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«J’avais l’impression d’amener les gens à l’abattoir»
International 4 Min. 17.03.2023
Procès des attentats de Bruxelles

«J’avais l’impression d’amener les gens à l’abattoir»

Ce dessin montre l'accusé Salah Abdeslam le 12 septembre 2022.
Procès des attentats de Bruxelles

«J’avais l’impression d’amener les gens à l’abattoir»

Ce dessin montre l'accusé Salah Abdeslam le 12 septembre 2022.
Illustration: AFP
International 4 Min. 17.03.2023
Procès des attentats de Bruxelles

«J’avais l’impression d’amener les gens à l’abattoir»

Les témoignages douloureux revenant sur l’explosion de Maelbeek se succèdent au procès des attentats de Bruxelles.

Par Max Helleff (Bruxelles)

La première voiture du métro avait déjà pénétré dans le tunnel lorsque la bombe actionnée par Khalid El Bakraoui a explosé. Christian Delhasse, le conducteur de la rame, se souvient de ce matin du 22 mars 2016 comme si c’était hier. Les images des corps déchiquetés le talonnent: «Une femme avait le bassin coupé». Seize personnes et le kamikaze sont morts à Maelbeek.

Christian Delhasse est venu témoigner dans le cadre du procès des attentats de Bruxelles qui se tient depuis trois mois à Haren, dans l’ancien bâtiment de l’Otan reconverti en cour d’assises. En entendant l’explosion, dit-il, il a immédiatement compris ce qui venait de se passer. Eventrée par la bombe du terroriste, le second wagon n’est plus qu’un lambeau de ferraille. Christian Delhasse descend sur le quai: «Deux personnes m’ont demandé si elles pouvaient m’aider. Elles ont aidé les personnes de la première voiture. J’ai dirigé les gens vers l’autre sortie pour pas qu’elles passent devant la deuxième voiture, car là c’était un cauchemar». Les morceaux de cadavres jonchent le wagon. Le conducteur cherche «l'extincteur pour éteindre une personne qui brûlait», fait sortir deux voyageurs de la voiture, trouve «une dame assise qui cherchait son bébé». Sur le quai en face, un policier l’avertit qu’il y a peut-être une autre bombe. «Moi j’avais besoin d’aide: je cherchais le bébé. Finalement, c’est lui qui l’a trouvé sur les rails. J’ai montré la maman pour qu’ils restent ensemble».

La vie de Christian Delhasse ne sera jamais plus pareille

Le jour même du drame, le conducteur de métro a tenté d’enfouir au fond de lui cette journée marquée par la mort aveugle. «Arrivé chez moi, j’ai rassuré tout le monde: ‘Tout va bien, et je veux plus jamais parler de tout cela. Ils ont respecté ma demande'». Le lendemain, Christian Delhasse a repris le travail. Depuis, sept ans ont passé qui n'ont pu effacer l’ignominie. «Chaque jour où je roulais, j’avais l’impression d’amener les gens à l’abattoir».

Il n’y a que les animaux avec lesquels je me sens bien.

Christian Delhasse

La vie de Christian Delhasse ne sera jamais plus pareille: «Je déteste la foule, ça me stresse. A Bruxelles, j’évite les transports en commun. Je suis toujours sur le qui-vive. J’ai de plus en plus de mal à m’exprimer. Il n’y a que les animaux avec lesquels je me sens bien». La présidente de la cour d’assises compatit, lui demande quel est son animal de compagnie – «un chat» - et lui conseille une thérapie intégrant la présence d’animaux. Elle le rassure, cherche à alléger son sentiment de culpabilité: «Ce que vous avez pu sauver, vous l’avez sauvé».

Jeudi matin, un autre témoin a lancé à l’adresse des accusés: «Vous n’aurez pas ma haine, car la haine c’est vouloir la mort de l’autre, et je ne veux la mort de personne, c’est la justice que je souhaite». Pierre Bastin est le papa d’Aline, une jeune femme de 29 ans décédée elle aussi dans l’explosion de Maelbeek.


Nidhi Chaphekar, victim of the terror attacks, former cabin manager for Indian airline Jet Airways, who wrote a book called 'Herboren', reacts after her testimony at a session of the trial of the attacks of March 22, 2016, at the Brussels-Capital Assizes Court, on March 7, 2023 at the Brussels' courthouse. (Photo by LAURIE DIEFFEMBACQ / Belga / AFP) / Belgium OUT
Les témoignages poignants des victimes des attentats de Bruxelles
Les témoignages des victimes et de leurs familles se succèdent au procès des attentats de Bruxelles, composant un effroyable martyrologe.

Avec ces témoignages, la cour d’assises a quitté l’enfer de Brussels Airport pour plonger dans celui de la station de métro Maelbeek. Mais auparavant, la famille de Fabienne Vansteenkiste était venue raconter sa longue attente. Fabienne travaillait à l’aéroport. Les terroristes l’ont enlevée aux siens. Ce n’est que le 25 mars, trois jours après les attentats, que son décès leur sera officiellement communiqué. Son frère Philippe dira aux jurés que «pleurer et souffrir, pour moi, c’est très difficile. Je ne veux pas donner satisfaction à Daech et donc, finalement, on est coincé».

Les démarches auprès des assureurs

Il est beaucoup question lors de ce procès des assurances et des difficultés qu’elles posent aux victimes. 1.419 d’entre elles ont introduit une déclaration après les attentats «non seulement pour des décès ou des dommages corporels, mais aussi pour divers dommages, en ce compris des dégâts causés à des bagages».  A la fin de l’année dernière, 65,7 millions d'euros avaient été versés, a indiqué la fédération sectorielle Assuralia. Mais pour ceux qui souffrent dans leur tête et dans leur chair, il n’y a pas que l’argent qui compte. Les démarches auprès des assureurs tiennent souvent de la double peine.

Pour la première fois depuis longtemps, tous les accusés ont assisté mercredi à leur procès, y compris Salah Abdeslam. Ils ont obtenu gain de cause devant la cour d’appel de Bruxelles qui leur a donné raison en interdisant les génuflexions imposées lors des fouilles à nu, une pratique jugée contraire à la Convention européenne des droits de l’homme. La cour a ajouté que la pose des lunettes aveuglantes ne sera autorisée que lors des transferts dans les véhicules de police.


A protester holds a portrait and a candle during a demonstration to ask for the release of Belgian aid worker Olivier Vandecasteele, who is held in Iran, on February 26, 2023 in Brussels. - Iran arrested Vandecasteele in February 2022, and he has since been held in conditions that Belgium's government has described as "inhumane". The authorities sentenced him this month to more than 12 years behind bars for "espionage" as well ordering him to be subjected to 74 lashes. (Photo by NICOLAS MAETERLINCK / Belga / AFP) / Belgium OUT
Une lueur d’espoir pour le Belge Olivier Vandecasteele
Une décision de la Cour constitutionnelle laisse entrevoir une possibilité de libération pour le travailleur humanitaire.

Le procès a pris du retard en raison des différentes péripéties dont il a été l’objet ces dernières semaines. Les délibérations sur la culpabilité auront lieu en juillet. Les peines seront fixées en septembre.

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