoids, actionnant la courroie qui transmet progressivement l’énergie cinétique à une ampoule LED. «A l’utilisation, il fait un petit bruit, mais si discret qu’il est presque silencieux», précise Reeves. La GravityLight développe 0,1 watt et peut alimenter et recharger d’autres appareils – une lampe de poche ou une radio, par exemple.
Jusqu’en 2012, l’avenir de la GravityLight n’était pas particulièrement radieux : les inventeurs avaient désespérément besoin d’argent pour produire et distribuer plus d’un millier d’unités afin de mener des essais sur le terrain en Afrique et en Inde. Ils voulaient s’assurer que leur lampe serait adaptée aux milieux difficiles auxquels elle était destinée. Et ils se demandaient si les utilisateurs seraient prêts à se lever toutes les vingt minutes pour remonter le sac.
Reeves et Riddiford ont lancé un appel de fonds sur le site de financement participatif Indiegogo. Les résultats furent stupéfiants: en quatre jours, ils avaient dépassé leur objectif et recueilli 50.000 dollars (37.500 euros). Puis, l’effet boule de neige a fait le reste. «Les Internautes ont compris que la GravityLight marcherait», assure Reeves, soulignant que le projet a autant séduit des ONG que des particuliers. «Quiconque a vécu un ouragan ou un tsunami sait ce que peut être une panne d’électricité.» A mi-course de la campagne, Bill Gates a envoyé un Tweet à ses 9,2 millions de suiveurs, qualifiant la lampe d’«innovation très sympa». En l’espace de quarante jours, les dons atteignirent les 400.000 dollars (300.000 euros).
La phase de tests sur le terrain s’est déroulée dans 27 pays, du Pérou aux Philippines, avec l’appui de plusieurs associations caritatives, organisations d’aide humanitaire et ONG. Riddiford a fait le voyage au Sri Lanka pour effectuer des essais sur place, et s’est rendu compte qu’il fallait améliorer le prototype pour éviter que la lampe ne s’éteigne trop brutalement, plongeant les maisons dans le noir total. Son collègue et lui ont donc modifié la forme du sac afin qu’il repose au sol pendant environ 60 secondes, de sorte que la lumière s’atténue et laisse le temps à l’utilisateur de le relever pour amorcer la recharge.
Les designers ont également compris que les usagers avaient besoin d’un éclairage direct pour certaines tâches et ont mis au point des SatLights qui se fixent au GravityLight et éclairent des coins particuliers d’une pièce – un bureau ou un fourneau, par exemple. «Plus on en connecte, plus la luminosité est faible, mais la perception de la luminosité est telle qu’en reliant une seule SatLight à la GravityLight, on a l’impression d’avoir plus de 50 % de la puissance lumineuse de chaque LED. Cela s’explique en partie par la façon dont nous percevons l’intensité lumineuse, et en partie par une propriété des LED», explique Reeves.
Commercialisée en 2015
La GravityLight devrait être commercialisée en 2015, à un prix initial d’environ 10 dollars (7,50 euros) dans les pays en développement – un coût que Riddiford et Reeves espèrent encore abaisser grâce aux bénéfices engrangés sur les marchés occidentaux. Entre autres partenaires potentiels, ils sont actuellement en pourparlers avec des boutiques de matériel de camping et des supermarchés.
Le projet avorté de lanterne solaire a ainsi pris un tour tout à fait inattendu et s’est désormais transformé en une véritable mission internationale. Reeves affirme n’avoir aucun regret: «La GravityLight est sans conteste le projet le plus gratifiant sur lequel il m’ait été donné de travailler.»
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